Cette PME de 120 personnes spécialisée dans la production de substituts de viande a ouvert sa première usine en France, en Alsace. Dans un monde qui regarde de plus en plus les alternatives à la viande, l'entreprise, qui a levé 100 millions d'euros depuis sa création, voit grand.
Ça ressemble à du poulet, ça a le goût du poulet, mais ça n'est pas du poulet : la start-up française Umiami a inauguré lundi 18 mars à Duppigheim (Bas-Rhin) sa première usine de fabrication de substituts de viande, affichant de grandes ambitions. « Grâce à notre technologie pionnière, nous parvenons à être la première entreprise du monde à reproduire la texture de n'importe quel filet de viande ou de poisson », a assuré le cofondateur et PDG d'Umiami Tristan Maurel.
L'entreprise, créée il y a quatre ans en Ile-de-France, mise sur une technologie développée en interne, baptisée « l'umisation », pour se démarquer des substituts de viande déstructurés, tels les nuggets, steaks hachés ou saucisses. « La texture fibreuse de la viande est très compliquée à reproduire avec des végétaux. La très grande majorité des acteurs utilisent aujourd'hui le procédé de l'extrusion, qui ne permet de faire que des produits hachés », a expliqué à l'AFP Martin Habfast, cofondateur et directeur commercial d'Umiami.
« Nous avons créé un procédé unique qui permet de recréer les fibres longues pour retrouver l'aspect d'un filet et le plaisir qui va avec », a-t-il expliqué. Cette technologie, pour laquelle un brevet est « en cours de dépôt », permet selon l'entreprise de réduire « entre six et dix » le nombre d'ingrédients nécessaires pour créer un substitut végétal au filet de viande. « Ce sont des produits simples à comprendre, il n'y a pas de texturant, pas d'additif controversé et avec d'excellentes valeurs nutritionnelles, 21% de protéines pour 6% de gras, moins d'un gramme de sel pour 100 grammes de produit », complète Martin Habfast.
Ancienne usine Knorr (Unilever)
Entamée à moindre échelle sur le plateau de Saclay, en région parisienne, la production de l'entreprise se concentre pour l'heure sur un monoproduit, le substitut de poulet. Elle prend une autre ampleur avec l'usine de Duppigheim, employant 50 personnes et capable de fournir 7 500 tonnes par an, et jusqu'à 20 000 tonnes dans les années qui viennent si une deuxième et une troisième lignes devaient être installées.
Le rachat de cette usine, ancienne propriété du groupe Unilever, qui y produisait ses soupes Knorr jusqu'en 2021 avant de délocaliser, est vécu comme un soulagement par les élus locaux. « Après cette fermeture brutale, c'est un opportunité extraordinaire pour nous, c'était inespéré de retrouver autant de création d'emplois », s'est réjoui le maire, Julien Haegy, auprès de l'AFP. « C'est une chance pour notre bassin de vie, je ne pouvais pas espérer mieux ». « C'est une renaissance après des moments douloureux », a complété la préfète du Bas-Rhin Josiane Chevalier, qui a salué l'implication de l'Agence de développement d'Alsace (Adira) dans la reconversion de l'usine.
Le produit, commercialisé auprès de distributeurs travaillant pour la restauration et d'industriels fournissant la grande distribution, est déjà présent dans 2 000 points de vente, principalement à l'étranger. « Cela devrait encore pas mal augmenter dans les deux années qui viennent », confie Martin Habfast, mentionnant l'ouverture récente de représentations commerciales aux États-Unis et au Japon.
Une entreprise multi-financée
Pour se développer, l'entreprise, qui compte près de 120 salariés, a réuni 100 millions d'euros (prêts, fonds propres et subventions) depuis sa création, en s'appuyant notamment sur 43 millions d'euros apportés par Bpifrance (10,6 millions de prêts, 11 millions de subventions, et 21,7 millions de fonds propres) et d'autres subventions du Fonds européen de développement régional (Feder) de la région Grand Est.
« Nous investissons quand l'entrepreneur est très bon, que son projet est bien ficelé et qu'il est sur une méga-tendance », en l'occurrence « le développement d'alternatives à la viande », a déclaré Nicolas Dufourcq, directeur général de Bpifrance, à l'AFP. « Umiami coche les trois cases. En plus, elle apporte une innovation ». Si l'entreprise n'est pas encore rentable, « l'objectif à court terme est d'abord de se développer, de grandir », souligne Martin Habfast. Umiami travaille actuellement à l'élaboration de recettes pour des substituts de filets de boeuf et de saumon.