Dix acteurs audiovisuels dont TF1, France Télévisions et M6 se fédèrent au sein de LaFA, une nouvelle association qui a vocation à porter leur voix auprès des instances de régulation sur les sujets concernant la création et l’exception culturelle française.
« LaFA, ça me fait penser à une famille. On s’aime, on s’adore, il y a des sujets sur lesquels on se querelle mais à la fin on sait ce qui est important… ». Cette belle métaphore familiale, on la doit à Patrick Raude, secrétaire général de la SACD, société des auteurs compositeurs dramatiques. Elle vise à résumer l’esprit de la filière audiovisuelle regroupée sous la marque « LaFA ». Annoncée au Festival de la fiction de La Rochelle en septembre, cette association de lobbying des acteurs de l’audiovisuel français, réunissant les grands diffuseurs hertziens (TF1, France Télévisions, M6), quatre sociétés de gestion de droits (la Sacem, la SACD, l’Adami et la Scam) et trois syndicats de producteurs (AnimFrance, le Spi et l’Uspa) a officiellement vu le jour le 13 novembre, lors d’une présentation chez TF1 réunissant les représentants de ses dix organisations fondatrices.
Parmi ses objectifs affichés, « favoriser le développement des acteurs privés de la TNT en clair en levant les restrictions réglementaires qui les contraignent sur le terrain de la publicité TV dans un contexte d’affaiblissement du marché et de concurrence exacerbée par les acteurs internationaux, afin d’orienter les ressources publicitaires nationales vers les médias nationaux et ainsi de garantir la pérennité de leur soutien indispensable à la création et le pluralisme de l’information », selon un communiqué.
Visée de long terme
« C’est un projet d’union autour du développement, du rayonnement et de la protection de l’exception culturelle de notre pays », explique Rodolphe Belmer, PDG de TF1 et instigateur de LaFA, dont il sera le président pour deux ans. Avec « une visée plutôt de long terme et régulatoire », précise Delphine Ernotte Cunci, PDG de France Télévisions et l’une des trois vice-présidentes de l’association (dont elle est à l’origine du nom).
Bien que l’initiative ne soit pas seulement « défensive », YouTube est clairement en ligne de mire. Cet « éléphant dans la pièce », selon le mot du président d’AnimFrance Samuel Kaminka, bénéficie d'asymétries réglementaires, notamment sur le financement de la création. L’idée est donc de parler d’une même voix pour défendre des intérêts collectifs auprès des instances appropriées : le régulateur, le législateur, le gouvernement, la commission européenne...
Tout en laissant momentanément leurs sujets de désaccord de côté, les différents acteurs de la filière entendent porter « le financement du service public, l’asymétrie concurrentielle avec les Gamma [Google Apple Meta Microsoft Amazon], le financement du CNC, le statut de l’intermittence, et la régulation de l’IA et la juste rémunération des artistes, auteurs et ayant droit », liste Rodolphe Belmer.
Livre blanc
Cette initiative fédérative se traduira en premier lieu par l’élaboration d’un livre blanc, annoncé pour le printemps 2025, sur le poids économique de la filière audiovisuelle et son importance pour l’économie française avec ses 300 000 emplois, « plus que l’automobile ». Un autre combat de longue date pourrait aussi être revigoré par l’ouverture de certains secteurs interdits à la publicité TV. Une façon de ne pas être seulement « défensif ». « On peut réguler mais on peut aussi ouvrir des opportunités », souligne Guillaume Charles, directeur général des programmes du groupe M6, qui verrait dans cette mesure « une démarche positive d’ouverture pour le marché publicitaire ».
Si l’association (loi 1901) compte aujourd’hui dix membres, la structure est prête à s’élargir en intégrant « toutes les bonnes volontés », insiste Rodolphe Belmer, pourvu qu’elles adoptent son « manifeste » et partage cet « état d’esprit » de « consensus ». Arte et le Spect, un syndicat de producteurs, devraient prochainement intégrer la démarche. Canal+ ne s’est pas manifesté ni n’a été invité. « L'appel à nous rejoindre à La Rochelle était public », s'est contenté de préciser le patron de TF1.