Carte blanche
En team depuis 2015 et nommés directeurs de création de TBWA Paris début 2019, Fabien Duval et Glen Troadec cultivent le mauvais esprit, leur goût pour l'écriture et la bizarrerie.

[Cet article a initialement été publié le 12 mars 2020]

 

La bizarrerie

F.D. « Dans les agences de pub, on entend tous les jours des histoires. On peut vite arriver à une saturation émotive, où plus rien ne nous surprend. Mais le bizarre, lui, continue à émouvoir parce qu’on le voit peu. De plus, tout le monde réagit différemment au bizarre. Le film Le labyrinthe de Pan, par exemple, fascine certaines personnes, fait peur, ou fait rire. »

G.T. « Le bizarre, c’est ce qui est tordu, pas “comme il faut” : les monstres, les censurés, les mal-aimés, les dingues, les personnages de Bukowski, les installations de Roger Ballen… Les décalés du monde sont autant de manières de nous convaincre qu’on n’est pas si dérangé que ça. »

 

Les problèmes

F.D.  « Dans le temps, on parlait des problèmes. Maintenant, on essaye d’y trouver des solutions et c’est un vrai changement de métier. On a par exemple réalisé un papier peint couvert d’histoires [pour Castorama] répondant à la problématique de la routine de la lecture du soir pour endormir les enfants et du gain de place dans les appartements parisiens. »

G.T. « La solution se trouve souvent dans le problème lui-même. Il y a quelques années, on communiquait sur les problèmes en faisant des constats. Aujourd’hui, avec un peu d’innovation et une bonne idée, on peut les solutionner. C’est par là que les créatifs continueront à être des révolutionnaires positifs. »

 

Le mauvais esprit

F.D. « Le mauvais esprit est très important dans une société très politiquement correct… On est tous d’accord avec le fait qu’il faut sauver la planète, mais devons-nous ne montrer que ça ? Si on est interrogé sur Winamax, qui demande aux jeunes de parier de l’argent pour en gagner plus, on ne peut pas prendre le prisme de la bienveillance, puisque les gens s’attendent à quelque chose qui ressemble à leur monde. »

G.T. « Il faut le conserver afin qu’on n’ait pas tous le même discours. Le mauvais esprit, c’est la manifestation de l’esprit critique. Il peut être constructif et surtout il fait marrer. On dit les choses comme elles sont. C’est un état d’esprit qui permet de bien communiquer avec le public car on ne leur ment pas. On en a tous besoin. »

 

L'écriture

F.D. « En tant que concepteurs-rédacteurs, on a un amour particulier pour l’écrit. Il n’y a pas plus inspirant, parce qu’il n’y a pas plus large : on produira toujours plus de livres, comme on produit des films ou des séries. De plus, lorsqu’on produit un film, on est très vite limité par le coût, alors qu'on peut écrire la plus incroyable des histoires sans que ça nous coûte quoi que ce soit. »

G.T. « Écrire, c’est la liberté totale. Cependant, cela demande une réelle discipline au quotidien. La langue française est en pleine ébullition et on sait de moins en moins comment écrire. Quand on écrit, on prend aussi son temps, et c’est quelque chose qu’on est en train de perdre. »



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