Vous allez lever 545 millions de dollars en bourse après avoir fusionné avec ION, qui lui-même a levé 259 millions de dollars lors de son introduction en bourse en octobre. À quoi allez-vous utiliser ces fonds ?
Nous croyons que l’internet ouvert mérite un champion du journalisme. Le fait de faire appel au public nous aide à avoir les fonds nécessaires pour mettre le turbo. On veut continuer de nous associer aux éditeurs pour accroître leurs revenus et leur audience de façon organique comme on veut augmenter le reach des annonceurs ainsi que leur ROI.
Comment expliquez-vous l'échec de votre fusion avec Outbrain, en septembre 2020 ?
Chaque partie avait la possibilité de se retirer douze mois après la signature de l’accord. Nous avons décidé que cet accord initial, basé sur la performance relative de deux sociétés, n'avait plus de sens. Nous avons donc fait quelques offres à Outbrain au vu de la nouvelle réalité, mais elles ont été déclinées malheureusement. Nous leur souhaitons le meilleur maintenant que nous nous sommes séparés et, comme on dit, «the show must go on». Cela n'a eu aucune incidence sur notre décision de nous tourner vers la bourse à ce jour.
Comment vous positionnez-vous en France ? Quels sont vos principaux clients ?
Taboola est leader de la recommandation de contenus et de la publicité native en France, et la première plateforme au niveau mondial. Nous avons des annonceurs dans des secteurs comme l'automobile, les voyages, la banque-assurances, le retail et la distribution, la beauté et le bien-être, l'e-commerce, la tech, le divertissement et l'immobilier. Le premier annonceur de France, Lidl, compte parmi nos clients, tout comme Dr Pierre Ricaud, Innogames, GMF, etc. S'agissant des éditeurs, nous sommes fiers de travailler avec Le Figaro, Ouest-France, Le Point et Melty. Notre stratégie est de continuer à innover ! Nous venons de publier de nouvelles fonctionnalités de fidélisation pour les éditeurs. Et nous continuons à investir dans notre plateforme et nos offres (Newsroom, Taboola News).
Taboola est connue pour nous inciter à lire des choses assez bas de gamme du type « comment lutter contre la mauvaise graisse » ou « 11 causes surprenantes du dysfonctionnement du mâle ». Comment garantir la « brand safety » dans ces conditions ?
Nous nous efforçons toujours de fournir de la valeur et je n’ai jamais connu une entreprise de presse qui ne savait pas l’attrait d’un bon titre intelligent. Un titre provocateur assure l’attractivité des journalistes et ce que nous faisons est cohérent avec le journalisme. Mais nous travaillons dur pour créer un espace de confiance dans la marque et nous nous associons à des entreprises comme IAS pour nous assurer que le contenu n'apparaîtra que dans des endroits jugés appropriés par la technologie IAS. Pour notre politique publique, nous avons 50 employés à temps plein qui examinent 100% de nos publicités, aux côtés de l'IA. Je suis très fier de notre équipe de révision, qui examine plus de 500 000 URL chaque semaine, et si nous constatons qu’un client enfreint notre politique, nous le lui faisons savoir et la campagne n’est pas approuvée.
Vous considérez-vous comme un concurrent de Facebook dans la bataille de l’attention, cherchant à inciter à aller le plus possible sur votre plateforme, ou comme un allié des éditeurs cherchant à obtenir la plus grande satisfaction des visiteurs et abonnés sur leurs sites ?
Je pense que nous sommes un bon guichet pour certains des géants de la technologie, mais la façon dont je vois le paysage consiste à penser que Google cherche à être ce que Facebook est aux réseaux sociaux et ce que Taboola est aux éditeurs. Nous avons une bonne plate-forme pour les éditeurs et les annonceurs grâce à notre reach, nos données de lectorat et notre modèle commercial. Nous grandissons lorsque nos partenaires croissent, et nous croyons au gagnant / gagnant. Nous fournissons à nos éditeurs partenaires la pile technologique complète dont ils ont besoin pour se développer (recirculation, éditorial) et générer des revenus publicitaires.
Du fait de la pandémie, vous avez été contraint de rembourser 16 millions de dollars de revenus garantis. Est-ce pour cela que vous voulez passer d’un système de garantie de recettes à un partage de revenus ? On dit que cette annonce, en juillet dernier, a entrainé la perte du contrat de clients majeurs comme News Corp...
J’ai été très ouvert sur ce sujet. Le 15 mars 2020, au début de la pandémie, on a constaté une baisse de 17,5% des taux mondiaux. Plusieurs grandes banques ont modélisé cinq trimestres en dessous de la période d’avant-Covid et une reprise au bout de cinq trimestres. A cause de ces projections, on a demandé à nos éditeurs partenaires s’ils voulaient bien passer d’un système de garantie à un partage de revenus à 100%. Ce changement était temporaire. Alors même que nous découvrions la pandémie, nous ajouterions ces mois perdus pour la garantie à la fin de l’accord. Mais il se trouve que les annonceurs ont rebondi au second semestre, et nous voulons donc rendre le montant total - 16 millions de dollars en garanties de revenus en effet - que nos éditeurs auraient eu au cours de ces quelques mois.