Avec le lancement de ChatGPT il y a un an, l’IA générative a fait une entrée fracassante en s’ouvrant au grand public. Si cette nouvelle technologie fascine, ses conséquences pour l’environnement posent question.
Si ChatGPT préoccupe différents corps de métiers qui se voient déjà remplacés, les inquiétudes environnementale se font également de plus en plus ressentir. À l’image du deep learning ou du machine learning, les méthodes d’apprentissages de l’IA pour assimiler une immense quantité de données mobilisent de nombreux serveurs et nécessitent une énergie conséquente.
« Cette course aux données est une bêtise car elle produit juste des gros modèles qui demandent beaucoup de temps à être entraînés. C’est notamment une aberration écologique », prévient Luc Julia, cocréateur de Siri, dans une interview pour Stratégies.
« Il y a des raisons de s’inquiéter ! »
Une crainte partagée par Frédéric Bordage du collectif Green IT : « Il y a des raisons de s’inquiéter ! L’entraînement de l’IA, c’est la partie qui coûte le plus cher avec des impacts environnementaux directs parce qu’il faut stocker et analyser de très grandes quantités de données », souligne l’expert du numérique responsable.
Selon l’utilisation de l’intelligence artificielle, l’impact sera différent. Par exemple, une IA qui étudie du texte comme ChatGPT, consomme beaucoup moins qu’une IA qui génère des images. « C’est éminemment plus lourd pour l’entraînement de l’IA et pour la génération de contenus. » Une étude de Hugging Face et de l’université de Carnegie Mellon révèle que la création d’une seule image, par des modèles d’IA générative, équivaut à la consommation énergétique nécessaire pour charger un smartphone.
Des données difficiles à obtenir
Cependant depuis cette récente accélération des IA génératives, il est difficile de mesurer les impacts directs de l’IA sur l’environnement malgré « la simplicité de l’exercice ». « Les moyens d’évaluation des impacts de l’IA reposent sur la même méthodologie actuellement utilisée pour quantifier d’autres données informatiques », explique Frédéric Bordage. La plus grande difficulté reste de se procurer les données.
Considérées comme stratégiques et faisant partie du secret des affaires, personne n’y a accès. « Je ne vois pas Open AI nous donner accès à toutes ses données pour faire son bilan environnemental, cela dévoilerait trop de ses secrets de fabrication. »
Chaque innovation technologique ne nécessite pas de loi spécifique pour la régir. Toutefois, si des dérives semblent déjà inquiéter certains professionnels du secteur, l’encadrement juridique que nécessiterait l’IA semble difficile à mettre en place.
Lise Breteau, avocate spécialisée en technologies et transformation, rapporte que le développement de l’IA implique des porteurs de projets qui vont solliciter de nombreux prestataires dont l’impact de la loi va être limité, que ce soit pour le cloud, la conservation des données, le matériel ou même l’entretien du réseau. « C’est un tout qu’il faudrait pouvoir réguler au global et de manière cohérente pour éviter les dérapages, ce qu’on n’a pas la capacité de faire actuellement. »
Au-delà du bilan carbone du fonctionnement des IA, Frédéric Bordage alerte sur d’autres types de pratiques que ChatGPT pourrait provoquer. « Plus on avance, plus l’IA sera capable de vous convaincre d’acheter plus, assure-t-il. Ses méthodes passeront par un affichage publicitaire ou un ciblage plus précis, fiable et qui s’adaptera davantage à vos goûts et vos envies. »