OpenAI, qui a lancé la vague de l'intelligence artificielle (IA) générative avec ChatGPT fin 2022, a conclu mercredi 2 octobre une levée de fonds majeure de 6,6 milliards de dollars, qui la valorise à 157 milliards. Mais l'avenir de la star de la Silicon Valley interroge.

Avec une valorisation de 157 milliards de dollars, OpenAI devient une des trois plus grandes entreprises non cotées au monde, avec SpaceX, le groupe d'exploration spatiale d'Elon Musk, et le géant chinois ByteDance (TikTok). Mais la start-up encore inconnue du public il y a deux ans est loin de la rentabilité. OpenAI s'attend à perdre environ 5 milliards de dollars cette année, malgré un chiffre d'affaires d'environ 3,7 milliards, selon le New York Times (NYT).

Car les modèles d'IA générative, entraînés sur de vastes quantités de données pour produire du texte, des images, et d'autres contenus de bonne facture, sont gourmands en énergie et requièrent des puces électroniques de pointe comme celles de Nvidia, très coûteuses. « Le prochain modèle sera plus grand, et le suivant encore plus grand. C'est une activité qui exige des capitaux importants », a reconnu jeudi Sarah Friar, la directrice financière d'OpenAI, dans une interview sur CNBC. La société basée à San Francisco prévoit de réaliser 11,6 milliards de dollars de revenus l'année prochaine, selon le NYT. Elle s'est félicité mercredi que ChatGPT soit utilisé par « plus de 250 millions de personnes dans le monde ».

Elle commercialise en outre des abonnements aux particuliers pour la version plus avancée, et aux développeurs qui créent leurs propres services d'IA générative. Mais « OpenAI perd de l'argent chaque fois que quelqu'un utilise son service », estime Edward Zitron, dans sa newsletter. Pour cet expert du secteur, la start-up « n'a pas de stratégie pour parvenir à la rentabilité ».

Gouvernance

La levée de fonds va par ailleurs entraîner une transformation de l'entreprise fondée en 2015 comme organisation à but non lucratif. Sarah Friar a confirmé jeudi 3 octobre du bout des lèvres qu'OpenAI allait devenir une société à but lucratif, même si sa mission première reste de créer « l'IA générale » (aussi intelligente que les humains) « pour le bien de l'humanité ». « Nous voulons juste être une entreprise plus traditionnelle. Pourquoi compliquer des choses qui n'ont pas besoin de l'être », a-t-elle déclaré, souhaitant que « l'entreprise fonctionne pour toutes les parties prenantes ».

Mais le changement n'est pas du goût de tous. Elon Musk, qui avait participé au lancement d'OpenAI en 2015, accuse régulièrement la start-up de l'avoir « trompé » et d'avoir « trahi » sa mission. Et en interne, les départs se succèdent. Plusieurs cofondateurs sont partis, et Mira Murati, la directrice technologique, a démissionné la semaine dernière.

« C'est comme toutes les entreprises, il y a des évolutions (...) et c'est généralement une très bonne chose », a balayé la directrice financière. Elle a refusé de commenter la possibilité que Sam Altman, cofondateur et patron emblématique d'OpenAI, reçoive pour la première fois une participation qui ferait de lui un multimilliardaire. En novembre dernier, le conseil d'administration l'avait limogé. Il avait été rétabli dans ses fonctions à la tête de la start-up en quelques jours, soutenu par l'écrasante majorité des employés et le principal investisseur, Microsoft.

Investisseurs et concurrence

Le tour de table mené par la société de capital risque Thrive Capital comprend notamment Microsoft, qui a déjà injecté 13 milliards de dollars dans la start-up, l'américain Nvidia, le conglomérat japonais SoftBank et MGX, fonds d'investissement adossé aux Emirats arabes unis. « Il était important d'avoir un groupe de partenaires plus diversifié, mais la relation avec Microsoft reste profonde », a commenté Sarah Friar. « Nous allons continuer à partager la propriété intellectuelle et à lancer des produits ensemble. » Selon le Financial Times, les participants se sont engagés à ne pas investir dans des concurrents.

« Nous voulons nous assurer que nos investisseurs se concentrent vraiment sur OpenAI, mais ils vont évidemment investir aussi dans l'écosystème », a indiqué Sarah Friar. Malgré son statut de pionnier de l'IA générative, OpenAI n'est pas à l'abri de la concurrence. Grandes ou petites, la plupart des sociétés technologiques rivalisent à coups d'assistants IA généralistes ou spécialisés. « La version gratuite de ChatGPT est identique à celle de Claude (Anthropic), de Meta, de Copilot (Microsoft) et même de Grok (X, société d'Elon Musk). Ils utilisent tous des données d'entraînement similaires, qui donnent tous des résultats similaires », souligne Edward Zitron.

 

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