L’art brut
« À l’origine, c’est un terme inventé par Jean Dubuffet dans les années 50 pour répertorier les œuvres créées par des personnes sans formation artistique particulière. Le fait de s’affranchir d’un style permet de révéler un regard plus personnel et spontané du monde. Prenons les dessins d’enfants, je les trouve fascinants, il s’agit de l’expression la plus pure. La communication passe aussi par le dessin. À la fin de longue réunion, j’aime bien jeter un œil sur le carnet de mes collègues et interpréter leurs gribouillis, ça en dit beaucoup sur eux. D'ailleurs quand j’étais à l’ECV de Nantes, j'ai réalisé un projet pour l’école où je demandais à tous mes amis et famille qu’ils m’envoient leurs gribouillis, dessinés sur n’importe quel support, et avec ça, j’ai pu raconter une histoire. »
Les symboles
« Qu’ils soient primitifs ou contemporains, l’origine de leur conception me fascine. Je me suis particulièrement intéressée aux idéogrammes lors de mon séjour en Chine. La légende voudrait que les idéogrammes, comme on les nomme en Occident, viennent des chasseurs qui marquaient leurs bêtes par un symbole personnel, donc par un caractère-image. En chinois, chaque mot est construit par association d’idées, d’une certaine manière comme un logotype. Dans Fedex, on retrouve à l’intérieur du mot une flèche. Pour Nike, la virgule est la représentation des ailes de la déesse Niké. Le livre d’Adrian Frutiger L’homme et ses signes montre comment on passe d’un langage à un signe puis à une marque. »
Les expressions idiomatiques
« La langue française est très riche, très imagée. La langue anglaise l’est tout autant. Un jour, avant de passer mes examens, ma tante qui vit en Angleterre, me souhaite : “Break a leg !”. J’ai pensé qu’elle m’en voulait. C’est simplement une version augmentée de notre «bonne chance !» qui vient de la période où les artistes de théâtre à succès risquaient de se briser une jambe à force de multiplier les révérences après une représentation. Durant mon enfance, j’ai découvert Tex Avery et son univers complètement délirant. L'épisode qui s’appelle Symphony in Slang a été une révélation. Ce sont 7 minutes d’échange entre les personnages, en expressions. »
L’absurde
« J’adore les BD et les romans graphiques. Enfant, je passais des heures à fouiller la bibliothèque des mes parents. J’y ai fait de nombreuses découvertes comme Le Père de Mafalda mis en image par l’illustrateur argentin Quino [décédé en 2020], qui est l’équivalent loufoque de notre Sempé. Par planche, il met en scène un quotidien absurde et cynique avec un style graphique très sombre, le tout sans mot. Fabcaro est également une référence incontournable, son Zaï zaï zaï zaï ou l’histoire d’un homme recherché par Interpol parce qu’il n’a pas montré sa carte de fidélité en caisse. Des univers sarcastiques qui permettent de prendre de la distance, c'est très salvateur. Surtout en ce moment. »