Succédant à une année 2023 «anxiogène», 2024 a été marquée par deux séquences médiatiques fortes, les Jeux olympiques et les élections législatives, éclipsant, notamment, les sujets environnementaux des unes des médias, selon les données Onclusive.
Un trop-plein de contenus répétitifs et anxiogènes…. Alors qu’une fatigue généralisée face à l’information s’installe en France (pointée par la Fondation Jean-Jaurès, L’ObSoCo et Arte), les Jeux olympiques (JO) de Paris 2024 auront, cet été, joué le rôle de « bulle enchantée » dans le quotidien des Français, partage Sonia Metché, directrice des études d’Onclusive France, à l’origine du baromètre de l’actualité « UBM » (Unité de Bruit Media, un indicateur de pression médiatique). Les JO ont ainsi largement dépassé le cadre des terrains de sport pour s’infiltrer en tête des actualités des journaux – papiers, numériques, audiovisuels. « Les JO ont été à la une de la presse et en ouverture des journaux télévisés et radios durant 41 jours. Il s’agit de la séquence médiatique la plus longue… et la plus positive de l’année », détaille Sonia Metché.
Ainsi, dans le top 10 des sujets les plus médiatisés en 2024, trois sont directement liés à la compétition sportive internationale. La cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, classée en troisième position du baromètre d’Onclusive, a généré 2415 UBM, le 26 juillet 2024. Chaque Français a donc été susceptible d’entendre parler de l’événement plus de 24 fois en 24 heures. Les deux médailles d’or décrochées par le nageur Léon Marchand le 1er août (2374 UBM, soit 23 expositions potentielles) suivent, en 4e position du top. L’accueil de la flamme olympique à Marseille, le 8 mai, se classe numéro 10, avec 1517 UBM (15 expositions potentielles en 24 heures). « C’est beaucoup pour un événement local, partage Sonia Metché, et cela montre la forte d’attente qui existait en amont des festivités des JO. »
Les élections législatives à la Une dans les médias
Quelques semaines avant le coup d'envoi des JO, c'est un coup de théâtre politique qui a fasciné les médias et leurs lecteurs/spectateurs/auditeurs : les législatives, le sujet le plus médiatisé de l'année. « Les législatives sont restées 38 jours à la une des médias, avec des pics extrêmement importants comme le second tour des élections, le 7 juillet, avec 3662 UBM [soit 36 messages par Français] », poursuit la directrice des études d’Onclusive France. La séquence médiatique liée aux législatives a démarré le 10 juin 2024, avec l’annonce de la dissolution de l’Assemblée nationale par Emmanuel Macron (5e du top avec 2248 UBM). « La campagne a été extrêmement puissante. Son bruit média était comparable à la campagne présidentielle de 2022, analyse Sonia Metché, et a même été supérieur aux élections présidentielles de 2017 et 2022 pour les trois premières semaines de la campagne. C’est inédit et lié principalement à la stupéfaction créée par la dissolution. » Les alliances entre partis, la constitution du Nouveau Front Populaire (NFP), le viol d’une enfant à Courbevoie ou encore l’appel au vote « contre les extrêmes » de Kylian Mbappé ont ensuite contribué à nourrir et à feuilletonner le sujet « législatives » pendant plusieurs semaines dans les médias.
Politique, crise agricole…
« L’année 2024 est très différente de l’année 2023 durant laquelle les médias s’étaient mobilisés autour des questions sociales et sociétales, rappelle la directrice des études d’Onclusive France, en particulier la mobilisation contre la réforme des retraites, la guerre en Ukraine et les sujets climatiques. »
En 2024, si l’actualité s’est concentrée autour du sport et de la politique française, plusieurs autres sujets ont fait la une de l’actualité, mais avec moins d’articles ou de reportages médiatisés et sur une moins longue durée. Le débat entre le Premier ministre Gabriel Attal et le candidat du Rassemblement national Jordan Bardella, le 23 mai, est ainsi le deuxième sujet ayant fait le plus de « bruit » cette année : 2554 UBM. L’actualité européenne intéresse (un peu) les citoyens (et les médias)… mais plutôt sous le prisme français. « Nous avons mené une étude avec la Fondation Jean-Jaurès et constaté sur les élections européennes de 2024, un bruit média moins intense que lors du scrutin de 2019. Nous avons ainsi mesuré une baisse de 30 %. La campagne était très centrée sur les figures politiciennes françaises », rappelle Sonia Metché.
Autre actualité forte : les barrages des agriculteurs et les annonces du Premier ministre Gabriel Attal, le 1er février 2024 (1848 UBM). « La crise agricole est le cinquième thème le plus médiatisé en 2024, restée à la Une durant 23 jours en janvier et février 2024. Très visuelles, les contestations ont été particulièrement mises en lumière dans les journaux télévisés », relève Sonia Metché. « C’est le plus haut niveau de médiatisation de l’agriculture à la Une en France depuis 10 ans ».
La surprise du top 2024 ? La forte médiatisation des commémorations du D-Day. « La médiatisation de cet événement a été trois fois plus importante que la moyenne des commémorations ces dernières années », explique Sonia Metché, « et ce, principalement en raison du contexte des élections présidentielles américaines et de la guerre en Ukraine [dont la couverture a baissé de 33 % en 2024] ».
Quid des femmes et de l’environnement ?
Les sujets consacrés à la lutte contre les violences faites aux femmes - premier pilier de la grande cause du premier quinquennat d'Emmanuel Macron - n’atteignent pas le top 10 des sujets les plus médiatisés en 2024, ayant du mal à s’imposer sur une longue séquence. Mais la thématique a couru en « bruit de fond » toute l’année et a été + 32 % plus traitée dans les médias, note Sonia Metché. Le #MeToo cinéma, dont l'actrice Judith Godrèche est devenue l'une des porte-paroles, le procès des viols de Mazan ou, encore, les accusations de violences sexuelles à l'encontre de l'abbé Pierre... ont contribué à nourrir le sujet.
Les sujets liés au climat, à l’environnement et à la transition écologique sont quant à eux en baisse dans les médias en 2024. En cause, un traitement médiatique de « l’écologie » essentiellement lié aux catastrophes naturelles. Les crues dans le Nord, début 2024, et à Valence (Espagne), en octobre 2024, sont ainsi les premiers sujets liés à l’environnement ayant fait le plus de « bruit ». « En 2023, les incendies sur la période estivale avaient tout de même nourri un discours de fond, cela n’a pas été le cas en 2024. Même la COP29 est un échec médiatique avec 179 UBM en 24 heures, c’est 3 fois moins que la COP28 et 10 fois moins que la COP21 à Paris », illustre Sonia Metché.
Top 10 des sujets les plus médiatisés en 2024
1/ Second tour des législatives (7 juillet) : 3662 UBM
2/ Élections européennes : débat entre Gabriel Attal et Jordan Bardella (23 mai) : 2554 UBM
3/ Cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques de Paris 2024 (26 juillet) : 2415 UBM
4/ JO 2024 : Léon Marchand décroche deux médailles d’or (1er août) : 2374 UBM
5/ Emmanuel Macron annonce la dissolution de l’Assemblée nationale (10 juin) : 2248 UBM
6/ Donald Trump élu 47e président des États-Unis (6 novembre) : 2169 UBM
7/ Agriculteurs : barrages et nouvelles annonces de Gabriel Attal (1er février) : 1848 UBM
8 /Décès d’Alain Delon (18 août) : 1571 UBM [En comparaison, le décès de Jacques Chirac en septembre 2019 représentait 4130 UBM, le plus haut niveau mesuré, tandis que le décès de Michel Blanc, le 4 octobre 2024, a été à la une des médias avec 608 UBM sur 24h, essentiellement en TV].
9/ D-Day : une commémoration historique dans un contexte de guerre en Ukraine (6 juin) : 1570 UBM
10/ JO 2024 : Marseille accueille la flamme olympique (8 mai) : 1517 UBM