Ce n’est plus un signal faible, la société est belle et bien dans une phase de transition.
Mise au défi par les crises écologiques, climatiques, sanitaires et sociales ainsi que par le besoin croissant de plus de représentations, de diversité et d’inclusion, la société connait des bouleversements qui chambouleront à jamais nos manières de vivre.
Dans ce nouveau paysage où chacun tente de trouver sa place, les entreprises et les marques connaissent les mêmes remises en question. Elles bouleversent leurs modèles, tentent de s’adapter, changent de cap, et commencent à prendre conscience du rôle majeur qu’elles peuvent et doivent jouer dans la transition qui s’opère aujourd’hui.
La RSE et le corporate, autrefois décorrélés de l’action grand public des marques, deviennent désormais centrales. Via l’émergence de ces nouvelles organisations et modèles, l’entreprise et la marque ne peuvent plus être dissociées, elles sont liées à un destin et une vision commune.
Dans cette nouvelle histoire qui s’écrit page après page, la communication, elle aussi, mute et se transforme pour accompagner et épouser les transitions que les marques sont en train de réaliser.
Entre risque de washing et ère du tout purpose, quelles sont les bonnes pratiques pour permettre aux marques de s’engager avec authenticité et impact ?
1. SI LA COMMUNICATION EST LE PREMIER LEVIER DE VOTRE ENGAGEMENT, ARRETEZ TOUT.
C’est la première règle.
Si vous vous servez de votre engagement uniquement pour faire briller votre dernier temps fort de communication, gare au risque de déconnexion entre ce que vous dites d’une part, et ce que vous faites réellement de l’autre. Nombreuses sont les marques à s’être pris les pieds dans le tapis en tombant dans l’écueil du washing, et ça ne pardonne pas.
Évitez donc de changer votre photo de profil pour la journée du 8 Mars, si aucune action sur la question n’est entreprise en interne.
Lorsque cela arrive, c’est la double peine : pour les marques et pour l’industrie de la communication.
Alan Jope, CEO d’Unilever s’était exprimé sur le Woke Washing pendant les Cannes Lions : « les marques qui mènent des campagnes ciblées, mais ne prennent pas de mesures concrètes menacent d’infecter l’industrie de la publicité. Le woke washing menace de détruire davantage la confiance dans notre industrie, alors qu’elle est déjà en pénurie. »
Il y a deux points importants à retenir.
- L’engagement n’a de sens en communication que s’il est soutenu et légitimé par une action durable et authentique.
- La communication ne doit pas devenir un engagement en soi, mais doit servir à l’amplifier.
Beaucoup de marques ont du mal à comprendre que le rôle d’amplification est bien différent de celui de l’exagération publicitaire qui pendant longtemps prédominait.
En 2022, adidas décidait de s’engager pour les femmes, la diversité et l’inclusion dans le sport.
Au-delà du message porté par la publicité au global et les innovations produits, adidas a concrétisé son engagement dans une activation locale. La marque s’est mise en action, en imaginant adidas Sisters. Pendant 5 semaines, dans Paris, et le Grand Paris, nous avons donné vie à un festival itinérant sous le signe de l’inclusion et de la sororité en réinventant certaines pratiques sportives ; un festival festif avec des concerts, talks, rencontres engagées avec des collectifs, associations, sportives professionnelles, amatrices…
L’action n’a besoin de rien d’autre que de concrétisation et d’incarnation.
2. LIER SON ENGAGEMENT AUX VALEURS DE SON ENTREPRISE, LE B.a-Ba.
Et si on parlait du buzz word du marketing moderne ? Le « purpose » ; ce mot magique induit par la volonté des consommateurs à consommer des marques engagées est partout. Attention toutefois, si le « purpose » n’est utilisé qu’à des fins communicationnelles ou est totalement déconnecté de votre histoire et vos valeurs de marques, alors, c’est terminé avant même d’avoir commencé.
Personne n’attend d’une marque de petit pois ou de café qu’elle change le monde.
Ça parait logique… Mais, c’est important de le rappeler.
Katrina Encanto, directrice de création monde chez MullenLowe à Londres nous explique « il est également important que les marques ne laissent pas leur raison d'être dériver du rôle qu'elles jouent dans la vie des gens. Cela devient assez délicat lorsque vous n'êtes pas fidèle à qui vous êtes en tant que marque. »
Le projet REAVERSE de Guerlain, par exemple, qui a pour but de ré-ensauvager un territoire, et préserver la biodiversité n’est pas sorti de nulle part. Il s’appuyait dès le début sur un engagement profond de la marque. Depuis plus de 15 ans, Guerlain s’engage pour la protection des abeilles et de la biodiversité. Un engagement en phase avec sa marque : cela fait écho d’abord au symbole iconique de la maison, l’abeille mais également à sa volonté de transmettre un héritage plus positif aux générations futures.
La réponse se trouve dans la sincérité et la pérennité de votre démarche.
C’est la clé, l’engagement que vous souhaitez porter doit forcément résonner avec les valeurs et l’histoire de votre marque.
3. ASSUMER LA RESPONSABILITÉ DE LA COMMUNICATION DANS LA DÉFINITION DES IMAGINAIRES.
Comme tous les acteurs médiatiques dans notre société, la communication a une part de responsabilité dans la création de stéréotypes et de clichés.
C’est un fait, lorsqu’un consommateur est confronté à un message publicitaire, il est directement confronté à des images que la communication a créées pour lui, et qui nourrissent son imaginaire.
Certaines marques en prennent conscience et tentent de bousculer les conventions avec brio.
C’est par exemple le cas de la marque Bodyform, qui a permis de questionner la représentation des règles dans la publicité.
Depuis plus de 60 ans, jamais le sang des menstruations n’avait été montré, accentuant les tabous qui entourent le sujet. Il a fallu attendre jusqu’en 2017 pour qu’une marque décide (enfin) qu’il était temps de représenter la véritable couleur du sang dans une publicité pour des protections hygiéniques.
On pouvait lire dans tous les médias « c’est une révolution ».
Oui, c’est une révolution. Mais pourquoi avons-nous dû attendre 2017 pour percevoir la couleur du sang sur des publicités pour des protections hygiéniques ?
Il n’est pas ici question de remettre en cause la prise de position plus que nécessaire et positive de Bodyform, mais de se questionner sur la responsabilité de la communication de ne pas représenter les choses comme elles sont.
4. SE REMETTRE EN QUESTION COÛTE QUE COÛTE. LA PROGRESSION PLUS QUE LA PERFECTION.
Certaines marques sont montrées du doigt ou qualifiées d’opportunistes lorsqu’elles décident de prendre position de manière quelque peu artificielle : earth day, journée internationale contre le racisme, journée de la femme…
L’engagement n’est pas un temps fort, si vous décidez de vous engager, faites-le 365 jours par an.
Gare à l’opportunisme donc et surtout à l’appropriation. Il y a deux choses à retenir pour être certain de ne pas tomber dans ces travers.
- Il est toujours préférable de donner la parole plutôt que vouloir à tout prix la prendre.
Dans un premier temps, mettez la lumière sur celles et ceux qui au quotidien font bouger les choses, et voyez de quelles manières vous pouvez les soutenir concrètement.
Et souvenez-vous toujours qu’une marque a tenté de s’approprier le mouvement Black Lives Matter pour vendre une canette de soda… A ne surtout jamais reproduire chez soi !
- Ne pas avoir peur de reconnaître ses erreurs.
La société que nous connaissons aujourd’hui n’a rien à voir avec la société dans laquelle nos parents ou grands-parents ont vécu. Alors si les choses bougent dans notre société, il est normal que les marques se mettent en mouvement également.
Par exemple, le repositionnement de la marque Gilette « We Believe : the best men can be » a généré de nombreuses critiques, pourtant, ce virage à 360° montre à quel point la marque a su évoluer tout comme notre société.
D’accord, pendant près de 40 ans, Gilette a mis en avant des hommes et leurs masculinités viriles, véhiculant des stéréotypes de genres. C’est vrai aussi que leur changement de cap s’est produit au moment de l’émergence du mouvement #MeToo.
Certains n’ont retenu que leur opportunisme mais on peut également saluer cette évolution nécessaire. La marque a eu le courage de se remettre en question et a fait face à son passé.
L’histoire du changement de notre iconique Barbie montre aussi à quel point certaines marques ont compris qu’elles avaient la nécessité de changer, quitte à totalement rebâtir leur offre produit.
En voulant que Barbie soit une représentation plurielle de la société, la marque Mattel ne s’est pas uniquement attaquée au marketing, elle a redéfini les contours de son produit de A à Z.
Juliana Chugg, Chief Brand Officer de Mattel, à l’époque, a mis des mots simples mais si justes sur les changements opérés sur sa marque Barbie : « Nous sommes en plein voyage, c’est un progrès, pas la perfection. »
Il n’est jamais trop tard pour en prendre conscience et agir en conséquence.
Passer à l’acte, décider de changer, c’est aussi prouver que l’on a envie d’opérer des changements.
Il n’existe pas encore que de recettes magiques, ni de guide parfait pour bien engager sa marque. Toutefois, retenez ces quelques principes :
- Choisir la communication comme premier levier pour engager sa marque, c’est perdre le combat sans être entré sur le ring.
- La communication des marques comme tout acteur médiatique est centrale dans la création des imaginaires des consommateurs, prenez-en conscience.
- S’engager dans une cause en accord avec les valeurs de sa marque, ça peut paraitre évident mais c’est un premier pas vers la réussite.
- Progression > perfection.
Et dernière chose, personne ne pourra jamais vous reprocher d’avoir essayé.En revanche, on pourra vous reprocher de ne rien avoir fait.
Alors mettez votre marque en mouvement, c’est comme ça qu’on fera bouger les choses.