Encore une énième tribune traitant du sujet de l’intelligence artificielle et des marques ?
Permettez-nous d'aller au-delà des prédictions anxiogènes annonçant la fin de nos métiers créatifs en opposant l'homme à la machine, et laissant entendre que l'IA est sur le point de nous remplacer.
Loin de nous l’idée d’édulcorer la réalité. Oui, l’IA écrit, code, compose, dessine, apprend plus vite et mieux que nous tous. Et il va falloir s’y faire. Certains, notamment dans notre secteur, non sans cynisme, y voient une opportunité de produire plus, plus vite et à moindres frais.
Pourtant ce qui nous intéresse dans le développement de cette technologie, mais aussi de toutes les avancées technologiques, tient davantage aux opportunités créatives qu’elles ouvrent pour faire vivre d’une façon nouvelle des récits de marque singuliers.
Il nous faut pour cela, envisager l’IA comme une alliée créative en redéfinissant nos rôles.
Nous pouvons utiliser l'IA comme un formidable outil pour révéler de grandes idées de marque.
“AI can do the shit stuff better.” nous disait Nils Leonard de l’agence Uncommon il y a quelques mois. C’est un fait.
Mais les grandes idées, elles, à condition qu’on continue de se creuser la tête pour les trouver, seront toujours impulsées par les créatifs.
Un exemple concret est notre récente campagne Guerlain « Born in 1853. Made for the future », célébrant les 170 ans de la « Bee Bottle » grâce à l'intelligence artificielle.
Peu de maisons peuvent se targuer de posséder un produit assez intemporel pour traverser 170 ans d’histoire. Nous voulions partager ce patrimoine à travers le prisme de la Science-Fiction. Nous avons ainsi représenté le flacon à travers les grands courants picturaux dans un voyage dans le temps épique. Ce dernier nous ramène aux origines en 1853 pour nous projeter dans un futur lointain… dans 170 ans. L’occasion de célébrer le flacon aux abeilles dans des décors surréalistes et inédits.
L’intelligence artificielle a ici été utilisée ici pour raconter de façon inédite l’intemporalité et la modernité d’un flacon qui reste inchangé depuis 170 ans.
Une étude approfondie de l’histoire de l’art et une exploration des archives de La Maison Guerlain nous ont permis d’inscrire le Flacon aux Abeilles dans les moments clés de son histoire. Chacun de ces moments, passé ou futur, a ensuite été synthétisé sous forme de prompt rédigé par nos équipes créatives. Ce travail fastidieux – mais essentiel – démontre une fois de plus l’importance de l’apport humain dans la collaboration avec l’IA.
Nous nous sommes d’ailleurs attachés à établir une ligne de conduite claire vis-à-vis de l’utilisation des outils d’art génératif. Trois règles ont ainsi été établies :
- Chaque image générée résulte d’une collaboration entre la main humaine et l’intelligence artificielle. L’IA n’est jamais seule force de proposition créative.
- La main humaine et l’intelligence artificielle travaillent ensemble à élever le geste artistique vers une excellence créative qu’elles n’auraient pas pu atteindre seules.
- Les imperfections et étrangetés – caractéristiques de l’art génératif – ne doivent pas être effacées. Car elles sont les marques d’une exploration créative inédite.
Face à l’inéluctable utilisation de l’intelligence artificielle dans nos métiers une question se pose alors pour les marques : Doit-elle simplement servir un modèle toujours plus productiviste ou peut-on s’en emparer pour repousser les frontières de notre propre créativité ?
Louis Bonichon, co-fondateur, directeur de création et Guillaume Carrère, associé, directeur du planning stratégique
