Maîtriser son temps. En découvrant la une de L’Express accompagnée d’un post-it orné d’un smiley laissée sur son bureau par les étudiants, Julie Joly sourit. La directrice du Centre de formation des journalistes (CFJ) et de la nouvelle école W est consciente qu’elle ne «s’arrête jamais» et qu’«elle s’implique à fond dans les sujets», malgré une vie de famille remplie avec trois enfants à élever. Passionnée, exigeante et simple. Sans chichis et avec un franc-parler revigorant. «Ce qui m’a poussé à devenir directrice du CFJ et à imaginer l’école W autour des contenus et de la création numérique est simple. Lorsque j’étais rédactrice en chef adjointe à l’Express, je voyais que l’avion allait s’écraser et que personne ne comprenait comment le redresser notamment grâce au digital», confie Julie Joly. Des mots qui disent un état d’esprit dans sa façon d’animer les équipes. Elle cherche toujours des solutions, et fourmille d’idées. Jusqu’à être parfois jusqu’au-boutiste. «Elle est charismatique. Exigeante, elle impose un rythme dense avec plusieurs idées en même temps, mais on a envie de la suivre dans ses projets et de faire un bout de chemin avec elle», détaille Emmanuel Ostian, fil rouge télé des étudiants au CFJ. Il ajoute: «Elle est psychologue et sait magnifier les qualités des gens. En revanche, elle peut être très sévère. Ce qui la mortifie, c’est le manque d’envie et le je-m’en-foutisme.» Elle confirme: «Le cynisme me dégoûte.»
Travailleuse et enthousiaste
Elle s'apprête à faire déménager le CFJ de la rue du Louvre vers le XIIe arrondissement de Paris. En la titillant, un peu, sur l’école W, centrée sur la création de contenus numériques consacrés aussi à la communication, choix qui peut paraître étonnant, émanant d’une école de journaliste, on la découvre tranchante. «Ça démontre à quel point certains n’ont pas compris que la profession de journaliste était en mutation et à quel point, il fallait acquérir de nouveaux savoirs», affirme-t-elle avant de railler les pseudos écoles de journalistes qui pullulent un peu partout. Dans son esprit, W, c’est aussi une façon de casser le moule «Sciences-Po» qui façonne nombre de journalistes. «W ouvre les portes de ce métier à des profils plus variés», et va ainsi fabriquer des journalistes qui ne se considèrent pas comme une élite. Une phrase de Sartre, reproduite sur la Une de Libé le jour de sa mort orne son bureau: «Ma folie m’a protégé de la séduction de l’élite, je ne me suis jamais senti l’heureux propriétaire d’un talent qui m’élevait au-dessus des autres.» Façon de dire que seuls, le travail, l'enthousiasme, la capacité à comprendre l’autre, l’indépendance d’esprit et l’endurance à l’effort sont les qualités nécessaires au journaliste... comme aux collaborateurs de Julie Joly. «Sa qualité principale, en tant que manager, c’est d’être à l’écoute et de savoir changer d’avis. Elle est passionnée mais adogmatique. Après, elle est aussi très ambitieuse et aime vraiment avoir le pouvoir de décider», note un de ces ex-collègues à L’Express. Une pasionaria du digital sans dogmatisme, en somme.
Dates clés
1974 : Naissance
1997 : Année où elle décide de devenir journaliste après sa rencontre avec Erik Izraélévitch.
2000 : Entre à l'Express
2012 : Devient directrice du CFJ
2016 : Lancement de l'école W