Le groupe Casino prévoit de vendre 313 magasins à ses concurrents Intermarché et Auchan, une opération qui pourrait redessiner en profondeur le paysage de la grande distribution en France.

Le groupe Casino, en grande difficulté financière, prévoit de vendre 313 magasins, soit « la quasi-totalité du périmètre des hyper et supermarchés », à ses concurrents Intermarché et Auchan, une opération redoutée par ses salariés et qui pourrait redessiner en profondeur le paysage de la grande distribution en France. La seule offre confirmée officiellement l'a emporté : comme l'a révélé quelques heures plus tôt le média économique Les Echos, le conseil d'administration de Casino a décidé lundi 18 décembre d'entrer en « négociations exclusives » pour céder « la quasi-totalité » de son parc de magasins de grande taille, soit 313 points de vente, à deux autres acteurs français de la grande distribution, Les Mousquetaires/Intermarché et Auchan.

Respectivement troisième et cinquième acteurs du marché de la distribution alimentaire dominé par E.Leclerc et Carrefour, les deux enseignes avaient indiqué fin novembre vouloir reprendre l'ensemble des points de vente que Casino était prêt à céder. « L'ensemble des salariés des magasins transférés seraient repris » par le groupement des Mousquetaires/Intermarché et Auchan, affirme Casino, qui précise que le projet de cession se ferait « sur la base d'une valeur d'entreprise fixe de 1,35 milliard d'euros (hors immobilier) ». L'accord ne concerne pas les magasins Casino gérés en franchise, qui seront libres de choisir leur partenaire franchiseur, a précisé une source au fait du dossier. Selon Casino, l'opération est « subordonnée » à la restructuration financière en cours de Casino, et « pourrait intervenir avant la fin du premier trimestre 2024 ».

Rapport de force

Le groupe, qui employait encore 200 000 salariés dans le monde, dont 50 000 en France, fin 2022, a signé en juillet un accord prévoyant la restructuration d'une dette insoutenable, avec un changement d'actionnariat à la même échéance. C'est le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky, le Français Marc Ladreit de Lacharrière et le fonds britannique Attestor, qui doivent en prendre les commandes à cette date. Dans l'intervalle, les performances commerciales ne se sont pas améliorées et le groupe encore dirigé pour quelques mois par Jean-Charles Naouri a dû revoir plusieurs fois à la baisse ses ambitions financières, avant de se résoudre à sonder l'intérêt de ses concurrents pour ses points de vente. Malgré les critiques de spécialistes du secteur sur l'état de nombre de ses magasins, ces derniers suscitent des convoitises. En cause : la difficulté de construire de nouveaux supermarchés, l'acquisition de nouveaux points de vente étant alors le principal moyen pour un distributeur de gonfler ses parts de marché, une donnée lui donnant plus de poids dans le rapport de force avec ses fournisseurs agro-industriels.

« En renforçant leurs positions dans le paysage concurrentiel français, Auchan et Les Mousquetaires étendraient leurs pratiques et politiques responsables à davantage d'agriculteurs et de producteurs locaux français, sources supplémentaires de volumes et de justes rémunérations », ont plaidé les deux groupes, qui n'ont pas précisé qui reprendrait quel périmètre. Début décembre, Auchan et Intermarché avaient en outre révélé « discuter les bases d'une alliance de long terme » pour réaliser leurs achats en commun. Intermarché s'était déjà entendu en mai avec Casino pour lui racheter 119 magasins, plus une soixantaine en option. Une soixantaine a changé d'enseigne en octobre, le reste devant suivre dans les trois ans. La cession d'un nouveau périmètre de magasins d'une telle ampleur - un quart de l'ensemble des ventes du groupe en France - fait craindre aux organisations syndicales réunis en intersyndicale (FO, CGT, CFDT, UNSA, CFE-CGC) des conséquences en chaîne au niveau des sièges et de l'appareil logistique du groupe. Des mobilisations ont eu lieu ces derniers jours, notamment à Saint-Etienne, bastion du groupe.

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