Flashback
BNP proclame « Votre argent m’intéresse », CLM et RSCG voient le jour, la publicité quitte l’ère de la réclame dans cette décennie. Mais en gardant ses spécificités par rapport au modèle anglo-saxon.

C’est en 1971 que le jeune informaticien Maurice Lévy est recruté par Publicis, agence fondée en 1926 par Marcel Bleustein-Blanchet. L’année suivante, lors de l’incendie qui ravage le siège de l’agence, il récupère les archives informatiques parmi le brasier et permet à l’entreprise de redémarrer. Il deviendra le bras droit et le successeur de « Marcel ». L’anecdote a son importance, car elle montre la professionnalisation de la publicité française, qui quitte l’ère de la réclame pour adopter des méthodologies modernes. En 1970, Armand Morgensztern, ancien directeur de recherche de Publicis et Carat invente Le Bêta de Morgensztern, le coefficient de mémorisation publicitaire. De nouvelles agences voient le jour : CLM est fondée en 1972 par Allen Chevalier, Jean-Loup Le Forestier et Philippe Michel, RSCG, acronyme de ses fondateurs Bernard Roux, Jacques Séguéla, Alain Cayzac et Jean-Michel Goudard, se forme en 1976. L’influence de Bill Bernbach, le père de la publicité moderne avec les annonces Avis ou Volkswagen, traverse l’Atlantique, même si la France reste un marché à part. Claude Carouge, ancien dirigeant de McCann et formateur à l’ECS (groupe MediaSchool, propriétaire de Stratégies), a débuté sa carrière en 1971. Il se souvient d’une époque à la « Mad Men » avec dix ans de décalage par rapport aux États-Unis. « Du fait du nombre limité de secteurs et de chaînes, la télévision a mis du temps à devenir le premier média en termes d’investissements, rappelle-t-il. Chez McCann, la France n’était pas considérée comme un marché d’avenir. C’est aussi ce qui lui a permis d’être le seul pays d’Europe dont deux des trois premières agences n’étaient pas américaines : Publicis et Euro RSCG. »

 

« Une femme, une pipe, un pull »

 

L’exception française se retrouve dans la formule restée célèbre, « En France on n’a pas de pétrole mais on a des idées » de l’Agence pour les économies d’énergie, future Ademe, en 1978. Une campagne qui aboutira essentiellement à l’instauration de l’heure d’été mais qui reste assez pertinente sur la question de la souveraineté et de la dépendance au pétrole. Il fallait aussi une sacrée audace en 1973 pour afficher en pleine rue le slogan « Pour parler franchement, votre argent m’intéresse ». Une idée signée Daniel Robert chez Publicis pour BNP qui ne sera exploitée finalement qu’un an mais qui restera dans l’histoire de la banque. Autre innovation, les produits libres de Carrefour, des denrées de base à prix bas, se lancent en 1976 dans une mise en scène très sobre de RSCG : « Sans nom. Aussi bons. Moins chers. » En pleine crise pétrolière, la question du pouvoir d’achat est au coeur des messages, comme dans la saga Eram qui démarre en 1975 avec CLM et Valérie Mairesse en consommatrice délurée. La publicité de l’époque compte aussi son lot de pépites sexistes comme l’intriguant « Une femme, une pipe, un pull » des jerseys Paul Fourticq en 1970.

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