« Soyons fous. Admettons, malgré la dynamique actuelle, qu’il existe un futur à notre système de consommation avant de fantasmer un quelconque futur pour les publicitaires. Dans ces conditions, le publicitaire de demain sera forcément informatif. Renvoyé à son étymologie, il serait “celui qui rend public” les informations et les innovations sans façonner un nouveau besoin derrière une désirabilité illusoire. À la clé, une information claire sur la composition, la fabrication et la destination d’un produit, mais aussi sur le savoir-faire, les engagements et les actions durables d’une marque, ce ‘‘brand purpose’’ au cœur des débats. Autrement dit, un retour à l’information transparente et authentique. Le publicitaire de demain sera aussi industriel. Renvoyé à son entrepreneuriat, il s’impliquerait dès la conception et le développement des produits et des offres. Un discours honnête et transparent requiert des produits honnêtes et transparents de même qu’une entreprise respectueuse des consommateurs, de ses équipes, de la nature. Hélas, le ‘‘goodvertising’’ ambiant, outre son inefficacité, risque de provoquer le cynisme des consommateurs. Il faut donc un retour à la qualité et la pertinence du produit. Le publicitaire de demain sera ainsi éminemment responsable. Renvoyé à sa conscience, il ne nierait plus l’immense responsabilité que lui concède le pouvoir d’influence de la pub. Un pouvoir de diffusion de messages et de contenus sur l’intégralité des habillages médiatiques, urbains, artistiques, culturels et sociaux à travers le monde. Un pouvoir qu’intellectuels, ONG, politiques et journalistes ne possèderont plus que dans une moindre mesure. Un pouvoir dont il userait pour éduquer et élever le débat autour de valeurs humanistes plutôt que de s’abaisser à la démagogie des recettes qui marchent et des slogans itératifs. En d’autres termes, un retour à la déontologie de celui qui peut influencer. Le publicitaire de demain sera également écologiste. Renvoyé à son expertise, il sortirait du brouhaha assourdissant des trois milliards d’images partagées quotidiennement sur tous les réseaux d’un monde de plus en plus saturé. Car de la surproduction industrielle naît la surproduction publicitaire. Comme l’industrie, la publicité aura un rôle fondamental à jouer dans la transition écologique et sociétale. Produire moins, mieux, bien. Le publicitaire de demain sera enfin créateur de culture. Renvoyé à sa créativité, il s’impliquerait dans le développement culturel de ses communautés sans tenter de leur imposer des “cases” et un abécédaire abscons. Il s’investirait dans la curation de contenus et de talents plutôt que de sponsoriser les mêmes influenceurs que tous s’arrachent à des prix défiant la raison pour un impact aujourd’hui largement controversé. Acteur médiatique, industriel et culturel engagé, le publicitaire de demain sera responsable et écologiste ou ne sera pas. »