La filière a été une des premières à prendre des engagements sur l’éco-responsabilité mais son modèle économique a un coût social et environnemental élevé. Comment rendre l’éphémère plus durable ?
Le 24 juin dernier, un gros raté est venu rappeler la tension sur le marché de l’événementiel : l’annulation du concert gratuit de la chanteuse Louane à Antony, faute de personnel pour monter la scène livrée en retard. Délais raccourcis, prestataires en reconversion avec le covid, pression sur les budgets, le secteur habitué à jongler avec les contraintes fait face à des défis inédits. Un contexte qui n’est pas favorable à de bonnes pratiques RSE (responsabilité sociétale des entreprises). « Les clients ont pris l’habitude des événements digitaux organisés en quelques semaines et demandent la même agilité pour les événements physiques. Là où on avait une visibilité de 6 à 9 mois, on est passés à 1 à 3 mois. L’activité est là mais le rythme est épuisant », pointe Christophe Cousin, président de l'agence Win-Win, en charge de la RSE à l’association L’Événement.
L’événementiel est pourtant un des premiers métiers de la communication à s’être emparé du sujet de l’éco-responsabilité. Dès 2004, la filière a créé Éco-événement, un collectif de sept associations professionnelles engagées pour des événements responsables. Aux avant-postes de ce projet, Dan-Antoine Blanc-Schapira, fondateur de l'agence Sensation! : « Réduire l’impact d’un événement ne bride pas la créativité et ne coûte pas plus cher à condition de l’anticiper et de se former en amont, affirme-t-il. Éco-événement propose un auto-diagnostic pour trouver des solutions pratiques en termes de transport, de restauration, d’hébergement… ». Lors du salon Produrable 2021, pour la Caisse d’Epargne, Sensation! a installé un stand éco-conçu par Éphémère Square à partir de bois du Massif Central réutilisé à la fin de l’événement. Le mobilier extensible pouvait être replié dans une simple caisse de transport. Le traiteur Novaedia était un Ésat (établissement ou service d’aide par le travail) accueillant des travailleurs handicapés. WMH Project, entreprise qui vient d’intégrer LDR (ex-Lever de Rideau), a organisé un événement interne pour Lavazza à Bordeaux avec un hébergement sur place qui a ensuite été mis à disposition d’une association d’aide aux femmes en difficulté. « Les participants se sont prêtés au jeu car ils savaient que le lieu allait continuer à vivre. La RSE donne du sens à un événement et peut donc avoir une dimension économique », assure Franck Chaud, cofondateur de WMH Project.
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Une question qui revient souvent est celle de la moquette. Est-elle bien nécessaire sur un salon alors que le lieu d’exposition pourrait investir dans un sol de bonne qualité? « La moquette, mais aussi les kilomètres de ponts d’éclairage font vivre des prestataires qui les montent et les démontent à chaque événement. L’événementiel, c’est quand même vendre de l’éphémère », souligne Christophe Cousin de Win-Win, qui a organisé pour Kenzo un événement éco-conçu. En alternative, il propose d’installer des dalles de résine et des ponts fixes, mais aussi des moquettes recyclées et recyclables quand elles sont indispensables. « Pour un congrès, nous avons réussi à passer de 30000 m2 de moquette à 23000 m2, la différence a permis de payer son nettoyage pour la recycler », témoigne Dan-Antoine Blanc-Schapira.
Mais le poste à plus fort impact sur un événement est indéniablement le transport. Il représente 80% des émissions de carbone contre 20% pour les équipements et la restauration. S’il est relativement facile de supprimer les kakemonos et de donner les repas invendus, il est plus compliqué de remplacer les déplacements en avion sur un rendez-vous international. La société de conseil Green Événements a mis en place le calculateur d'empreinte carbone Climeet qui a permis par exemple au Festival de Cannes de favoriser les déplacements en train et en véhicules électriques, de supprimer les bouteilles en plastique, de développer la restauration végétale. « On peut diviser par deux ses émissions de gaz à effet de serre en repensant le fret et les stands, souligne Béatrice Eastham, la fondatrice de Green Événements. On démontre ainsi que la RSE peut être une source d’économie, à condition de l'envisager en amont de la conception d’événements. » « Le digital peut apparaître comme une solution mais il a sa part d’ombre, pointe Christophe Cousin. Malgré des technologies de plus en plus basse consommation, il mobilise un nombre croissant de serveurs, surtout avec le développement du metaverse. » Rose Lucotte, co-fondatrice du salon ChangeNow dédié à la transition écologique, a fait les comptes : « Notre édition digitale l’an dernier a eu un impact carbone 40 fois moindre qu’en présentiel mais c’est sans compter l’impact positif des connections qui ont lieu lors des rencontres physiques, lorsqu’une start up trouve un investisseur par exemple. L’événement, lieu d’interactions, est un accélérateur de la transition. » Un impact à prendre en compte dans le bilan global.
ISO 20121. Ce n’est pas un label mais une norme parue avant les JO de Londres de 2012 dédiée aux « systèmes de management responsable appliqués à l’activité événementielle ». Vérifiée par l’Afnor ou le Bureau Veritas, elle a un coût réservé aux grosses structures, de l’ordre de 25000 euros. Actuellement environ un tiers de la centaine d’agences adhérentes à L’Événement sont certifiées. Mais elle est controversée depuis que la Fifa l’a obtenue pour l’organisation de la Coupe du monde de football au Qatar.
Lead. Créé par Green Événements, le Label Événement à Ambition Durable évalue les résultats d’un événement a posteriori autour de trois critères : zéro déchet, zéro net carbone et impact social positif.
Prestadd. Lancé en 2011 par le Synpase (syndicat national des prestataires de l’audiovisuel, du spectacle et de l’événement), le label Prestadd donne également une feuille de route pour la réduction des impacts environnementaux et sociétaux des activités événementielles, particulièrement dans l’audiovisuel.
Adere. L’Auto Diagnostic Environnemental pour les Responsables d’Événements n’est pas un label mais un outil conçu avec l’Ademe pour connaître et évaluer son impact sur l’environnement.