Depuis 2009, Santé publique France anime un dispositif de marketing social nommé « OnSexprime », dédié à la sexualité des adolescents et dirigé vers cette cible des 12-18 ans. Comme ce public est par nature changeant, l’établissement doit de façon très régulière remettre complètement à plat son approche. « Les problématiques évoluent avec les générations d’adolescents, de même que leurs usages médias. Finalement, nos contenus se périment très vite », révèle Anna Mercier, chargée de marketing social chez Santé publique France.
Trouver les bons sujets
Pour cette campagne, Santé publique France a travaillé avec Babel. « Lorsque nous avons pris le sujet, nous avons fait le constat qu’il existait énormément de sources d’information à la disposition de cette cible, explique Nicolas Kabassakalis, brand manager de l’agence. Encore plus avec l’avènement des réseaux sociaux qui, s’ils sont un moyen supplémentaire de toucher les adolescents, les confrontent à des messages d’une pertinence très variée. Les émetteurs, même quand ils ont de bonnes intentions, ne disposent pas forcément de la bonne information. On voit circuler énormément d’idées reçues, de fausses vérités, de contresens qui sont de nature à influer sur la santé sexuelle. »
Afin d’apporter des réponses et de déconstruire ces contre-vérités, Babel veut qu’elles puissent être exprimées par les jeunes qui y sont confrontés, que ces derniers soient mis dans une logique d’échange avec des experts qui leur parlent sérieusement mais avec une forme adaptée. Le format de websérie, très engageant, avec des épisodes courts, faciles à consommer, s’impose naturellement. Mais en premier lieu, il faut trouver les bons sujets.
« Nous avions certaines idées sur ce qui pouvait éventuellement être mal compris ou peu connu, mais encore fallait-il que ce soient les questions qui préoccupaient les jeunes, indique le brand manager. Nous avons donc d’abord sondé les réseaux puis nous avons interviewé des jeunes pour s’assurer que c’était bien les sujets les plus saillants pour eux, ce qui nous a permis d’ajuster le curseur. Sans cette étape de confrontation, le risque était de traiter les questions par notre prisme, celui de personnes qui ne sont plus dans cette tranche d’âge. »
Un dispositif très sollicité
Chaque vidéo permet ainsi d’aborder un sujet : un jeune pose sa question et un expert – médecin, psychologue, sociologue… – lui répond simplement. Les personnes LGBTQ+, la pornographie ou encore le dépistage des IST sont autant de thématiques abordées. Durant le tournage, si les messages étaient évidemment scriptés, les adolescents ont néanmoins pu donner leur avis sur les mots, les formulations employés. Seul impératif : rentrer dans chaque film par le néologisme « askip », qui donne son titre à la série.
« Sans tomber dans le jeunisme qui est un écueil facile, il nous fallait une amorce qui soit à même de résonner dans l’esprit des jeunes. Démarrer avec ce terme nous a permis de dérouler ensuite chacune des idées reçues », souligne Nicolas Kabassakalis. Des émojis facilitant le langage autour de la sexualité ont également été créés pour l’occasion. Composée de 15 épisodes, la websérie a été diffusée sous deux formats : des teasers (moins de 15 secondes) sur TikTok, Snapchat, YouTube et très ponctuellement Facebook, et des versions longues (1 min 30) sur le site OnSexprime.fr et sur YouTube, au rythme d’un épisode toutes les trois semaines.
Et le dispositif a été très sollicité. « D’un point de vue quantitatif pur, détaille Anna Mercier, le bilan est très bon, avec 4,4 millions de vidéos vues et 160 000 visites sur le site. Les échos ont aussi été très positifs à la fois de la part des adolescents et de celle des professionnels relais, qui sont en contact avec des jeunes, dans des structures d’accueil dédiées à la santé sexuelle comme les centres de planification ou au sein de l’éducation nationale par exemple. »
Verbatim
« Le contexte culturel a changé »
Anna Mercier, chargée de marketing social chez Santé publique France
« Pour toutes nos thématiques, nous avons une démarche basée sur la littérature scientifique et les référentiels internationaux, qui est assez immuable parce qu’elle est liée au développement des adolescents. Mais le contexte culturel a changé, les jeunes d’aujourd’hui sont sur les réseaux sociaux, où il y a des rumeurs, des normes en termes d’esthétique ou de comportement. Et c’est en ça que l’approche de Babel était intéressante : il y avait vraiment une confrontation de cette base scientifique avec la manière dont cette génération se saisissait des différents sujets que l’on souhaitait aborder. »