David Gurlé, vision large

À destin rare, accomplissement hors du commun ? À voir David Gurlé, on pourrait s’en convaincre. Aujourd’hui CEO de la licorne américaine Symphony, plateforme de messagerie financière ultra-sécurisée fondée en 2014 et déjà valorisée à hauteur de plus d’un milliard de dollars, l’ingénieur et entrepreneur français se qualifie volontiers de « citoyen du monde ». Né en Turquie, fils d’un diplomate français et d’une espionne britannique dont il a découvert une large partie des secrets à sa mort, David Gurlé connaît une jeunesse au Moyen-Orient ballottée au gré des postes parentaux, en Syrie ou encore au Liban, alors en pleine guerre civile.

Vidéophone fondateur

« Ces événements m’ont fait grandir plus vite que la moyenne », estime celui qui fréquentait l’école publique, croisait dans la rue des enfants de son âge armés et attrapait, à la même époque, le virus de la communication. « À la fin des années 70, avoir un téléphone était exceptionnel. Quand j’ai utilisé un vidéophone pour la première fois, lors d’une foire itinérante consacrée au Japon, cela m’a fasciné et marqué à jamais », retrace ce père de deux garçons, qui a été fait chevalier de la Légion d’honneur début 2020.

C'est sur la Côte d’Azur, terre de cinéma et d’innovation, qu'il débarque à 14 ans. En 2018, il est resté fidèle à cette région en ouvrant à Sophia Antipolis le centre de recherche et développement de Symphony. La plateforme table aujourd'hui sur le recrutement de 70 ingénieurs dans les mois qui viennent. La start-up qu'il a fondée, et dont il détient 10% des parts, court encore après la profitabilité, mais il considère qu’il fait bon investir en France.

« J’ai vite réalisé que j’étais différent », reprend-il. Son assurance en a froissé certains au gré d’une carrière l’ayant mené en Israël en passant par Londres, Singapour, Hong Kong ou les États-Unis. Diplômé de l’Esigetel, David Gurlé sent très tôt que la bascule du téléphone et de la vidéo sur internet va révolutionner les usages.

Pilote commercial

Une intuition qui guide le parcours de ce pionnier des communications IP. En 1999, il rallie Microsoft et Bill Gates, qui lui accorde rapidement sa « pleine confiance ». Il passe ensuite sept ans chez Reuters puis file chez Skype. Mais fondamentalement, quelque chose ne va pas. « Je suis incapable de travailler pour les idées des autres », réalise après mûre réflexion cet entrepreneur qui assume son rôle central. Résurgence du passé ? Si une myopie ne l’avait pas mis hors-jeu d’entrée, David Gurlé se serait vu pilote de chasse. « J’ai pris, depuis, des leçons de vol à Palo Alto [Californie] et je suis même devenu pilote commercial tout en caressant l’idée de devenir pilote de ligne », précise-t-il. De quoi garder une vision d’ensemble.