David Assouline, sénateur PS de Paris, rapporteur de la commission d’enquête sur la concentration des médias, revient sur les grands sujets d'actualité de la semaine.
Les auditions de votre commission d’enquête sur la concentration dans les médias.
Il y a une double concentration en action : celle du groupe Vivendi qui va de la télé à la presse et à l’édition, et celle de la fusion TF1-M6, qui rassemblerait 41,5% de l’audience et 75% du marché publicitaire. Sans oublier la presse quotidienne entre les mains de grands groupes. Cela mérite un débat public, d’autant que le monde médiatique est en pleine révolution du fait des réseaux sociaux. Le paysage n’a plus rien à voir avec celui de la loi de 1986. On peut aussi noter la dégradation du climat démocratique. L’opération Vivendi s’est accompagnée de la banalisation de propos et de thèses qui, depuis la libération, étaient hors champs républicain. La concentration limite la diversité de l’offre et le pluralisme. Ce ne sont pas seulement des opérations financières, ce sont aussi parfois des processus de normalisation idéologique. Cela atteint la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias qui sont trois principes constitutionnels depuis un amendement que j’ai introduit en 2008.
Le livre de Jean-Baptiste Rivoire, L'élysée (et les oligarques) contre l'info, sur les incidences de cette concentration sur l’information.
En général, ce ne sont pas des interventions directes, mais de l’autocensure, l’évitement de traiter des sujets. Quand un groupe a son activité principale dans le champ concurrentiel de la téléphonie, du BTP ou de l’armement, la pression existe et traiter d’une actualité touchant à cette activité peut être empêché. Ces grands groupes, en plus, vivent souvent de la commande publique, ce qui leur donne une influence sur l’État et les décideurs politiques avec lesquels ils font affaire. C’est une endogamie qui n’est pas saine.
Jean-Michel Blanquer dans l’œil du cyclone après la mobilisation des enseignants et ses couacs en communication.
C’est beaucoup plus qu’une question de communication. C’est un problème de gouvernance, de respect. Dans une crise inédite, penser qu’on puisse avertir, un dimanche soir, d’Ibiza, par voie de presse, du changement d’un protocole qui nécessite mobilisation et abnégation des parents et des enseignants, c’est un mépris et une méconnaissance de la façon dont on peut affronter les grands dangers qui sont devant nous.
Le rapport de Gérald Bronner sur la désinformation et le complotisme.
Il dit quelques tautologies et évidences. Oui, il faut répondre avec de l’éducation aux médias. Je ne vois pas de propositions très innovantes, d’autant qu’il y a une tendance à dire que la solution n’est pas dans la régulation des Gafam. Or la façon dont les réseaux sociaux fonctionnent donne l’avantage à la désinformation : ce qui marche le plus, c’est ce qui est le plus scandaleux. Le fonctionnement structurel de ces plateformes est à revoir. Il doit y avoir de vraies contraintes.
Karcher qui communique pour contrer l’utilisation de sa marque par Valérie Pécresse.
Je les comprends. Ce que veut symboliser Valérie Pécresse, c’est le nettoyage de la saleté à propos d’êtres humains. Sous Nicolas Sarkozy, 10 000 postes de policiers ont été supprimés. C’était donc plutôt un tuyau d’arrosage percé. Le problème, c’est cette propension à frapper l’opinion en courant derrière l’extrême droite, y compris quand on n’a pas fait grand-chose.
La SDJ du JDD qui craint un rapprochement avec CNews après la nomination de Jérôme Béglé.
Ils voient bien comment ça s’est passé pour Europe 1 et CNews. Une de propositions possibles, c’est de compléter le droit de cession ou la clause de conscience. C’est un droit individuel, il faudrait que ce soit un droit collectif. Un dispositif légal de protection des rédactions plus efficace que ce que prévoit la loi Bloche.