«Le métro c’est Paris !» L’acte publicitaire fondateur de la RATP démarre en 1949, un an après sa création, par cette synecdoque qui ne se démentira pas avec les années. Et un emplacement de choix : un «quatre par trois» sur les quais souterrains. En 1953, la régie autonome des transports parisiens fait appel au dessinateur Siné – bien longtemps avant qu’il ne «sème sa zone» chez Charlie Hebdo, qu’il rejoint en 1981. Pour la RATP, il croque des moments de vie pour démontrer les avantages du métro sur l’auto. «Évitez les embouteillages… en prenant le métro», invite cette affiche d’automobiliste coincé dans une… bouteille. Vous l’avez ? Un effort que la RATP ne relâche pas dans les années 70 avec la politique pompidolienne du «tout-bagnole». Après une décennie passée à mettre en avant le développement et la modernisation de son offre, la RATP veut recruter des clients. C’est le début de la grande collaboration en 1975 avec l'agence Ecom-Univas (Havas). Et cette signature publicitaire largement utilisée dans les campagnes de promotion de la Carte Orange : «Nous simplifions vos déplacements.» Le campagne de réplique aux autres modes de transport se décline aussi avec ces affiches : «Train, métro, bus, car. Voyagez à la carte.» En 1978, la RATP réoriente le tir sur la voiture en se posant en second choix. C’est le concept de «deuxième voiture». «Oubliez de l’entretenir», suggère la régie, avec des affiches présentant un trousseau de clés, chacune marquée des logos du bus, du RER et du métro.
Terrible... Extra...
Ce discours serait terriblement moderne en 2019. «La RATP a été précurseur sur certaines thématiques sociétales comme la décongestion urbaine», note Anaïs Lançon, directrice de la communication et de la marque RATP. En 1980, l’agence colle immédiatement aux codes à venir de la décennie avec une deuxième mouture de la campagne aux couleurs disco : «Terrible… la 2e voiture» et «Extra… la 2e voiture». C’est pourtant une autre campagne qui fera date, en 1982, grâce à la formule choc: «Ticket chic, ticket choc». «Les arguments rationnels (rapidité, économies de carburant…) ne suffisant pas à lever les freins psychologiques à l’utilisation des transports en commun, le concept de deuxième voiture s’enrichit d’un symbole et d’un identifiant de marque fort : le ticket jaune», explique la marque. Le ticket jaune est décliné à toutes les sauces, devenant l’icône branchée des transports en commun parisiens. La période des années 90 marque un retour à un ton plus réaliste, toujours avec Ecom-Univas aux commandes de la com. En 1992 est inaugurée une identité visuelle encore actuelle composée du logo circulaire représentant à la fois un visage de profil et Paris scindée par la Seine, et le vert jade si singulier. En 1992, la pub, cette fois pilotée par Euro RSCG, met un coup bas aux voitures en pointant du doigt la pollution. Une photo du «M» jaune surplombant les escaliers des stations de métro est légendée : «Voilà ce qu’on lui dit nous, à la pollution.» En anglais, on appelle ça le «f-word».
Serge le lapin
La décennie évolue sur un terrain encore plus sérieux, celui des incivilités. Malgré tout, «la RATP réussit à conserver sa tonalité décalée», souligne Anaïs Lançon. Ce que résume cette affiche de 1997 illustrée par quatre cow-boys, signée BDDP Corporate : «Prendre le bus, ce n’est pas le prendre d’assaut.» Quand TBWA reprend le flambeau, en 2000, la RATP garde le cap avec «Les idées circulent, l’indifférence recule». Avec le retour d’Euro RSCG, on resserre les liens jusqu’en 2002 : «Un bout de chemin ensemble.» «La RATP se place comme un partenaire des villes et de la qualité de vie de ses habitants», résume Anaïs Lançon, au point d’en faire sa signature en 2008 : «Aimer la ville.» On se souvient de 2011 à 2015 des affiches surfant sur la graphie des lignes de bus, métro et tram (Publicis). Un fil conducteur repris avec la campagne anti-incivilités utilisant des animaux : «Qui salit un siège à l’aller risque au retour de se tacher.» L'année 2015 marque le retour d’Havas et d’une nouvelle plateforme de marque positionnant la RATP comme «expert global de la ville» avec une signature axée sur le serviciel : «Demandez-nous la ville.» Un positionnement qui sera renforcé en octobre avec une nouvelle plateforme de marque en Île-de-France. Créativement, l’illustration est toujours centrale, au point d’exploiter des emblèmes du métro devenus icônes de la culture pop. Pour ses 70 ans, la régie décline en mugs son Serge le lapin présent sur toutes les portes. Et même un t-shirt, fort chic, orné du logo «Ticket chic, ticket choc».
Ils ont fait la com de la RATP
1953. Siné.
1975. Ecom-Univas.
1995. Euro RSCG.
1997. BDDP.
1999. Euro RSCG.
2000. TBWA.
2004. FCB.
2006. Human to Human.
2008. Euro RSCG C&O.
2011. Publicis.
2015. Havas Paris.
- 1953. Siné
- 1975. Ecom / Univas
- 1995. Euro RSCG
- 1997. BDDP
- 1999. Euro RSCG
- 2000. TBWA
- 2004. FCB
- 2006. Human to Human
- 2008. Euro RSCG C&O
- 2011. Publicis
- 2015. Havas Paris