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Le plan d'austérité gouvernemental a contraint les entreprises taxées à se lancer dans une communication à mi-chemin entre gestion de crise et lobbying. Avec plus ou moins de succès.

Taxes sur les boissons sucrées, mutuelles santé, tabac, alcools forts ou encore hôtels de luxe... Le 24 août 2011, plusieurs secteurs d'activité, soudainement touchés par l'annonce du plan de rigueur gouvernemental, ont été contraints de se lancer dans une intense campagne de communication à mi-chemin entre gestion de crise et lobbying. Relations presse tous azimuts pour contester les mesures, prise de rendez-vous avec les ministères, mobilisation de l'opinion publique pour faire pression sur les politiques, les industriels sont vite passés à l'attaque.

 

Ainsi, la Mutualité française a incité ses adhérents à envoyer une lettre de protestation au président de la République. «Le soir même de l'annonce tout était en place sur Internet», explique Anne Moraud. La directrice de la communication de cette fédération regroupant la quasi-totalité des mutuelles santé françaises s'est même offert une annonce presse signée «l'idée de créer un impôt sur la maladie, c'est une blague ?» (agence June Twenty First). Peine perdue... le 6 septembre, la taxe était adoptée.

 

Du côté des boissons, les discussions sont en cours avec le gouvernement. «L'idée c'est de nous mobiliser en privilégiant le dialogue, en faisant valoir nos arguments», explique Hugues Pietrini. Le président d'Orangina Schweppes France est également président de l'Alliance des Boissons sans alcool, fédération des professionnels des jus de fruits, nectars et boissons rafraîchissantes sans alcool (Unijus et SNBR). Avec l'Association nationale des industries alimentaires (Ania), il est immédiatement monté au créneau pour dénoncer une mesure injuste et sans fondement, présentée comme un plan de lutte contre l'obésité. Sondage à l'appui, signé Harris Interactive, il souligne que 58% des Français désapprouvent la taxe sodas quand 81% d'entre eux ne croient pas à son efficacité. «Il y a clairement une atteinte à la réputation de nos produits, à l'image de nos marques. C'est une agression inacceptable», affirme Hugues Pietrini. Sur le fond, nous voulons bien participer à l'effort national, être solidaire, mais qu'on arrête de parler d'obésité. Les boissons sucrées représentent moins de 3,5% de l'apport calorique quotidien des Français».

 

Une position plus apte à faire bouger les lignes que celle de Coca-Cola. L'entreprise a menacé, le 8 septembre, de geler ses investissements de 17 millions d'euros en France si la taxe soda était maintenue. Manifestement, le roi du marketing est moins agile en lobbying. Son président pour l'Europe, Hubert Patricot, est d'ailleurs revenu sur cette annonce qualifiée «d'erreur de communication». Ne jamais agir à chaud, sous l'effet de l'agacement, préviennent les professionnels. Inutile aussi de braquer ses interlocuteurs. «La protestation doit être portée par les syndicats ou les associations professionnelles. Une entreprise défend un intérêt particulier. Là il s'agit d'intérêt général», commente Cyrille Arcamone, PDG de Fleishman Hillard France.

 

D'autant que l'Alliance des boissons a plusieurs arguments à faire valoir : les efforts entrepris par des industriels responsables signataires d'une charte d'engagement nutritionnel avec le ministère de la Santé en 2008 et qui prévoit, entre autres, de réduire le niveau de sucre de 10 à 12 % à l'horizon 2011. «Orangina Schweppes a d'ores et déjà dépassé ces objectifs avec une réduction de 13%. Nous avons également enlevé les arômes artificiels et les conservateurs de nos produits», précise Hugues Pietrini. Autre argument : le poids économique d'un secteur dynamique et en croissance, fort de 5 000 emplois directs et gros investisseur publicitaire. Mais, manifestement, les actions entreprises n'ont pas suffi à mettre le secteur à l'abri d'une mesure dans l'air du temps qui fait des émules hors de l'Hexagone. La Belgique, le Danemark et la Finlande appliquent déjà un droit d'accise sur le sucré. Les Hongrois ont quant à eux instauré le 1er septembre dernier une taxe sur une série d'aliments contenant trop de sel et de sucre.

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