On ne change pas une équipe qui gagne mais on peut promouvoir ses talents. C'est ce qu'a fait la présidence de Radio France en mettant à la tête de la station, le 1er janvier, Jean-Philippe Baille, ex-directeur de la rédaction, et pour le remplacer Estelle Cognacq, qui dirigeait l'agence Franceinfo. Interview à deux voix.
Comment expliquez-vous les résultats historiques de Franceinfo, devenue la 3e station de France?
Jean-Philippe Baille. Nous récoltons les fruits de la qualité de notre travail et de notre exigence au quotidien pour délivrer une information fiable, impartiale et vérifiée, portée par notre rédaction de 185 journalistes. Le public en a notamment pris conscience pendant le confinement.
Estelle Cognacq. Cela repose aussi sur le travail de centralisation et de certification de l'information que nous effectuons avec l'agence Franceinfo, qui fête ses cinq ans. Cette dernière édite des dépêches, écrites par 17 personnes dédiées et avec la collaboration de tous nos journalistes. Tous nos médias (radio, télé, digital) et les stations de Radio France y ont accès. Nous ne parlons plus de « source proche de l'enquête ou du dossier » mais seulement d'infos vérifiées et sourcées. Quitte à attendre une confirmation pour diffuser une info, ce qui est parfois difficile. Nous bénéficions de notre réseau en région via France Bleu. L'info locale représente 20 % de nos dépêches.
N'avez-vous pas bénéficié aussi du besoin d'information lié à la crise sanitaire ?
J.P.B. Bien sûr. Mais alors qu'il n'y a jamais eu autant d'infos disponibles sur tant de supports, nous sommes devenus une valeur refuge et une référence pour les auditeurs. C'est le « réflexe info » lancé par Laurent Guimier [directeur de la station de 2014 à 2017 et actuel directeur de l'info de France Télévisions]. Le public apprécie que l'information soit livrée avec une plus value éditoriale perceptible dans nos formats comme Le Décryptage éco, Le Billet Sciences, porté par un nouveau pôle sciences santé, environnement avec six journalistes chevronnés, Le Vrai du faux avec cinq journalistes, qui traquent les fake news.
E.C. Le public apprécie que nous invitions des spécialistes légitimes et pas des « toutologues », qui délivrent leurs opinions.
Quelle est votre marge de progression ?
J.P.B. Illimitée (rires). Nous avons le sentiment qu'elle est structurelle et pas conjoncturelle.
On a toujours l'impression d'une antenne télé distincte de la radio, en dépit du projet de média global...
J.P.B. En termes d'audience, la chaîne de télé n'est pas à la hauteur des autres chaînes d'info mais elle grapille des points. Notre travail commun et nos synergies vont se développer.
E.C. Aujourd'hui, deux Français sur trois entrent en contact avec la marque Franceinfo chaque mois, notamment en digital.
Quels sont vos projet s ?
J.P.B. Trois podcasts : un avec le nageur Yannick Agnel sur l'e-sport en mars, Mars la nouvelle odyssée (7 épisodes de 20 mn), et Élysée, la bataille de Neïla Latrous. Avec 14 personnes, on développe la vidéo sur les réseaux sociaux. On propose déjà les cinq infos du jour sur Instagram.