Après plusieurs chutes, Fusalp compte bien se relever et revenir dans la course. La marque de vêtements d'hiver, conçue à l'origine pour le ski, devient aussi une marque de prêt-à-porter. Autre projet et pas des moindres, l'ouverture d'une boutique aux États-Unis.
Aux abords d’une autoroute à Annecy, derrière les portes d’un bâtiment industriel de 6000 mètres carrés, se trouve le siège social de la société de vêtements sportifs Fusalp. Aux côtés des 70 collaborateurs français, dont 85% sont basés à Annecy, sont également présents le directeur général Alexandre Fauvet et les coprésidents Sophie et Philippe Lacoste. Après la revente de leurs parts à la société Lacoste, les enfants de Michel Lacoste ont décidé de racheter en 2013 l’entreprise en perdition Fusalp. Un sacré défi les attendait. Fondée en 1952 par un couple de tailleurs d’Annecy, Fusalp connaît son âge d’or dans les années 80 avec plus de 1000 salariés et habille les meilleurs skieurs, de Jean-Claude Killy à Marielle Goitschel. Revendue deux fois, victime de la concurrence et des coûts de fabrication, Fusalp périclite jusqu’à n’embaucher qu’une trentaine de salariés lors de sa cession à la fratrie Lacoste.
«Quand nous sommes arrivés chez Fusalp, leur best-seller était une veste doudoune à 199 euros. Depuis, notre best-seller est la veste Montana vendue 1000 euros», lance tout de go Alexandre Fauvet. Faire du ski oui, mais avec style. Le ton est donné. En rachetant la firme spécialisée dans le vêtement de ski, le trio de dirigeants veut l’emmener vers un positionnement plus haut de gamme. Sans pour autant dénaturer les valeurs fondatrices : «garder la culture et le savoir-faire de la montagne au travers d’un style et d’un design travaillé», confirme le directeur général. Ils sont d’ailleurs l’équipementier de l’équipe olympique britannique de ski alpin depuis 2021. «Pour l’instant, on habille une équipe à notre taille, on espère qu’un jour on sera assez grand pour habiller l’équipe de France», lance-t-il, rêveur. Les victoires de l’équipe britannique à la Coupe du Monde en 2021 ont rapporté à Fusalp une année record en termes de ventes. «C’est un tremplin pour l’international», confirme Philippe Lacoste.
L’anti-doudoune
C’est également au siège d’Annecy que réside le cœur de la création. Cachée au milieu des portants, l’équipe créative – composée majoritairement de femmes venues des quatre coins du monde – se creuse les méninges pour réfléchir aux vêtements de demain. «Nous sommes l’anti-doudoune. Ce n’est pas notre savoir-faire premier car nous privilégions la finesse des pièces. Nous préférons la recherche et l’innovation dans des matières qui tiennent chaud mais qui ne feront pas cet effet bouffant», exprime Élisabeth Malcor, directrice des collections chez Fusalp. Pour tenter d’attirer le client, la marque a bien compris qu’il fallait s’accorder à la tendance du moment, avec des looks plus sportswear et plus amples. Le studio de création a justement dans son mood board des photos des rappeurs Drake et Kanye West habillés de larges parkas. «C’est pour préparer la prochaine saison», glisse la styliste. Fusalp affirme sa volonté de se lancer dans le prêt-à-porter, avec une gamme de pièces plus urbaines. La collection printemps-été, actuellement en vente sur le site et en boutique, est exposée dans le showroom du siège. La directrice des collections, épaulée par sa styliste, s’empresse de montrer les multitudes de styles. Bobs, trenchs, coupe-vent, capes… tous les «it» du moment ont été repensés version Fusalp.
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Sans oublier le pantalon fuseau, une autre pièce phare. Initialement conçu pour le ski, il a été retravaillé afin d'être plus léger pour se porter en ville. «Nous nous sommes rapprochés des matières du prêt-à-porter tout en gardant les technicités des vêtements de ski. Dans l’équipe, elles sont plusieurs à venir de l’univers du prêt-à-porter et/ou du luxe. Des modélistes ont été formés chez Balenciaga, Yves Saint Laurent…», précise Sophie Lacoste. Pour preuve, s’offrir une pièce de cette collection a un prix, compter 690 euros pour le manteau Greta, un trench long à capuche. «C’est la première fois que la collection compte autant de looks», informe Élisabeth Malcor. Un tel déploiement a poussé l’enseigne à réaliser en interne une vidéo promotionnelle et des prints à destination des réseaux sociaux et du digital. Leur dernière campagne marketing remontait à 2017 avec la mannequin internationale Constance Jablonski. «Nous avons peu de budget alloué au marketing», confesse Alexandre Fauvet.
Conquête de l'Ouest
Côté client, Fusalp se dit transgénérationnelle en s’adressant autant aux 25 ans qu’aux 55 ans. «Plus de 70% de nos e-consommateurs ont moins de 30 ans. Pour autant, nous n’avons pas envie de faire du jeunisme en allant sur les réseaux sociaux comme Tik Tok. La jeune génération est venue à nous», affirme Alexandre Fauvet. Une aubaine pour l’enseigne qui poursuit ses efforts sur le digital avec une augmentation de 35% de fréquence sur son site entre 2020 et 2021, due notamment à la pandémie. Pas d’inégalité non plus entre les sexes puisque Fusalp confectionne autant de pièces pour les hommes que pour les femmes.
À l’orée de ses 70 ans, la conquête de la marque française ne s’arrête pas là puisque la prochaine étape sera celle de l’Ouest. «En novembre 2022, nous avons prévu d’ouvrir notre première boutique aux États-Unis, à Aspen. Pour l’heure, il s’agit de notre plus gros investissement», souffle Alexandre Fauvet. En 2022, l’enseigne table sur un chiffre d’affaires à la hauteur de leurs efforts à 53 millions d’euros, alors qu'il était de 40 millions en 2021. Le directeur général finira par avouer qu’une autre ouverture est prévue aux États-Unis : «Je ne sais pas encore quand mais entre le Q1 et le Q2 2023, nous allons ouvrir notre plus gros flagship sur Madison Avenue, célèbre rue de New York.» Ces deux nouvelles adresses s’ajouteront aux 49 boutiques déjà ouvertes dans le monde.
40 millions d'euros
Chiffre d'affaires 2021.
70
Nombre de collaborateurs en France (85% à Annecy).
200
Nombre de collaborateurs à l'international.
49
Nombre de boutiques dans le monde.