Une plongée dans les années 90 ravive des souvenirs de moments de pur divertissement comme « La lionne » par Jean-Paul Goude pour Perrier (Ogilvy & Mather), seul Grand Prix film à Cannes pour la France en 1991 et Grand prix des Grands prix Stratégies pour notre numéro 2000 en 2019. Les animaux sauvages ont la cote avec « Le loup » de Chanel N°5, un conte de Noël signé Luc Besson en 1998. Orangina pousse le principe du secouement dans ses retranchements avec le film « Le Flipper » en 1995 (Young & Rubicam, réalisateur Alain Chabat) et Orangina Rouge « Mais pourquoi est-il aussi méchant? » (« Parce que! ») l’année suivante. « La marmotte met le chocolat dans le papier d’alu », réplique d’une publicité Milka de 1999, passe dans le langage courant, de même que « le double effet Kiss Cool », du nom d’un bonbon mentholé. Celui-ci est incarné par un lapin de 1995 à 1998, avant que les créatifs d’Euro RSCG BETC n’inventent les personnages Schmurk et Blemish et leur saga « C’est frais mais c’est pas grave ». En 1999 l’agence crée l’événement avec le ballet aquatique des « Bébés nageurs » pour Evian, qui sera sacrée publicité préférée des Français en 2011, lors des 40 ans de Stratégies. Un vrai phénomène de société, symptomatique d’une vague de régression et de nostalgie liée au passage à l’an 2000.
Pendant ces années, le paysage médiatique change radicalement. En 1993 entre en vigueur la loi Sapin qui assainit les excès de l’achat d’espace, entraînant le développement du conseil média. Nescafé innove en termes de format avec la série sur les divorcés, en plusieurs épisodes de 40 secondes, qui crée le suspense autour d'une possible réconciliation (Publicis Conseil, 1995-1997). En 1999, Enjoy Scher Lafarge crée la saga de l’ours Grumly, des formats courts de 10 secondes au budget réduit qui font le « buzz ». On commence à parler de films viraux, car le numérique se diffuse en France. Le pays connaît le Minitel depuis 1980, mais internet commence à être utilisé en 1994. Les Français découvrent de nouvelles marques : AOL, Lycos, Wanadoo, Club Internet… Celui-ci n’y va pas par quatre chemins en 1998 avec un film montrant des autodafés d’ordinateurs et le message grandiloquent : « Ceux qui ont brûlé les livres voudront peut-être aussi brûler l’internet. Car nous en avons fait l’outil idéal de l’actualité et de la culture » (Publicis Conseil). La même année, l’iMac d’Apple, rond et coloré, déboule sur les bureaux des créatifs, tandis que la Fnac vante les conseils de ses disquaires pas encore supplantés par Shazam et Spotify (Grand prix Stratégies, DDB). « C’est en 1998 que Stratégies crée la newsletter envoyée par email ainsi que le cahier Stratégies Online », rappelle François Kermoal, ancien directeur de la rédaction.
De la lionne de Perrier au lapin Kiss Cool, la décennie est riche en mascottes restées dans les mémoires. C’est aussi l’arrivée d’internet dans les foyers.