Les Audi Talents Awards, programme de mécénat culturel du constructeur automobile allemand, ont vu le jour en 2007. Lancés dans l'idée de soutenir la jeune création contemporaine, ils franchissent une nouvelle étape dans leur développement en organisant un festival sur la musique à l'image les 13 et 14 octobre à Paris. «Contrairement aux catégories cinéma, design et art contemporain, adossées chacune à un événement majeur, comme le Festival international du court-métrage de Clermont-Ferrand, les Designer's Days ou la Fiac, nous créons pour la première fois un événement sur mesure pour la catégorie musique à l'image», explique Marc-Andréas Brinkmann, directeur marketing d'Audi France. Trois des plus grands compositeurs de musique de film sont ainsi à l'affiche du festival, à savoir Hans Zimmer (LeRoi lion, Gladiator, Batman, The Dark Knight, etc.), Marco Beltrami (Terminator, Scream, I Robot…) et Ludovic Bource (The Artist, OSS 117…).
Pour Audi, le fait de créer un tel événement couronne cinq années d'une démarche créative qui a permis de faire naître un label dans le milieu artistique. La section musique bénéficie tout particulièrement de cet engouement avec une augmentation des dossiers déposés d'une année sur l'autre (de 190 en 2011 à 300 en 2012). Raison de cet attrait: le fait que le constructeur ait su, au fil des ans, proposer aux jeunes créateurs sélectionnés des débouchés concrets. Ainsi, en musique, le lauréat compose l'identité sonore du constructeur pendant un an. Gagnant de la catégorie court-métrage en 2010, le réalisateur Patrick Jean (cf. Stratégies n°1674) a tourné récemment un film pour Audi en collaboration avec l'agence Fred & Farid, en charge du budget publicitaire. Un fonctionnement vertueux et plutôt bien orchestré qui reste encore rare chez les annonceurs.
Mettre aujourd'hui à l'honneur la musique à l'image est presqu'un retour aux sources pour les Audi Talents Awards puisque c'est justement par le septième art que tout a commencéGrâce à une rencontre entre le réalisateur Luc Besson, fan des voitures Audi, et une envie de la marque de faire son entrée dans le cinéma. Celle-ci se verra ainsi mise à l'image dans des films comme Transporteur 2 (2005) ou Taken (2008). En coulisses, deux hommes œuvrent alors pour que ces rapprochements soient de plus en plus pertinents: Jérôme Lateur, alors producteur exécutif chez Europa Corp, en charge de la division musique, et David Dargaud, directeur communication d'Audi France (parti chez Yves Rocher en juillet dernier). De ces premiers placements de produits va naître petit à petit l'idée que la marque pouvait aller plus loin dans le domaine artistique. «Le succès de ce programme démontre que plus une marque est singulière dans sa démarche, plus elle émerge», estime Jérôme Lateur, à présent producteur pour la société La Petite Reine et cofondateur de l'agence Enzymes (voir encadré).
«Œuvre collective»
Créer un festival de musique de film est de nouveau un pari ambitieux, le septième art français n'étant pas lui-même des plus enclins à célébrer les compositeurs de bande originale. Ainsi, si les Césars récompensent la meilleure musique originale, il n'existe pas de palme pour cette discipline au Festival de Cannes. Récemment, un compositeur français a pourtant été célébré à travers la planète, décrochant même un Oscar à Hollywood. Il s'agit de Ludovic Bource, auteur de la musique de The Artist réalisé par Michel Hazanavicius. Hommage au cinéma muet américain, ce film a redonné une place centrale à la musique. «Lorsque l'image et la musique se répondent autant comme dans The Artist, cela fait reprendre conscience que le cinéma est une œuvre collective», explique Ludovic Bource. Le duo Hazanavicius-Bource a d'ailleurs fait ses premiers pas grâce à la publicité dans les années 1990. Malgré le succès, le compositeur n'oublie pas les frustrations que la musique de film peut générer: «Sachant qu'un film comme The Artist est remonté une vingtaine de fois, si je compose une musique pour une séquence de neuf minutes à l'origine, il se peut très bien que cette scène ne fasse plus que trois minutes dans la version finale. Dès lors, c'est très compliqué de retrouver le même tempo.»
Le compositeur américain Marco Beltrami a déjà une idée précise de ce qu'il dira au public de sa master class qui se déroulera à la Gaîté lyrique, tout comme ses deux homologues invités par Audi: «Beaucoup des jeunes compositeurs expriment leur frustration sur le fait qu'il est difficile de trouver du travail dans la musique de film. Pourtant, je pense qu'il est excitant d'être compositeur de musique de film en ce moment: certaines des musiques les plus novatrices que j'entends sont crées avec un équipement minimum composé d'un micro et d'un ordinateur. La clé est de garder l'esprit de curiosité et d'expérimentation et l'envie de réinventer ce média.»
Dans ce programme élaboré de concert par les agences Enzymes et Double 2, Audi inaugure aussi des formats événementiels originaux pour la musique. «Le lendemain des master class, nous avons imaginé une performance artistique composée de 74 musiciens qui rendront hommage à l'œuvre de Marco Beltrami et Hans Zimmer suivie d'un ciné-concert exclusif de The Artist à L'Olympia», ajoute Thomas Deloubrière, directeur associé de Double 2.
Encadré
Audi fait école
En parallèle de son activité de producteur, Jérôme Lateur a créé l'agence Enzymes début 2011 avec deux experts du digital, Nicolas Vergnaud et Xavier Bretin. Poussé par son expérience avec Audi, la société développe aujourd'hui son savoir-faire pour Skoda, Orange, Canal+, Carrefour, NRJ Mobile ou encore Tag Heuer. Des stratégies qui touchent le placement de produits, les partenariats, mais aussi le marketing relationnel et digital ainsi que la production de contenus exclusifs.«Mon expertise dans la musique et le cinéma nous permet de proposer des contenus réellement intéressants pour les marques. Des réponses qu'elles ne trouvent pas chez les agences de communication traditionnelles», estime Jérôme Lateur.