Les hiérarchies bousculées

Description

Philippe Bouvard etLoft Storysont les vedettes de la cinquième vague du baromètre Ipsos/Stratégies sur l'image des stations de radio. L'aller-retour très médiatisé de l'animateur desGrosses Têtessur l'antenne de RTL et les retombées de l'émission vedette de M6 ont en effet laissé des traces, notamment chez RTL. Et c'est en grande partie Europe1 qui en a profité. Première conséquence, et petit événement de ce baromètre, la station de la rue François1er passe devant RTL en termes de notoriété spontanée, si on ne prend en compte que la première radio citée par les interviewés, c'est-à-dire le «top of mind». Europe1 se retrouve même assez nettement devant sa rivale: 17% contre 14%, soit trois points d'avance. L'an passé, les deux stations étaient quasiment à égalité: 15% pour RTL et 14% pour Europe1. C'est surtout sur les 35ans et plus que la radio du groupe Lagardère fait la différence. Sur cette tranche d'âge, elle enregistre un bond de quatre points par rapport à 2000 et distance RTL de quatre points. Un écart significatif. En revanche, toujours sur le critère de la notoriété spontanée, mais en prenant en compte l'ensemble des réponses, RTL et Europe1 font jeu égal, loin devant les autres stations. Néanmoins, l'essai reste encore à transformer: Europe1 est devenue la radio la plus spontanément citée, mais elle est encore loin d'être la plus attachante pour la plupart des Français. Si ces derniers ne pouvaient recevoir qu'une seule radio, ce serait toujours RTL (12% des interviewés citent cette radio). Sur ce critère, qui ne subit pas de profonds bouleversements depuis l'an passé, Europe1 n'arrive qu'en cinquième position, derrière RTL, France Inter, Nostalgie et les stations régionales commerciales, réunies sous la bannière commerciale du GIE Les Indépendants. La station de la rue François1er à Paris semble encore souffrir de l'absence d'une véritable image, contrairement à RTL. Sur le critère de l'information, dominé toujours par France Info, Europe1 reste même un ton en dessous de RTL. La station du groupe Lagardère ne fait pas la différence dans un domaine où Jérôme Bellay, son directeur général, l'a pourtant engagée depuis quelques années. Europe1 ne parvient pas à profiter de la baisse enregistrée par France Info sur les moins de 35ans, contrairement à RTL et France Inter. Pour sa part, RTL n'est pas au mieux de sa forme sur son critère de référence, le divertissement.«Sans doute s'agit-il là encore des conséquences du remplacement de Philippe Bouvard par Christophe Dechavanne aux manettes desGrosses Têtes», observe Véronique Viviano, directrice du département TV-radio chez Ipsos Médias. Sur cet item, la station de la rue Bayard se place, comme en 2000, en deuxième position derrière Rire&Chansons, radio que 13% des Français préfèrent pour se divertir. Mais elle perd encore du terrain avec quatre points de différence. RTL n'est même plus la seule radio de référence pour le divertissement sur les auditeurs les plus âgés: elle perd quatre points par rapport à 2000 et se retrouve à quasi-égalité avec Nostalgie et Rire&Chansons. RTL maintient tout de même une avance notable sur Europe1 située, sur cet item, un cran en dessous. Quant au critère musical, il est désormais totalement abandonné par Europe1 et RTL. Le classement est logiquement dominé par les stations musicales: NRJ est la référence des moins de 35ans, et Nostalgie celle des plus âgés. La station «adulte» de NRJ Group ressort également comme la championne «toutes catégories» et affiche même une progression de deux points par rapport à 2000.Fun Radio et Skyrock portées parLoft StoryLe second événement de la dernière livraison du baromètre Ipsos/Stratégies sur l'image des stations de radio est la montée en puissance de Fun Radio et Skyrock sur la cible des moins de 35ans. Ces deux stations semblent avoir été portées par l'effet Loft Story, qui jouait à plein pendant la période d'enquête de notre baromètre (lire l'encadré méthodologique). Fun Radio et Skyrock font partie des stations qui ont rapidement choisi de surfer sur le phénomène TV de l'année, mais avec des angles éditoriaux différents. Un choix qui leur a permis de combler en partie leur retard par rapport à NRJ. En notoriété spontanée ou «top of mind», cette dernière, leader en 2000 sur les moins de 35ans, accuse ainsi un recul de trois points et se retrouve à quasi- égalité avec Fun Radio. Derrière ce duo, Skyrock progresse également de trois points. En tenant compte de l'ensemble des réponses en notoriété spontanée, Fun Radio et Skyrock sont aussi en progression. Néanmoins, les deux radios restent distancées par NRJ, tant sur l'ensemble des interviewés que sur les individus de moins de 35ans.«À leur façon, les trois stations sont restées dans leur registre,explique Véronique Viviano.NRJ se comporte comme la référence, Fun Radio attire la tranche la plus jeune et Skyrock est fidèle à son ton polémique.»Les moins de 35ans attachés à trois stationsC'est sur le critère de l'attachement que les changements sont les plus marquants, en particulier sur les auditeurs les plus jeunes. L'an passé, 18% des moins de 35ans avaient désigné NRJ comme étant la station qu'ils garderaient s'ils ne pouvaient en recevoir qu'une. En 2001, ils ne sont plus que 12%, soit six points de moins. Au final, NRJ se retrouve avec un score équivalent à ceux de Skyrock et Fun Radio qui, eux, progressent d'un point. La forteresse NRJ n'est pas pour autant ébranlée. En effet, sur les jeunes, la station reste, on l'a vu, leader sur l'item de la musique, son critère de prédilection, en maintenant son score de l'an passé (20%) et en conservant une confortable avance sur Fun Radio et les stations régionales des Indépendants, qui affichent respectivement 14% et 13%, comme en 2000. En revanche, Skyrock progresse de quatre points en une année. La station rap est également portée par le regain de notoriété de son animateur vedette, Difool, présent à l'antenne matin et soir (voir la cote des animateurs de radio page 58). Sur ce point, Fun Radio doit sans doute également une partie de son succès à l'arrivée d'Arthur, qui fait un tabac chez les moins de 35ans. À l'inverse, NRJ ne bénéficie pas de l'image porteuse de l'un de ses animateurs. Autre surprise de ce baromètre, la baisse observée par France Info sur le critère de l'information. La station du service public perd trois points, au profit de France Inter et RTL. Station leader pour l'information sur les moins de 35ans, elle abandonne encore cinq points sur cette cible par rapport à l'an passé.«Il s'agit peut-être d'un phénomène de lassitude,observe Véronique Viviano.Malgré tout, les résultats de France Info traduisent une réelle expertise de la station sur son domaine auprès de l'ensemble de la population française, et de façon encore plus marquée chez les moins de 35ans.»Nostalgie grimpe, France Bleu prend ses marquesDe son côté, Nostalgie poursuit son ascension. La radio adulte de NRJ Group reste la radio préférée des Français pour écouter de la musique, et gagne deux points sur ce critère par rapport à l'an passé. Nostalgie passe leader sur les plus de 35ans dans le domaine du divertissement. La station, qui rassemble quotidiennement plus de quatre millions d'auditeurs selon l'enquête 75000+ Médiamétrie sur la période janvier-mars 2001, possède encore un grand potentiel de développement.«C'est le phénomène de ces dernières années,estime Max Guazzini, président du directoire de NRJ Group.L'amélioration de notre image suit l'accroissement de l'audience. De plus, Nostalgie est un produit très fort, il apporte beaucoup de chaleur aux auditeurs. C'est une radio très affective.»Pas étonnant donc que, chez les 35ans et plus, Nostalgie gagne quatre points sur le critère de l'attachement. Enfin, la proximité joue toujours un rôle important dans la radio. Les stations locales commerciales réunies au sein du GIE Les Indépendants conservent un degré d'attachement important: 9%. Autrement dit, s'il devait choisir, pratiquement un Français sur dix préférerait écouter sa radio régionale plutôt qu'une radio d'un réseau national. France Bleu, la nouvelle station de Radio France, bénéficie aussi de cet engouement (voir encadré ci-dessus). Pas de doute, les antennes régionales pourraient demain être de redoutables rivales pour les réseaux nationaux.