En quelques mois, quatre disc-jockeys originaires de Nantes sont devenus la coqueluche d'un public français adepte de musique électro. Des créations originales à mille lieues d'un David Guetta, apportant ainsi la preuve que ce genre musical peut créer autre chose que des rythmes assourdissants sous le soleil d'Ibiza.
La différence? Une technique musicale très maîtrisée. Des platines que ces DJ utilisent comme de réels instruments de musique reproduisant ainsi le son d'un violon ou d'une guitare à l'aide de leurs vinyles. «Nous ne nous contentons pas de mixer des morceaux de musique existants ou des vieux disques, nous composons aussi nos titres à quatre platines en interprétant différents instruments»,explique 20Syl, l'un des membres du groupe. Forts d'un style pimenté de hip-hop, de jazz et de blues, les C2C sont, ainsi, en train de se faire une place toute singulière.
Une notoriété d'autant plus inattendue que le groupe n'a encore sorti aucun album à ce jour. En janvier, est simplement lancée Down the road, une minicompilation autoproduite qui caracole très rapidement en tête des ventes françaises sur la plate-forme Itunes d'Apple. Résultat, fin janvier, quand les C2C donnent un premier concert à la Gaîté lyrique à Paris, toutes les maisons de disques hexagonales s'y bousculent. Un phénomène devenu plutôt rare en ces temps de crise pour le marché du disque. Signé au final chez Mercury (Universal), le collectif de DJ peaufine, depuis, leur premier album prévu pour l'automne. Tout en enchaînant déjà des premières dates archi-complètes: le Bataclan, la Cigale et bientôt l'Olympia. Ils font partie des artistes les plus programmés dans les festivals cet été.
Dans le sillon des maisons de disques, ce sont à présent les agences de publicité (et les marques) qui leur font les yeux doux. S'ils ont déjà refusé plusieurs propositions, nul doute que leur première synchronisation publicitaire ne saurait tarder. Côté médias, la musique des C2C a aussi ses adeptes: la chaîne Arte a, ainsi, illustré un spot au cinéma avec leur musique, tout comme Le Petit Journal de Canal+ pour son générique.«Depuis janvier, plusieurs de nos morceaux ont été repris en bande-son pour des sujets télé. Nos rythmiques brutes et découpées fonctionnent en effet très bien avec des mises en images», raconte 20Syl.
Une écriture musicale et visuelle
Mais l'imagerie du groupe ne s'arrête pas à sa seule musique. Sur scène, le spectacle, longtemps mûri, a été conçu comme une pièce de théâtre. A l'exact opposé des sets minimalistes des DJ plus traditionnels. Chacun des quatre podiums alterne lumières, formes géométriques et dessins graphiques tout au long des concerts. Le tout cadencé selon le rythme de la musique. «Avec ce principe, nous voulions rendre lisible pour le public une création musicale qui est très technique à la base», expliquent en cœur les C2C. Une écriture visuelle impulsée en grande partie par 20Syl, graphiste diplômé des Beaux-Arts. Un savoir-faire qui a, notamment en événementiel, toutes les chances de faire mouche.
Si le succès cueille les C2C en 2012, leur histoire est plutôt celle d'une renaissance. Ces DJ trentenaires se sont en effet rencontrés adolescents, à Nantes, entre bornes d'arcades, tremplins de skate et concerts de rap. La musique, ils y viendront petit à petit, ensemble. Le groupe C2C (pour «coups de cross», un élément de la table de mixage) a officiellement vu le jour en 1998. Peu de temps après, ils sont sacrés quatre fois champions du monde de scratch de 2003 à 2006.Une reconnaissance internationaleà laquelle ils donneront un temps d'arrêt en partant dans deux aventures séparées, les groupes Hocus Pocus et Beat Torrent.Premiers lauréats des Audi talents awards en 2007, la notoriété des C2C continue de grandir. Sur Internet, leur vidéo des championnats du monde 2005 engrange 4 millions de vues sur You Tube. Les C2C devaient renaître.
Un buzz grandissant qui a fini par porter chance à ces adeptes des réseaux sociaux. A l'instar de leur génération, le collectif alimente constamment sa page Facebook ou son compte Twitter à destination de leurs fans. Greem, un des C2C, confirme: «Dans notre musique aussi, nous revendiquons notre côté “geek”». Depuis leurs débuts sur les platines, ils gardent d'ailleurs un style «do it yourself», façon Michel Gondry. Bidouiller, bricoler des sons jusqu'à créer quelque chose qui leur ressemblent et dépoussiérer les codes de la musique électro.