La direction du Parisien a annoncé, le 16 juin, la fin de ses neuf éditions locales au profit d'un cahier unique et d'un développement numérique. Gros plan sur sa nouvelle stratégie éditoriale, qui suit le plan de performance collective du côté de L'Équipe, l'arrêt de l'hebdomadaire Grazia et le changement de ryhme de Point de Vue.
Le Parisien se restructure
La crise du Covid-19 a coûté 20% de son chiffre d'affaires au Parisien selon Sophie Gourmelen, la directrice générale. Elle se greffe à une problématique structurelle. Le quotidien compte 35 000 abonnés numériques contre plus de 300 000 pour Le Monde ou L'Équipe. Le journal lance les grandes manœuvres avec son plan «#LeParisien200000», soit son objectif d'abonnés numériques dans cinq ans. « Ce plan propose une offre éditoriale revisitée dans une économie contrainte et en adaptant nos charges à la baisse des ventes du journal. Car le papier représente 90 % de notre chiffre d'affaires. L'objectif est une reconquête des acheteurs, via la cible des jeunes et des femmes » détaille-t-elle.
«Nous donnerons une plus grande résonance à l'information locale sur le numérique.» Une nouvelle appli sera lancée début juillet avec 40% d'articles premium, comme sur le site. L'abonnement pourrait passer de 8 à 10 euros. Côté print, le cahier régional garde ses 12 pages. Rebaptisé Le Grand Parisien (Île-de-France et Oise), il proposera une Une propre à chaque département. Mais les autres sujets seront thématisés et non localisés avec une double page de «Fait du jour» régionale. Deux cellules, «Police, justice» et «Portraits», seront créées. Trente postes devraient être supprimés mais les départs seront «non contraints» dans «les éditions» sur un effectif global de 435 journalistes. Un accord de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences sera mis en place.
Dans l'édition nationale, la création d'un service «Récits» vise à développer le reportage. Des contributions extérieures seront rassemblées dans la séquence «C'est leur avis». Enfin, cinq verticales digitales sont créées dont «SentinELLE» sur le féminisme, qui sonne comme un mea culpa pour un journal qui a publié une Une 100% masculine sur «Le Monde d'après». Ces changements amèneront une mobilité interne pour une centaine de journalistes.
L'Équipe serre les boulons
Au sein du groupe (L’Équipe, L’Équipe Magazine, la chaîne L’Équipe, L'équipe.fr, Vélo Magazine, France Football, Sport & Style et l’agence de photos Presse Sports), pas de suppression de postes mais un effort conséquent demandé aux salariés via un projet d’«accord de performance collective». Un processus permis par les ordonnances Macron de 2017. Après 16 millions d’euros de déficit en 2020, la perte de 60% de la vente au numéro sur trois mois (liée aussi aux suspensions de parutions) et une chute des recettes publicitaires de 70%, l’actionnaire s’engage à maintenir les effectifs contre une baisse temporaire des salaires de 10% et une suppression de 16 jours de RTT. Un forfait jour de 207 jours par an serait mis en place pour les cadres, l’encadrement de la rédaction et les reporters, contre 190 actuellement. La direction envisage « dès 2 millions d’euros de résultats opérationnels le versement d’une prime d’intéressement et au-delà la mise en place d’un mécanisme correctif pour revenir à la rémunération initiale ». Les négociations sont en cours.
Grazia se digitalise
La crise du Covid-19 a eu raison de l’hebdo féminin, ex-vitrine du groupe Mondadori France. Reworld Media nous confirme cet arrêt, qui donne lieu à un plan de sauvegarde de l’emploi pour les 16 salariés du journal. Six salariés demeurent au digital, qui va se déployer. «Nous recentrons notre marque très CSP+ sur d’autres plateformes plus en adéquation avec ce qu’attendent les femmes. Nous avons besoin de poursuivre notre accélération sur le digital, où nous affichons +170% de visites et des pages vues multipliées par 11 depuis août dernier. Quant aux réseaux sociaux, l’engagement a été multiplié par 2,5 pendant le confinement» souligne Véronique Philipponnat, directrice de la rédaction et de la marque. Cinq podcasts seront lancés cet été, sur l’astro, la méditation ou la mode. Parmi les autres projets : un mook quatre fois par an dès octobre, réalisé par une équipe externe et des live shoppables. La marque veut développer l’événementiel avec un «Grazia power day» sur la confiance en soi, un «Grazia personal shopper» pour conseiller les acheteuses et un événement sur la «reconnexion des urbains avec la nature». «Nous souhaitons développer le label pour nos partenaires-annonceurs avec du merchandising, de l'e-merchandising et du street-marketing» ajoute Elodie Bretaudeau Fonteilles, directrice de la régie.
Point de vue fait le dos rond
Adelaïde de Clermont-Tonnerre se réjouissait de célébrer les 75 ans de Point de Vue. Mais c’était sans compter sur le virus qui a sévi au sein de la rédaction, contrainte à se confiner avant l’heure. «Après avoir été obligés de ne pas paraître pendant une semaine, nous avons opté pour le rythme quinzomadaire durant six semaines, explique la directrice de la rédaction. C’était un crève-cœur et une situation inédite pour nous, si l’on excepte mai 1968. Mais on n’avait plus les moyens financiers de tenir alors que nous sommes, en temps normal, un journal rentable. C’était une mesure de sauvegarde de l’entreprise face à une triple crise : sanitaire, de confinement et de distribution avec le naufrage de Presstalis et la fermeture de points de vente ». Le journal a pu s’appuyer sur la fidélité de son lectorat, qui se rend à 70% dans les kiosques contre 25% qui préfèrent l’abonnement. Le hors-série, l’exclu et la promo liés à l’anniversaire du magazine ont été reportés à la rentrée. Mais l’endettement supplémentaire dû à la crise va impacter ses résultats.