À quelques jours de la rentrée des classes, d'étonnantes mosaïques de Post-it ornent encore les fenêtres vitrées des quartiers d'affaires franciliens. La marque est-elle à l'origine de ce jeu qui s'est répandu comme une traînée de poudre tout au long de l'été? «Absolument pas. C'est un mouvement spontané que nous avons détecté en juillet via notre système de veille sur le Web», explique Gaël Charlaté, directrice marketing papeterie 3M France. Les médias s'en sont vite emparés. Le Journal du dimanche a tiré le premier fin juillet, suivi du Parisien. «Cela a rapidement fait boule de neige. Nous recevons encore des demandes de journalistes», explique Catherine Hamon, directrice de la communication de 3M.
Tout a commencé à Montreuil dans les locaux d'Ubisoft. Depuis le printemps, les salariés de ce spécialiste des jeux vidéo reproduisent sur leurs fenêtres les aliens de Space Invaders à l'aide de Post-it. L'été venu, sans doute un peu désœuvrés, des employés de BNP Paribas installés dans l'immeuble d'en face décorent à leur tour leurs vitres d'un canon utilisé dans ce jeu pour détruire les aliens. Les infographistes d'Ubisoft ripostent avec de nouvelles mosaïques. La guerre des Post-it est lancée. Elle va gagner La Défense, mais aussi la province jusqu'à la Belgique, la Suède ou les Pays-Bas. Pour preuve, les clichés envoyés au site «Post-it war» relayé par une page Facebook homonyme.
Mis en ligne le 2 août, ce site a été créé par l'agence de communication digitale Gustibus et Coloribus. «Ce phénomène qui prenait de l'ampleur nous a plu. Il mettait de la couleur dans un été pluvieux. Nous avons créé un espace pour regrouper les créations», explique Gérald Seguin, cofondateur de l'agence. Là-encore, la mayonnaise n'a pas tardé à prendre. Aujourd'hui, la page Facebook totalise 22 000 fans. Le site enregistre pour sa part plus de 1 000 contributions pour 120 000 visites.
Une publicité inattendue pour l'agence particulièrement réactive, mais aussi et surtout pour la marque qui a fait l'objet de multiples articles et reportages télé. Mais le mouvement va-t-il survivre à l'été et au passage des laveurs de carreaux? «C'est vrai que cela colle bien avec les valeurs de la marque: la convivialité, la créativité, tout comme d'ailleurs son aspect éphémère. Il serait logique qu'il s'arrête de lui-même», commente Gaël Charlaté, surprise de l'ampleur du phénomène mais non du détournement créatif du produit utilisé, d'ores et déjà, par des artistes sur différents événements parfois soutenus par Post-It.
Elle ne souhaite pas toutefois récupérer ce mouvement spontané dont elle ne mesure pas encore l'impact sur les ventes. «Ce serait mal perçu par nos clients qui sont à 75% des entreprises. Ce jeu mobilise l'énergie et le temps des salariés sur leur lieu de travail. Pour cette raison, nous ne l'aurions jamais lancé», explique Gaël Charlaté.
Post-it communique d'ailleurs peu auprès du grand public, si ce n'est via des opérations d'échantillonnage. Mais la marque se doit de rester vigilante sur l'utilisation de son nom, générique au même titre que Sopalin ou Kleenex. Elle va d'ailleurs rencontrer dans les prochains jours Gustibus et Coloribus qui utilise la marque sans autorisation. L'agence compte arriver avec une proposition pour encadrer le mouvement, voire le reconduire l'été prochain: ce qui n'est pas possible auprès des professionnels, pourrait l'être auprès des particuliers. En tout cas, le phénomène tombe à pic, 3M vient de lancer cette année un nouveau produit: des étiquettes entièrement adhésives et repositionnables. Le nec plus ultra pour bien coller aux vitres...