Dossier Santé
Johnson & Johnson vient de voir son vaccin autorisé en France. Vaccination, image de marque, relation avec les agences de com… : Valérie Perruchot Garcia, directrice des affaires publiques, de la communication et de la RSE de Janssen France, filiale pharmaceutique du groupe américain, revient sur les grands sujets du moment.

La crise sanitaire a mis un coup de projecteur sur votre secteur. Qu’est-ce que cela a changé pour vous ?

Valérie Perruchot Garcia. Courant février 2020, nous avons mis en place une cellule de crise, avant de passer au télétravail dès le 13 mars. Il est très rare qu’une crise impacte l’ensemble des business en même temps. En parallèle, nos usines ont été maintenues en activité, avec les mesures sanitaires adaptées. Nous avons quatre sites de production-distribution en France, au-delà du siège. Aujourd’hui, cette cellule de crise existe toujours. Nous organisons une réunion tous les vendredis pour décider des priorités de communication.

 

Le 22 février 2021, on apprenait que Sanofi allait produire en partie votre vaccin anti-Covid. Comment se faire entendre face aux autres laboratoires, en avance dans la course ?

Notre parti-pris depuis le début est l’humilité. On se positionne en s’appuyant sur notre expertise scientifique. Notre équipe aux Pays-Bas avait déjà travaillé à un vaccin contre le virus Ebola, avec lequel 200 000 personnes ont été vaccinées. Notre communication autour du vaccin contre le Covid s’est déroulée en trois phases. Nous avons communiqué le 30 mars 2020 pour indiquer que nous nous lancions, puis en septembre autour des études de phase I et II [étapes des essais cliniques, NDLR] pour dire que l’on pouvait s’engager à plus grande échelle, et enfin le 29 janvier 2021 sur la phase III, qui concernait 40 000 personnes. Comme nos collègues des autres laboratoires, nous travaillons à des enjeux de production. Notre dossier pour le candidat vaccin arrive [il a été autorisé le 27 février aux États-Unis, le 11 mars en Europe et le 12 mars en France]. Étant donné l’urgence de la situation, les éléments ont été transmis en continu selon le principe de la « rolling review », visant à permettre aux autorités de se faire une idée en temps réel pour pouvoir rendre un avis rapidement.

 

Est-ce le vaccin qui a constitué votre axe de communication le plus important tout au long de ces derniers mois ?

En entrant dans la crise, nous avons compris que le télétravail et le confinement dureraient un certain temps. Nous avons fabriqué du gel hydroalcoolique sur notre site de Val-de-Reuil (Eure), réalisé des dons en nature aux établissements de santé, fait livrer des savons, des crèmes pour les mains, des iPad. L’argent récupéré de notre budget voyage a été réparti pour des projets reflétant nos quatre piliers RSE : la santé mentale, l’inclusion, le soutien aux populations vulnérables et aux personnes handicapées. Nous avons par exemple donné à la Fondation des Femmes. Nous avons également communiqué sur ces actions sur nos réseaux sociaux afin de susciter la fierté des collaborateurs.

 

Les laboratoires ont une image à la fois positive (ils apportent une solution au Covid) et négative (retards de production…). Comment gère-t-on cela ?

Il y a eu une médiatisation extrême de notre industrie dès les premières annonces autour des vaccins. L’état de grâce n’a pas duré très longtemps avec des doutes sur la production, des suspicions sur la qualité des traitements, touchant l’ensemble des laboratoires. C’est pour cela que nous avons pris le parti d’être discrets. Par ailleurs, nous communiquons uniquement quand les choses sont publiées. Il faut être factuel. On explique que notre vaccin sera à prix coûtant mais on - les médias - ne dit jamais que le laboratoire ne gagnera pas d’argent avec. Il y a souvent des biais, alors que nous pratiquons une très grande transparence sur nos essais cliniques. Nous avons noué, il y a six ou sept ans, un accord avec l’université de Yale, à qui nous confions, depuis, l’ensemble de nos études cliniques. N’importe qui peut les consulter. Mais les trains qui arrivent à l’heure dans la pharma n’intéressent personne.

 

Vous travaillez avec ComCorp sur les relations presse. Collaborez-vous également avec d’autres agences de communication ?

Côté Janssen France, nous venons, fin janvier 2021, d’arrêter notre collaboration avec ComCorp, qui nous accompagnait depuis quatre ans, au profit d’Omnicom. Au bout d’un moment, un certain train-train s’établit dans les relations agences/annonceurs, car l’agence ne se sent plus sous tension et ne va pas là où on l’attend. Nous avons voulu retrouver une énergie. Mais il y a d’abord eu, en octobre-novembre 2020, un appel d’offres pour la communication interne, remporté par Epoka, face à ComCorp et WAT. En parallèle, WAT continue de nous accompagner sur les réseaux sociaux. Ces trois agences, nous les rencontrons chaque mois dans une content room [réunion permettant de balayer les sujets de communication à venir, NDLR]. Cela permet d’avoir les mêmes « briques » pour tout le monde et de gagner du temps pour réagir sur des sujets plus à chaud.

 

Les médecins sont très sollicités depuis un an. Comment avez-vous adapté votre communication à leur égard ? Et vis-à-vis des patients ?

Nous avons stoppé les visites en présentiel étant donné les priorités dans les hôpitaux, sans oublier l’aspect sanitaire pour nos collaborateurs. Nous avons utilisé le premier confinement pour nous réorganiser et rester en lien avec les médecins via des formats digitaux (e-visites, e-formations, e-événements) tout en essayant de comprendre les besoins et préférences de chacun en termes de canal ou d’horaires. Par ailleurs, nous travaillons avec des associations de patients dont nous relayons certaines initiatives de communication.

 

Comment vous projetez-vous dans 2021 ?

Nous aurons une approche prudente. Ce sera l’année du vaccin mais pour des raisons de montée en puissance progressive de la production, nous n’allons pas dans l’immédiat nous remettre à fonctionner comme avant. Le télétravail restera la norme pendant encore quelques mois. A partir du milieu d’année ou de l’automne, nous accélérerons sur les sujets sociétaux, comme la préservation de l’environnement, le rôle des entreprises. La RSE va reprendre pied. La communication aura un rôle à jouer pour accompagner nos collaborateurs dans la compréhension de ces sujets.

Chiffres clés Johnson & Johnson France

3. Nombre de filiales (pharmacie avec Janssen, dispositifs médicaux et santé-beauté grand public). Il n’y a pas d’entité légale J & J en France.

1 200. Nombre de collaborateurs chez Janssen, la filiale la plus importante.

+2 %. Tendance de croissance entre 2019 et 2020 (avec variations selon les filiales).

Quelques marques grand public : Le Petit Marseillais, Neutrogena, Vania, Nett, Listerine, Actifed, Nicorette…

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