Dossier Innovations TV
En élargissant le placement de produit au documentaire et au divertissement, le projet de loi audiovisuel, dont l'examen à l'Assemblée est repoussé, ouvre la voie à de nouvelles recettes. Mais les régies télé entendent bien ne pas se faire mettre à l'écart.

Cet article fait partie du dossier publié le 09/04/2020 dans le Stratégies n°2034

 

Les diffuseurs français sont vent debout contre l’élargissement du placement de produit à la télévision tel que prévu dans le projet de loi audiovisuel, dont l'examen à l'Assemblée est reporté sine die en raison du coronavirus. Début mars, les députés ont adopté en commission des affaires culturelles l’article qui permet d’élargir le placement de produit au documentaire et au divertissement, comme prévu dans la directive européenne Services de médias audiovisuels (SMA). Seules limitations à cet élargissement : les programmes d’information et d’actualité, les émissions de consommation ainsi que les programmes religieux et ceux destinés aux enfants.

40 millions d'euros de recettes par an

Un tel assouplissement pourrait générer 40 millions d’euros de recettes annuelles, selon les estimations de l'Union des marques et le Syndicat des producteurs télé (Spect), tous deux très favorables à ces nouvelles dispositions. Celles-ci permetteraient aux annonceurs de négocier directement avec les producteurs TV le placement de leurs produits dans les programmes… et de s’affranchir ainsi des régies publicitaires des chaînes. D'où l'opposition de ces dernières à ce texte, qui va purement et simplement « retirer à la télévision ses recettes publicitaires », estime le Syndicat national de la publicité télévisée (SNPTV).

« Le projet de loi audiovisuel [entraîne] un problème de contrôle et de responsabilité des publicités ainsi diffusées ainsi qu'un affaiblissement du modèle économique des chaînes de télévision et de l’écosystème audiovisuel », argumentait le syndicat des régies télé dans un communiqué publié fin février. Et si le SNPTV se réjouit par la voix de son délégué général en charge des affaires publiques, Antoine Ganne, que « le nouveau texte redonne son pouvoir de régulation au CSA », il s’oppose à l’élargissement et réclame le statu quo. « Le placement de produit dans les événements sportifs, par exemple, permettrait aux ayants droit internationaux de commercialiser des placements publicitaires directement dans un match, sans que le diffuseur n’ait son mot à dire et n’en tire profit ! Ce serait le début de la désintermédiation des éditeurs français », alerte le syndicat. « Il est indispensable que les régies gardent la maîtrise de la commercialisation de leur espace », clame Antoine Ganne.

Pour l'heure, les régies privilégient une solution de placement de produit en post-production leur permettant de garder la main, comme le fait déjà TF1 avec Mirriad dans la série Demain nous appartient. FranceTV Publicité lui a emboîté le pas en utilisant aussi dans ses fictions la technologie de la start-up spécialisée dans l’in-video advertising. Reste à voir si les uns et les autres auront réussi à faire entendre leurs arguments aux députés lorsque le processus législatif pourra enfin reprendre.

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