Grand Prix Stratégies
Benjamin Marchal, directeur de la création de TBWA Paris, est le président du jury du 42e Grand Prix Stratégies de la Publicité. Il dévoile son programme et sa vision de la publicité aujourd’hui.

Quelles sont vos attentes pour ce cru 2020 du Grand Prix Stratégies de la publicité ?

Benjamin Marchal. Je souhaite que l’on célèbre notre métier, que l’on fête l’acte créatif qu’importe sa forme, tout en prenant un maximum de plaisir… J'attends aussi que nous valorisions notre spécificité culturelle, une prise de risque, un panache à la française. Une façon de sortir de cette forêt amazonienne du contenu. Le rapport qualité/volume de publicité est bien meilleur en France que dans de nombreux pays. Aux États-Unis par exemple ils produisent 90 % de « réclame basique». Il y a de vraies différences culturelles : d’ailleurs, les créatifs français ont plus les mains dans l’acte créatif : certains font de la réalisation, de la photo, du théâtre… Nous avons une approche plus artisanale et c’est tant mieux.



Quelles tendances devraient marquer cette édition ?

Cette année, il va falloir choisir parmi une dizaine de boulots costauds. Il y a du très bon niveau mais pas en très grande quantité. En termes de secteurs, cela fait dix ans qu’il n’y a pas eu un grand spot dans l’automobile. Les prises de risques se raréfient. Le marché le plus porteur en France - « the place to be » pour les créatifs -, c’est la grande distribution… C’était le secteur le moins coté il y a quinze ans.



Quelle est votre vision de la publicité aujourd'hui?

Nous sommes entrés dans une ère paradoxale : la création est revendiquée par tout le monde mais tout nous conduit à en faire moins qu’avant… La télévision classique s’effondre car les spectateurs la consomment autrement, sur des plateformes sans publicité (Netflix, Amazon Prime…). Dans le digital, les adblockers sont omniprésents. Et sur YouTube, ce n’est pas avec 6 secondes de bumper ads que l’on crée de la préférence de marque… Tout cela donne un contexte compliqué, où le seul moyen d’émerger c’est de produire de la qualité car on ne peut plus imposer de la publicité aux gens. Tant mieux tout ceci pousse l’industrie à prendre plus de risques.



Résultat le secteur de la publicité a changé de visage…

Oui le marché est coupé en deux. D’un côté le haut de gamme, avec des agences qui produisent des grands films de marques qui coûtent entre 1 et 2 millions d’euros.

Et un autre groupe d’entreprises focalisées sur la production de flux dans une logique de social media, de precision marketing et de retargeting. Des messages qui s’adaptent à 30 ou 40 cibles différentes. Là, les budgets se situent entre 0 et 300 000 euros. Il n’y a plus d’entre deux avec des spots à 400 000 ou 500 000 euros… A nous de nous adapter.



Quel est le rôle du Grand Prix de la publicité à présent ?

À la fois de préserver notre métier et de le pousser dans ses retranchements. Il faut embrasser la tradition, l'héritage, tout en s’ouvrant à de nouveaux usages, en s’inscrivant dans l’époque. Aujourd’hui toute campagne doit avoir une résonance en dehors du film de 30 secondes, peu importe le format (une photo, un jpeg, un snap...) Et même une résonance au-delà de notre métier : être publicitaire désormais, cela ne peut plus être comme de faire du kung-fu dans une cave, notre métier doit intégrer la culture au sens large. Le Prix Stratégies doit aussi valoriser cela.

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