Nouveau parcours client, nouvelles fonctionnalités, nouvelle interface… Sans crier gare, la SNCF lançait le 25 janvier dernier une toute nouvelle plateforme de vente. Un mois après son inauguration, l’application sombre toujours sous le feu des critiques.
Du train à la trottinette en passant par le covoiturage: la SNCF a lancé en ce début 2022 un site internet et une application pour permettre aux voyageurs d'organiser leurs déplacements du quotidien dans toute la France. SNCF Connect, conçue par SNCF Connect & Tech, la filiale digitale de SNCF Voyageurs créée début 2021, était censée concrétiser la promesse d’une porte d'entrée unique vers des services jusqu'ici séparés: la plateforme de vente Oui.SNCF et «l'Assistant SNCF» qui donne des informations sur l'état du trafic. Et réunir au même endroit tous les titres de transports, les abonnements et les informations pour organiser, réserver et modifier son trajet avec TGV Inoui, Ouigo, Intercités, TER, le covoiturage, etc.
Bugs. Seulement voilà, deux mois après son inauguration, c’est peu dire que l’application déçoit. Les bugs sont légion: le moteur de recherche défaillant, des itinéraires existants, des QR codes des billets illisibles, la disparition des comparateurs de prix, et même des pertes de dossiers voyageurs… Mais les critiques portent également sur le design de l’interface elle-même, jugée beaucoup trop sombre. Mi-février, le ministre délégué aux Transports Jean-Baptiste Djebbari a sommé publiquement la société ferroviaire de «résoudre au plus vite» les dysfonctionnements de sa nouvelle application numérique. Le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou a promis que des améliorations seraient apportées d'ici à la fin mars. Annonçant que plus 30% des effectifs était mobilisé pour répondre au téléphone à un certain nombre de requêtes.
Reco N°1 : «Une innovation de rupture doit répondre aux usages actuels», Maxime Audouin, stratégiste mobilité chez Fabernovel
«“Qui trop embrasse mal étreint” est sans doute une des règles de design d'expérience parmi les plus simples à énoncer et les plus difficiles à suivre. Entre l’intégration de toutes les offres et la frugalité fonctionnelle pour chercher l’effet “waouh”, la réponse, à l’instar de Nike ou de Google est souvent… de choisir où l’on veut être le meilleur. En proposant trop vite une app de mobilité sur le modèle du MaaS (mobilité comme service), SNCF Connect offre une UX dégradée ainsi qu’un accompagnement souvent limité à un simple tutoriel. Une telle innovation de rupture devrait remettre l’approche design au cœur pour répondre aux besoins des voyageurs et n’être ainsi pas en décalage avec les usages actuels. Puis progressivement, tendre à la construction d’une plateforme de mobilité en intégrant pas à pas les offres tierces, y compris concurrentes.»
Reco N°2 : «La SNCF doit bichonner ses clients sur son application» , Patrick Mareuil, directeur général Europe d’Airship
«Depuis son lancement, la note moyenne de SNCF Connect sur les app stores est de 1,9 sur un mois, alors qu’historiquement elle se situait entre 4,6 et 4,7. Aujourd'hui, toutes les études montrent que les applications concentrent les meilleurs clients, ceux qui sont les plus engagés. La SNCF doit bichonner ses clients sur son application! Il était extrêmement risqué de lancer ainsi une mise à jour globale: graphique, UX, features… Aujourd’hui, la tendance est plutôt aux mises à jour par petites touches, de manière itérative, avec une méthode agile et au déploiement progressif. En outre, pour éviter une disruption trop perturbante, la plupart des applis choisissent de “AB tester” avec des petits groupes d’utilisateurs ciblés. Si la SNCF n’agit pas très vite, cela peut être fatal, à l’instar du boom Uber pendant les grèves des taxis par exemple.»