Influence marketing

Interdiction de promouvoir la chirurgie esthétique et transparence sur l'usage des filtres font partie des mesures qui figurent dans la proposition de loi transpartisane qui sera examinée à l'Assemblée la semaine prochaine pour mieux réguler le secteur de l'influence marketing.

Interdiction de promouvoir la chirurgie esthétique, transparence sur l'usage des filtres et guide de bonne conduite : une batterie de mesures a été présentée vendredi 24 mars pour encadrer l'activité des influenceurs sur les réseaux sociaux, secouée par de nombreuses polémiques. « Alors qu'il est un formidable vecteur de créativité et de richesse économique, ancré dans le quotidien de millions de nos compatriotes, ce secteur souffre de règles inexistantes ou trop floues », a déclaré le ministre de l'Economie Bruno Le Maire, cité dans un dossier de presse.

Après trois mois de concertation, le gouvernement a annoncé vouloir soumettre les influenceurs « aux mêmes règles » publicitaires que les médias traditionnels et leur donner un statut légal, ainsi qu'à leurs agents. Il souhaite également aller « jusqu'à l'interdiction » de la publicité pour la chirurgie esthétique, renforcer la protection des influenceurs mineurs, et rendre obligatoire d'afficher l'utilisation d'un filtre ou d'une retouche sur les contenus « afin d'éviter des effets psychologiques destructeurs » sur l'audience.

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Cumulant des millions d'abonnés, pour certains devenus des stars, les influenceurs diffusent des contenus sur les réseaux sociaux qui peuvent grandement orienter les modes de consommation de leurs abonnés. Ces derniers mois, la pression est montée en France pour réguler cette activité souvent décriée pour son opacité : partenariats rémunérés non explicites, concurrence déloyale, exil fiscal ou accusations d'arnaques.

Avec l'objectif de mieux encadrer les quelque 150 000 influenceurs que compte le pays, le ministère de l'Economie a lancé depuis décembre des consultations avec le secteur ainsi qu'une concertation en ligne, ouverte aux parties prenantes comme aux simples citoyens. Au total, près de 19 000 personnes ont participé à cette concertation menée du 9 au 31 janvier sur le site make.org, commentant ou réagissant à douze mesures avancées par le ministère.

La plupart de ces mesures feront partie d'une proposition de loi transpartisane déposée par les députés Stéphane Vojetta (apparenté Renaissance) et Arthur Delaporte (PS). Elle sera examinée en séance publique à l'Assemblée nationale à partir de mardi 28 ou mercredi 29 mars, en fonction de l'avancée des débats sur d'autres textes et a de très bonnes chances d'être adoptée.

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En janvier, la répression des fraudes (DGCCRF) a publié une enquête accablante sur les pratiques commerciales du secteur. Parmi plus d'une soixantaine d'agences et influenceurs ciblés depuis 2021, 60% n'ont pas respecté la réglementation sur la publicité et les droits des consommateurs. Au menu, tromperie sur les produits vendus, promotion de paris sportifs risqués, voire d'injections « par des esthéticiens et des non professionnels de santé », selon la DGCCRF.

Un collectif nommé AVI (Aide aux victimes d'influenceurs) avait au même moment annoncé le lancement d'une action en justice par des dizaines de personnes, notamment pour « escroquerie » et « abus de confiance ». Elles estiment avoir été arnaquées en investissant dans des produits financiers vantés par de célèbres influenceurs, dont un couple exilé à Dubaï, Marc et Nadé Blata.

Enfin l'an dernier, un conflit très médiatisé a plongé le secteur dans la tourmente : il oppose le rappeur Booba et Magali Berdah, patronne d'une importante agence d'influenceurs, Shauna Events. Le premier reproche à la seconde de promouvoir des arnaques (marchandise non reçue, produits non conformes...) ; en retour, elle l'accuse de cyberharcèlement. La justice a ouvert deux enquêtes dans cette affaire.

Malgré ces dérives, le marketing d'influence a explosé ces dernières années, représentant en 2021 un marché mondial estimé à quelque 12 milliards d'euros. Les représentants du secteur prônent avant tout l'autorégulation. La toute nouvelle Union des métiers de l'influence et des créateurs de contenus (Umicc), a annoncé en janvier la rédaction d'une « charte des bonnes pratiques ». La « Fédération des influenceurs et des créateurs de contenus » initiée par Magali Berdah, souhaite « accompagner (les influenceurs) dans la maîtrise de la réglementation applicable à leur activité ». Enfin, le Syndicat du Conseil en Relations Publiques, qui représente 55 agences, vient d'annoncer la création d' un « e-label » de « l'influence responsable » certifié par l'Association française de normalisation (Afnor).

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