La valeur n’attend pas le nombre des années. L’adage pourrait s’appliquer à Burger King et à son agence Buzzman qui, en six ans, se sont construits une réputation de premier plan dans l’industrie publicitaire. En cause : une communication atypique et créative qui accompagne le développement express de l’enseigne de restauration rapide, revenue dans l’Hexagone fin 2012 après une éclipse de 15 ans. Amplifiée par l'accord conclu en 2013 avec le groupe Olivier Bertrand ainsi que le rachat du réseau Quick en 2015, la relance de Burger King sur le sol français vire même au succès commercial. D’un seul restaurant à Marseille-Marignane, l’enseigne franchit le cap de la centaine en 2016 et compte à date environ 380 points de vente. À tel point que la France, avec un volume d’affaires avoisinant le milliard d’euros, fait désormais office de deuxième marché mondial derrière les États-Unis. Et si la crise a mis temporairement un coup d’arrêt à cet appétit dévorant, difficile de ne pas voir également dans cette trajectoire les effets d’une communication qui fait mouche depuis le début.
Des fans aux petits soins
« Buzzman tente systématiquement de faire des choses différentes », confirme Georges Mohammed-Chérif, son fondateur, qui se remémore les débuts d’une collaboration ayant fait florès puisque l’agence gère désormais le budget dans cinq pays (France, Belgique, Luxembourg, Russie et Suisse). « La première campagne, Angry Tweets, est emblématique de la culture de l’audace qui règne chez Burger King. Tout est parti de tweets de fans qui reprochaient à la marque de ne pas s’installer assez vite dans leur région. Plutôt que d’être sur la défensive, le choix a été fait de leur répondre en affichant ces tweets sur les bâches des magasins amenés à ouvrir. On a poussé la logique jusqu’au bout en permettant à une internaute, qui avait promis un menu à ses abonnés si la chaîne s’installait à Lille, de tenir parole en devenant équipière d’un jour », rejoue le publicitaire.
Un premier « coup » à 150 000 retweets qui en appelle rapidement d’autres, jouant souvent la carte de la proximité avec le cœur de cible. À commencer par l’opération Joyeux Noël Sullyvan. « C’était fin 2017 et il régnait une sorte de surenchère et de course aux fans entre les marques. Pour montrer que nos fans avaient un grain en plus et qu’ils comptaient vraiment, nous avons sélectionné le plus actif, qui comptabilisait plusieurs centaines d’interactions avec la marque sur les réseaux sociaux. Le jour de Noël, le magasin de Bordeaux-Mérignac, emballé dans un paquet cadeau géant, a été renommé à son nom avec place de parking réservée, table attitrée et possibilité de manger à volonté pendant un an », retrace-t-il en écho à une opération qui fait elle aussi son effet.
Une rivalité passée à la postérité
Mais évoquer Burger King sans parler de McDonald’s, dont la relation s’apparente à un « Je t’aime, moi non plus », serait injuste. Tout d’abord car la marque s’est construite vis-à-vis de cet acteur dominant, dont les investissements publicitaires ont été plus de quatre fois supérieurs aux siens l’an passé. « Avec un tel concurrent, il est indispensable de faire des choses qui sortent de l’ordinaire. D’où cet état d’esprit constant de challenger », appuie Alexandre Simon, chief marketing officer de Burger King France. Ensuite parce que les clashs et les clins d’œil entre les deux chaînes de fast food ont donné lieu ces dernières années à des échanges passés à la postérité.
« On s’est accordé depuis le début à ne pas attaquer McDo, qui a frappé le premier. Cette attaque était tellement basse qu’il fallait répondre avec panache », estime Georges Mohammed-Chérif en référence à un film de 2016 raillant le maillage territorial de Burger King. La réplique ne se fait pas attendre, sous la forme d’une fin inédite au spot de McDonald’s, durement tourné en dérision. « Faire une campagne disant d’aller chez McDo comme on l’a fait en 2020 est une manière d’enterrer la hache de guerre », tempère le publicitaire, sans renier les piques que se lancent encore à intervalles réguliers les frères ennemis.
Une stratégie plébiscitée
Au-delà de cette rivalité qui fait le bonheur des réseaux sociaux, Alexandre Simon tient surtout à souligner le virage pris ces derniers mois. « Les idées fédératrices et solidaires, sans pour autant être mielleuses, sont celles qui ont le mieux fonctionné », constate-t-il, citant à titre d’exemple Le Burger de la quarantaine, invitant les clients à rester chez eux pour se faire leur propre Whopper maison. Ou encore la dernière initiative de Burger King France, qui a choisi de soutenir ses fournisseurs en achetant 200 tonnes de pommes de terre redistribuées via ses drives. De quoi favoriser la préférence de marque et élargir la base tout en conservant le ton décalé qui caractérise les prises de parole. « La meilleure caution vient de ceux qui n’apprécient pas forcément les fast food mais qui reconnaissent qu’en termes de communication, Burger King, c’est fort », conclut ce dernier.
Dates-clés
Décembre 2012 : retour en France de Burger King
2013 : signature de la master-franchise pour la France entre le groupe Olivier Bertrand et Burger King
2016 : ouverture du 100ème restaurant à Antibes (Alpes-Maritimes)
2016 : Campagne «Préhistoire», première campagne TV de Burger King pour mettre en avant sa force produit numéro 1 : la viande grillée à la flamme.
2017 : ouverture du 200ème restaurant à Fâches-Thumesnil (Nord)
2019 : ouverture du 300ème restaurant à Pessac (Gironde)
2020 : Campagnes «Commandez chez McDo» et «Whopper&Friends». Burger King invite ses fans à soutenir le secteur de la restauration en commandant chez McDonald's et les autres restaurateurs. Dans la foulée, la marque dédie son compte Instagram à la promotion de restaurants indépendants tant que ces derniers ne pourront pas rouvrir