L'Assemblée nationale a largement approuvé en première lecture le projet de loi de régulation de l'espace numérique (SREN), qui promet de mieux lutter contre le cyberharcèlement ou les arnaques sur le web.

L'Assemblée a largement approuvé mardi 17 octobre en première lecture le projet de loi de régulation de l'espace numérique (SREN), qui promet de mieux lutter contre le cyberharcèlement, les arnaques sur internet ou l'accessibilité des sites pornographiques aux mineurs. Le texte avait suscité de fortes inquiétudes quant à la protection des libertés publiques, du côté du RN, de LFI mais aussi de certains parlementaires de la majorité. Au terme des débats, le gouvernement a reçu le soutien de LR, du PS, de la plupart des élus LIOT, et a bénéficié de l'abstention du RN, d'EELV et du PCF. Le texte a été voté par 360 voix contre 77, essentiellement celles de LFI. Il avait déjà été approuvé à l'unanimité au Sénat le 5 juillet. La commission mixte paritaire (CMP) au cours de laquelle sénateurs et députés tenteront de s'accorder sur une version commune pourrait se tenir en décembre.

« L'essentiel a été préservé pour nous », a salué le député PS Hervé Saulignac, saluant « la volonté de dialogue » du ministre délégué chargé du numérique, Jean-Noël Barrot. Le député RN Aurélien Lopez-Liguori s'est montré plus sévère dans ses explications de vote, estimant que le texte initial était « honteux sur le plan des libertés publiques, honteux sur le plan de la défense de notre souveraineté numérique ». Mais il s'est félicité des « victoires décisives » obtenues par le RN. Seule la France insoumise est restée arrimée à une opposition résolue, estimant par la voix de la députée Ségolène Amiot que le gouvernement installait « les outils pratiques d'un contrôle social de masse ». LFI devrait saisir le Conseil constitutionnel après l'adoption en CMP.

Identité numérique, un sujet électrique

Si l'Assemblée a approuvé l'idée de donner accès à une « identité numérique » à tous les Français qui le souhaitent d'ici à 2027, les internautes ne seront pas obligés d'en être détenteurs pour ouvrir un compte sur les réseaux sociaux, comme souhaitaient notamment l'imposer près de 200 députés de la majorité. Les initiatives du gouvernement sont sous surveillance de la Commission européenne, qui a mis en garde mi-août la France sur la conformité au droit communautaire de deux initiatives législatives récentes, celle concernant les influenceurs et celle visant à instaurer une majorité numérique. Les députés ont aussi écarté une autre mesure, visant à imposer des amendes forfaitaires pour « injures et diffamations publiques racistes » ou « sexistes » dans « l'espace numérique ».

Vers une réglementation du cloud ?

Prenant appui sur les règlements européens sur les services numériques et les marchés numériques (DSA et DMA), le projet de loi SREN a pour « fil rouge » la « protection des citoyens, des enfants et des entreprises », avait expliqué Jean-Noël Barrot en ouvrant les débats. Il donne notamment la possibilité à une autorité administrative de bloquer les sites pornographiques n'empêchant pas les mineurs d'accéder à leur contenu; il donne des devoirs de modération aux grandes plateformes de réseaux, sous peine de sanctions pécuniaires; il crée une « peine de bannissement des réseaux sociaux » pour les cyberharceleurs, y compris pour des « provocations » à commettre certains délits.

Le texte propose aussi de réglementer le cloud pour permettre davantage de concurrence parmi les fournisseurs d'infrastructure et de services informatiques, ou d'encadrer le lancement à titre expérimental de « Jeux à objets numériques monétisables » (Jonum), à la frontière entre jeux vidéo et jeux d'argent. Cette mesure est l'une des plus décriées du texte, que plusieurs députés espèrent voir censurée par le Conseil constitutionnel, pointant une rupture d'égalité avec les casinos en ligne. Autre point sur lesquels des députés souhaitent voir le projet de loi évoluer : celui de la protection des données numériques stratégiques et sensibles. Plusieurs attendent que les sénateurs durcissent le texte dans une mouture plus proche de celle qu'ils avaient eux-mêmes adoptée, lors de la CMP.

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