«Vert l’infini et au-delà», «Winter is not coming», «Quand c’est fondu, c’est foutu», «Pas de nature, pas de futur»… Voici quelques-uns des slogans qui ont émaillé les dernières marches pour le climat. Une créativité qui n’a d’égale que l’urgence de la situation. Et les entreprises, désormais, ne restent pas à l’écart du mouvement, en particulier lorsqu’elles organisent des événements. À cet égard, leur sensibilité a évolué. «Au-delà des questions de la gestion de l’eau ou de la responsabilité sociale, la demande des entreprises porte aujourd’hui sur le carbone, assure Loïc Morvan, directeur associé chez eko Events, agence de communication spécialisée dans l’organisation d’événements éco-responsables. Le changement climatique est l’enjeu qui a pris le plus d’importance mais tout est lié.»
Les professionnels expriment aussi des préoccupations concrètes. «Les sujets qui ressortent sont les déchets, l’anti-gaspillage – les organisateurs attendent de se reposer sur les lieux pour être conformes de ce côté-là – et la fourniture de services. Les organisateurs aimeraient que les lieux soient conseil», observe Béatrice Eastham, PDG et fondatrice du cabinet de conseil Green Evénements, organisateur du Ouaï, deux journées de l’événement responsable.
Sourcing
Les lieux ont intégré cette nouvelle demande. «Beaucoup ont fait un travail de fond sur la consommation énergétique, les déchets, les prestataires… Ils faisaient ce travail mais sans forcément le traduire en termes de services, raconte la spécialiste. De plus en plus de lieux nous demandent de le faire. C’est un moyen pour eux de rester dans la course.» Désormais, il apparaît plus difficile de séduire une entreprise sans apporter de garantie sur ces sujets. «Si les lieux existants s’adaptent, puisqu’ils ne peuvent pas tout refaire chez eux, les nouveaux intègrent de plus en plus cela dans leur stratégie», abonde Loïc Morvan.
Être un lieu «durable», c’est intégrer plusieurs dimensions. Au-delà de la gestion optimisée de l’eau, des déchets, ou du sourcing des fournisseurs notamment sur la partie restauration, cela peut aussi passer par une scénographie éco-conçue avec des matériaux durables, la mise en place d’une compensation transport équivalente à l’énergie dépensée par les participants pour venir ou encore la réduction des nuisances sonores.
À Paris, «le Huit Valois est l’un des premiers à s’être démarqué et à avoir communiqué sur son engagement éco-responsable», assure Loïc Morvan. L’espace mise notamment sur des parquets en bois de chênes français issus de forêts labellisées ou sur un chauffage et une isolation thermique optimisés. Près d’Angers, l’Abbaye Royale de Fontevraud, dotée d’une offre B to B, a, dans son hôtel, banni les énergies fossiles et transforme ses biodéchets en compost pour son parc. Côté prestataires, des efforts sont également faits. Avec l’agence conseil Ekodev, AGP Système, fournisseur de solutions de logistique événementielle, a par exemple annoncé un calculateur d’empreinte carbone pour estimer celle des prestations liées à l’organisation d’une manifestation. L’idée est de permettre de financer des actions concrètes pour compenser, comme de la reforestation.
Le Vélodrome certifié
Etre un lieu durable, c’est aussi intégrer un volet sociétal, par exemple en se lançant dans une démarche d’insertion par le travail. Au-delà de son engagement écologique, la Cité fertile à Pantin, ouverte en 2018, incube des projets sociaux ou environnementaux, et accompagne le développement des tiers-lieux via un campus dédié. L’Usine (groupe SOS), à la Plaine Saint-Denis, en face du Stade de France, soutient quant à elle des personnes en réinsertion professionnelle.
Pour aller plus loin, certains lieux misent sur la certification, dont la plus connue est le label HQE. «L’avantage de la certification est qu’elle donne des preuves, pas forcément visibles lorsque l'on visite un lieu», avance Béatrice Eastham. «L’Orange Vélodrome à Marseille est le premier stade certifié ISO20121 en France grâce à une demande tripartite et un travail main dans la main entre le gestionnaire, le club résident, l'Olympique de Marseille et la ville», illustre Loïc Morvan.
Reste la question financière. S’il est possible de choisir un lieu éco-responsable sans impact insurmontable sur son budget événementiel, la démarche a un coût. «Les entreprises commencent à changer. Les acheteurs regardaient la dernière ligne de comptes mais ils sont désormais plus attentifs à la notion de coût global», observe Loïc Morvan, non sans ajouter que ceux qui contactent son agence ont déjà une «sensibilité» sur le sujet. «Il est essentiel d’arriver au minimum à iso-budget», lance Béatrice Eastham. Que les entreprises soient prêtes à donner davantage pour sauver la planète, c’est le pari de la plateforme de recherches de lieux Liable Event, qui reverse 5% du montant de l’événement à des associations d’utilité publique. Une initiative qui, entre beaucoup d'autres, traduit le fait que la préoccupation écologique est désormais largement partagée.