Alors que plusieurs centaines d’experts mondiaux de l’intelligence artificielle demandent une « pause » dans la recherche autour de l’IA générative, Microsoft a annoncé ses avancées dans la monétisation de ChatGPT au sein de Bing.
Des centaines d’experts mondiaux ont signé le 29 mars, un appel à faire une pause de six mois dans les recherches autour de l’IA générative, afin de laisser le temps aux réglementations de se mettre en place.
Les chercheurs demandent un moratoire jusqu’à la mise en place de systèmes de sécurité, dont de nouvelles autorités réglementaires dédiées, une surveillance des systèmes d’IA, des techniques pour aider à distinguer le réel de l’artificiel. Mais plus important, ils demandent des institutions capables de gérer les « perturbations économiques et politiques dramatiques (en particulier pour la démocratie) que l’IA provoquera ».
La pétition a réuni des personnalités comme Elon Musk, ancien fondateur d’OpenAI, ou l’essayiste Yuval Noah Harari. Personne ne mesure encore vraiment les conséquences exactes des intelligences artificielles génératives et le risque est autant d’en surévaluer le potentiel que d’en sous évaluer les limites.
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Cependant, pour certains, taper sur l’IA relève du coup de com. « Elon Musk a un intérêt tout particulier à décrier l’IA. En effet, le patron de Tesla, après avoir vendu au monde entier pendant des années une voiture autonome de niveau 5, vient d’avouer que tout au plus, elle serait de niveau 4. Une survente et un marketing que tous les spécialistes avaient tout de suite décrié mais que les analystes crédules viennent de découvrir avant de saborder l’action Tesla. Depuis, tout est bon pour dénigrer l’IA », commente Stéphane Roder, le PDG d’AI Builders, spécialisé dans l’intégration des technologies d’IA en entreprise.
Même si c’est fermer les yeux sur les centaines d’autres chercheurs et leurs motivations. Car il reste que les progrès opérés par ChatGPT ou Midjourney 5 posent de nombreuses questions, au regard de la loi, de l’éthique, de la démocratie. « Je ne pense pas que la société est prête à faire face à cette puissance-là, au potentiel de manipulation par exemple des populations qui pourrait mettre en danger les démocraties », commentait Yoshua Bengio, expert canadien de l’IA, signataires de l’appel lors d’une conférence de presse virtuelle à Montréal. L’IA pourrait aussi avoir de nombreuses conséquences sur l’économie. Goldman Sachs estimait jeudi 30 mars dans une étude que près de 300 millions d’emplois étaient menacés à terme par les IA génératives.
Monétiser ChatGPT
En parallèle de ce questionnement, Microsoft a annoncé de nouvelles avancées concernant l’intégration de ChatGPT au sein de son moteur de recherche Bing.
Le géant qui a investi 10 milliards dans sa maison mère, OpenAI, veut rassurer tout le monde, et notamment les éditeurs, qui craignent que les réponses de l’IA ne shuntent l’accès à leur site, tout en piochant dans leurs articles pour les créer. « Premièrement, nous souhaitons générer davantage de trafic vers les éditeurs dans ce nouveau monde de la recherche. C’est un objectif primordial pour nous, et nous mesurons le succès en partie par la quantité de trafic que nous envoyons depuis le nouveau Bing/Edge », indique Yusuf Mehdi, vice-président corporate et directeur marketing grand public de Microsoft dans un billet de blog. « Deuxièmement, nous voulons augmenter les revenus des éditeurs. Nous cherchons à le faire à la fois en générant plus de trafic vers eux grâce à de nouvelles fonctionnalités telles que le chat et les réponses, et en ouvrant également la voie à l’avenir de la publicité sur ces nouveaux supports. Enfin, nous voulons aborder cette question de manière collaborative » ajoute-t-il.
Sourcer les informations
Microsoft a travaillé sur la question du sourçage des réponses de son IA, en indiquant quand elle le peut des liens vers les sites des éditeurs en question. À ce titre, une nouveauté a été implémentée, en survolant un élément de la réponse du chat. « le survol d’un lien d’un éditeur affichera plus de liens de cet éditeur, donnant à l’utilisateur plus de façons de s’engager et de générer plus de trafic vers le site Web de l’éditeur », explique Yusuf Mehdi.
Une autre, davantage publicitaire a été présentée, pour le moment réservée aux partenaires du programme Microsoft Start, qui utilisent les produits publicitaires de Microsoft. Elle consiste à « placer une légende riche du contenu, sous licence Microsoft Start, à côté de la réponse du chat. Cela aide à stimuler l’engagement des utilisateurs avec le contenu sur Microsoft Start où nous partageons les revenus publicitaires avec le partenaire. » Visuellement cela donne ça.
Ainsi, pendant que les chercheurs veulent freiner les envies des entreprises sur la croissance irréfrénée de l’IA, Microsoft avance déjà sur sa monétisation.