À la demande de TikTok, la Cour suprême américaine va examiner début janvier la constitutionnalité d’une loi qui menace d’interdire la très populaire application de vidéos divertissantes. Chronologie de son histoire aux États-Unis.
2016-2018 : la création
2016, le géant chinois du divertissement ByteDance lance Douyin, une plateforme de partage de vidéos créées par les utilisateurs, en Chine. Sa popularité incite le groupe à créer une version pour le public étranger, baptisée TikTok.
2017 : L’année suivante, ByteDance acquiert Musical.ly pour 1 milliard de dollars, et, en 2018, fusionne cette application de « lipsyncing » (synchronisation des mouvements des lèvres sur la musique) avec TikTok.
Le réseau social croît rapidement grâce à ses courtes vidéos divertissantes publiées par les utilisateurs et les créateurs de contenus, de la danse à la cuisine, en passant par la comédie, les animaux et les défis.
2020 : le boom de la pandémie de Covid-19
Déjà très populaire - et déjà dans le collimateur de certaines autorités - TikTok devient incontournable pendant la crise sanitaire qui conduit à de nombreux confinements en 2020. Son algorithme de recommandation, très puissant, encourage les fans à enchaîner les clips, comme un paquet de bonbons. Le service conquiert ainsi un public plus large, bien au-delà des adolescents. Il devient l’une des applications les plus téléchargées au monde. Google et Facebook lancent respectivement les YouTube Shorts et les Reels, qui imitent le format de TikTok. Mais ses liens avec la Chine lui donnent une dimension politique. En juillet 2020, l’Inde bannit TikTok en réponse à des tensions avec son voisin.
Eté 2020 : « Sécurité nationale »
En août 2020, Donald Trump signe deux décrets exécutifs visant à interdire TikTok aux États-Unis à moins que ByteDance ne vende la précieuse plateforme. Il l’accuse, sans preuves, de siphonner les données des utilisateurs américains au profit du gouvernement chinois, suivant la loi qui oblige les entreprises du pays à accéder à ses requêtes. La décision du président américain intervient sur fond de tensions diplomatiques et commerciales entre Washington et Pékin. En difficulté dans les sondages, le républicain fait notamment campagne sur un message anti-Chine, multipliant les références au « virus chinois ». Entre les recours en justice et l’élection de Joe Biden en novembre, les décrets ne prennent pas effet.
2021-2023 : Tensions politiques
En septembre 2021, TikTok annonce avoir 1 milliard d’utilisateurs mensuels dans le monde. Mais les inquiétudes au sujet de la plateforme grandissent aussi au sujet des risques d’addiction, de propagande ou d’espionnage.
En 2022, BuzzFeed rapporte que des employés de ByteDance, basés en Chine, ont accédé à des informations non publiques d’utilisateurs de TikTok. L’entreprise indique que les données de ses utilisateurs américains sont désormais hébergées uniquement aux États-Unis, sur des serveurs gérés par l’entreprise américaine Oracle. Cela ne rassure pas Washington. Le Pentagone avait déjà interdit l’application sur tous les smartphones des militaires, et de nombreuses agences et organisations, de la Maison Blanche aux universités, lui emboîtent le pas.
En mars 2023, le patron singapourien de TikTok, Shou Zi Chew, fait face aux élus du Congrès pendant une audition de 6 heures.
2024 : TikTok sur la sellette aux États-Unis
En avril 2024, malgré la forte mobilisation de TikTok et de nombreux créateurs, Joe Biden signe une loi qui oblige ByteDance à vendre le réseau social d’ici le 19 janvier 2025, sous peine d’interdiction. La loi venait d’être adoptée au Congrès à une large majorité, rassemblant des élus démocrates comme républicains. Washington compte ainsi prévenir les risques d’espionnage et de manipulation par Pékin des utilisateurs de TikTok, qui en revendique 170 millions aux États-Unis.
La plateforme assure depuis des années n’avoir jamais transmis des informations au gouvernement chinois. Elle porte plainte contre le gouvernement, accusant la loi d’enfreindre le droit à la liberté d’expression. L’affaire est montée jusqu’à la Cour suprême, qui a accepté mardi d’examiner la constitutionnalité du texte. Elle n’a pas suspendu l’entrée en vigueur de la loi, mais a fixé les débats au 10 janvier.
Le sort de TikTok est désormais entre ses mains, et celles de Donald Trump, qui sera à nouveau président à partir du 20 janvier. Il a largement changé d’avis depuis 2020, déclarant récemment avoir un « faible » pour la plateforme où il a fait campagne cette année pour conquérir les jeunes électeurs.