Numérique

Aux côtés des chaînes d’information et des médias traditionnels, Le Gorafi, site satirique bien connu, entend bien offrir aux Français sa vision de la campagne présidentielle, sans tomber dans les fake news. Explications avec Sébastien Liébus, son fondateur.

Fin janvier, vous lancerez en association avec l’association Civicpower le jeu Cryptopolitics, que vous présentez comme le « premier métavers des acteurs de la vie politique basé sur un jeu NFT ». De quoi s’agit-il ?

Les NFT sont très à la mode et beaucoup font n’importe quoi avec. On s’est donc dit qu’il n’y avait pas de raison qu’on n’y aille pas. Nous nous sommes associés avec Civicpower [une association qui se donne pour ambition de développer la démocratie numérique et des nouvelles formes de participation citoyenne, ndlr]. Ce qu’on apporte, c’est notre expertise éditoriale, notre cynisme, notre nihilisme. Dans le jeu, il y aura des références à des articles par exemple. Par le passé, on avait déjà lancé une parodie de jeu vidéo [en 2015, le Super Gorafi News Turbo].

Quel rôle voulez-vous jouer dans la couverture de la campagne présidentielle ?

Comme en 2012 et en 2017, nous allons offrir une forme de couverture de la campagne. Même si on est un média satirique, nous avons le même mode de fonctionnement qu’un média traditionnel, avec des conférences de rédaction, au cours desquelles on voit quels sont les sujets dont on parle et sur lesquels nous voulons rebondir. Nous allons aussi avoir une soirée spéciale pour le débat de l’entre-deux tours et une pour chacun des tours de scrutin. En 2017, nous avons rassemblé 1,5 million de visiteurs uniques au soir du second tour avec notre page de live.

Qu’entendez-vous apporter aux Français dans cette offre d’information politique pléthorique ?

Le Gorafi veut surtout leur faire oublier le niveau de la campagne et c’est un pari qui va être compliqué à tenir.

Comment travaillez-vous ?

En amont d’un live par exemple, nous préparons des dizaines de titres d’articles possibles que nous publierons ou non en fonction de ce qui se dit. Pour tous nos contenus, nous travaillons avec des auteurs (avec un noyau dur d’une dizaine de personnes), qui jouent avec les codes des journalistes mais qui sont avant tout des auteurs. Tous nos titres sont pesés, il n’y a pas de place pour l’ambiguïté.

Comment faites-vous pour rester dans la satire sans tomber dans les fake news ?

Cela arrive que nous ne publiions pas un article car la citation sur laquelle il repose est trop réaliste. Nous voulons qu’il n’y ait aucune ambiguïté dans ce qu’on publie. On fait de la satire et la satire est un miroir de la société actuelle, alors que la fake news est là pour manipuler. Nous, nos articles n’ont pas de conséquence. Quand on dit que l’OMS conseille de manger un sandwich sauce samouraï pour vaincre le covid, on ne peut pas nous taxer d’avoir provoqué une crise sanitaire. Ça ne m’intéresse pas de dire que tel vaccin a provoqué X millions de morts ; il n’y a pas de blague là-dedans. Or nos articles doivent être drôles.

En revanche, lors de la campagne présidentielle de 2017, nous avons été victimes de blanchissement de fake news. En 2016, nous avions écrit un article dans lequel on faisait dire à Emmanuel Macron : « quand je sers la main d’un pauvre, je me sens sale ». Pendant la campagne, cet article a été réutilisé à notre insu accompagné d’une vidéo. Et lorsque Macron s’est rendu à l’usine Goodyear d’Amiens, il a été interpellé sur ce sujet. On n’a jamais su qui était derrière ça mais il y avait là la volonté de déstabiliser la campagne.

Vous avez créé un ton qui depuis a inspiré bien d’autres médias. Quel regard portez-vous sur eux ?

Certains médias traditionnels font la course avec nous car ils voient bien qu’on fait de l’audience. Sauf qu’ils sont de vrais médias. Par exemple, quand BFM publie un article avec pour titre La Reine des neiges empêche Fillon de tenir meeting, ou quand 20 Minutes écrit que le préfet de Seine-Maritime affirme, suite à l’incendie de l’usine Lubrizol de Rouen, que le nuage est « toxique mais pas trop », dans les deux cas ils ont dû rétropédaler et réécrire leur titre. Et c’est dramatique que ce soit moi, qui n’ai aucune crédibilité journalistique, qui soit en train de dire que tel ou tel titre doit être construit comme ça, ce n’est pas normal.

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