Il se souvient de ses années américaines, de cette époque où il «avait Steve Jobs comme boss direct» lorsqu’il travaillait au sein de la société Next, dans la Silicon Valley. «Aux Etats-Unis, les managers sont vus comme des animateurs; en France, ils sont considérés comme ceux qui savent. Mais dans le numérique, cela va trop vite et le champ est trop large pour pouvoir tout savoir. C’est donc important de faire confiance à ses équipes», explique Frédéric Bonnard, qui a rejoint France Médias Monde en avril 2012, comme directeur des nouveaux médias.
Sa mission alors: accroître l’audience de France 24, RFI et Monte Carlo Doualiya (MCD) sur le numérique, innover et développer les ressources propres. Suite à l’arrivée de Marie-Christine Saragosse à la tête de France Médias Monde fin 2012, sa feuille de route s’est recentrée sur l’audience, avec une stratégie d’hyperdistribution. C’est ainsi que dès 2013, France 24 a mis son antenne à disposition sur You Tube. Trois personnes travaillent aujourd’hui à l’animation des cinq chaînes principales du groupe sur la plateforme.
«En tant que média public, nous n’avons pas les mêmes contraintes publicitaires, d’où notre stratégie d’aller sur le plus de canaux de distribution possibles, y compris ceux qui ne sont pas optimisés en termes de revenus, comme You Tube, Facebook, Flipboard… Plutôt que de faire venir à tout prix les internautes sur nos sites et applications, nous voulons aller les chercher là où ils sont», résume le dirigeant de 49 ans qui a sous sa direction une cinquantaine de salariés, en charge de la définition des offres, du développement, du marketing et de la monétisation, l’éditorial étant adossé aux rédactions.
Dissémination du numérique
Ces trois dernières années, France Médias Monde a également multiplié les créations de sites, un pour chacune des langues de France 24, RFI et MCD, ainsi que des verticales thématiques, comme Afrique foot, RFI savoirs ou encore la version française de Mashable fin janvier 2016. En tout, le groupe compte une trentaine de sites, pour un total de 28,1 millions de visites mensuelles (+20% en un an) pour l’ensemble de ses environnements numériques, 34 millions de vidéos vues et sons écoutés par mois, plus de 22 millions de fans Facebook et 10 millions de followers sur Twitter.
Prochaine étape, que l’ensemble du groupe s’approprie pleinement les problématiques numériques. «Le risque à avoir une direction des nouveaux médias est de déresponsabiliser le reste de l’entreprise sur ces sujets. Ce processus de dissémination du numérique s’achèvera avec la disparition de mon poste», prédit le directeur des nouveaux médias, qui prône une responsabilisation totale des salariés.
Frédéric Bonnard «est quelqu’un de toujours positif, ce qui est très entraînant pour les équipes. Mais il a besoin d’être un peu cadré car il rêve d’un monde parfait alors qu’il faut parfois faire avec ce qu’on a en termes de temps et de moyens», se souvient son ancien patron chez Software AG, Philippe Lerer.
Au quotidien, cet amateur de yoga ashtanga préfère arrondir les angles qu’aller au clash. «Je me demande si ça ne peut pas être perçu comme une faiblesse dans le management à la française, qui valorise la grande gueule. Mais le succès ou l’intelligence d’une personne n’autorise pas tous les comportements et s’énerver n’aide jamais à résoudre un problème», estime celui qui a travaillé durant deux ans, sous la direction de Steve Jobs, connu pour son management tyrannique. Les équipes de France Médias Monde l’en remercient...
Son parcours
1966. Naissance à Paris.
1990. Diplômé de Supélec.
1991. Part aux Etats-Unis, où il travaille pour Next, Apple et Netscape.
2001. Revient en Europe et rejoint différentes start-up puis Software AG et Soft At Home.
2012. Devient directeur des nouveaux médias de France Médias Monde.