En annonçant le 29 octobre, devant l’Association des journalistes médias, qu’elle souhaitait créer un bureau en Afrique francophone, RT France confirme qu’elle ne s’arrête pas aux frontières de l’Hexagone. À France Médias Monde [FMM], certains y voient même la volonté délibérée du Kremlin de déployer son outil de soft power francophone en Afrique, bassin d’audience clé pour France 24 et RFI. Le bureau est attendu au Maghreb (Algérie, Maroc ou Tunisie) et un « show » sera spécifiquement destiné aux téléspectateurs locaux. Xenia Fedorova, présidente de la chaîne, table pour cela sur une enveloppe en hausse après avoir fait passer son budget de 27 à 30 millions d’euros depuis son lancement fin 2017. De quoi financer, par la même occasion, une équipe de nuit, alors que l’antenne ne prévoit pas de recettes publicitaires.
Différence de traitement
Un an après la naissance des Gilets jaunes, dont la chaîne est devenue l’une des voix, la tournure anti-Macron de RT France est un fait acquis. Il est vrai que le président a été le premier à condamner, en mai 2017 à Versailles, dans Russia Today et Sputnik, des « organes d’influence » qui auraient « produit des contre-vérités » pendant sa campagne, ce que nie RT. Depuis, Benjamin Griveaux, en tant que porte-parole du gouvernement, a parlé d’« organe de propagande », en octobre 2018. Et, surtout, les journalistes de la chaîne n’ont pas été accrédités à l’Élysée comme au Quai d’Orsay ou au G7, cet été, ce qui a suscité une protestation du Syndicat national des journalistes et de FO.
« Le traitement de notre chaîne est différent de celui de toutes les autres chaînes, il y a une discrimination de nos journalistes », a déclaré Xenia Fedorova. Mais la chaîne attend la décision du Conseil d’État, à la fin de l’année, avant de porter plainte. « C’est toujours une option », dit-elle, « si cela ne change pas ». Explication à FMM : « la chaîne attend de savoir si est invalidée ou confirmée sa mise en demeure par le CSA, à la suite de son erreur de traduction sur la Syrie. Si c’est confirmé, France 24 et RFI pourront s’inquiéter pour leur autorisation d’émettre en Russie ». Xenia Fedorova parle de « mesures miroir ». RFI et Deutsche Welle sont déjà qualifiés par elle de « médias d’opposition » en Russie.