La crise? Quelle crise ? Outre-Manche, le chiffre d'affaires global du marché de la communication éditoriale des marques britanniques augmente sans discontinuer depuis quinze ans. Et le milliard de livres sera dépassé en 2012. Ces deux dernières années, un ralentissement de la croissance a été enregistré. Mais de chute, point. Le print représente encore 75% des dépenses totales de communication éditoriale mais la progression du numérique (podcasts, sites Web, vidéos) compense largement le déclin progressif de l'imprimé.
Au Royaume-Uni, on dénombre quelque 5 000 magazines de marques. Leur objectif: que leurs lecteurs – dont 75% sont nommément ciblés grâce notamment à des services performants de Royal Mail – se distraient et s’informent comme ils le feraient avec un magazine généraliste ou culturel... tout en prenant note que telle marque ou société fait autorité en la matière.
Et la méthode marche de mieux en mieux. Selon l'étude de référence de l'Association of Publishing Agencies (APA), 32% des cibles sont davantage impliquées dans leur relation avec la marque après avoir lu un consumer magazine. Les marques précisent que la fidélité de leurs clients constitue leur principal objectif, devant l'information sur leurs services et produits, puis l'augmentation des ventes. L'APA estime que la communication éditoriale permet à elle seule d'augmenter de 8% les ventes des sociétés qui y ont recours. «La plus grande arme de la communication éditoriale réside dans la confiance et l'importance qui lui sont accordées par ses clients, et dans le fait qu’il s’agit d'un des instruments les plus efficaces et quantifiables pour les directeurs de marketing. Les sites Internet, magazines ou podcasts fabriqués par les marques apprennent au fil du temps à maximiser le potentiel de leur communication éditoriale à travers des produits novateurs», affirme Julia Hutchinson, directrice exécutive de l'APA.
Quitte à prendre le lecteur à contrepied et à utiliser des ficelles de la «vraie» presse. Une couverture du magazine de Savills, titrée Breaking the waves, présente ainsi une plage sur fond de coucher de soleil. Bien loin du métier de promoteur immobilier. La refonte de cette revue a permis d'améliorer de 36% la perception de la marque chez les lecteurs, qui consacrent en moyenne 54 minutes à sa lecture. Le magazine Siemens UK (agence Summersault) donne, lui, dans le catastrophisme, en montant un dossier environnemental titré : «Is time running out for the planet ?» La firme Hammerson (agence Northstar), qui possède plusieurs grands centres commerciaux dans les grandes villes britanniques, a nommé son titre Addiction. En une, des mannequins posent langoureusement devant les yeux de la lectrice. Addiction tire à 1 million d'exemplaires. Résultat, un tiers de nouveaux visiteurs en plus selon une étude. L'heure est aussi à la segmentation des contenus et les magazines de marques suivent cette logique. Addiction offre des contenus légèrement différents selon les catégories de population et les régions où il est distribué. Il est vrai que la lectrice de l'ouest londonien huppé diffère de celle de Southampton voisine des chantiers navals.
Mark Lonergan, dirigeant de l'agence August Media, qui conçoit notamment les 24 éditions mondiales du magazine d'Ikea –une référence–, souligne que les entreprises ne doivent pas manquer le virage du numérique. Ikea se décline d'ailleurs aussi bien sur Internet que sur papier. «La production d'un magazine à une telle échelle signifie que la simplicité dans l'audace est l'objectif sous-tendant notre stratégie éditoriale et visuelle, poursuit-il. Les mots doivent exciter, informer et frapper les esprits. Les visuels doivent donner envie de tourner les pages.» De son côté, Ikea se félicite que «malgré la forte augmentation du nombre de pays couverts, et donc de la charge de travail, la qualité du magazine n'a jamais été aussi bonne.» Dans une période de marasme pour le marketing et la publicité, les nombreux petits et grands exemples britanniques de réussite revigorent.