Le duo dirige ensemble Valet de Pique et Soubacq, deux marques de mode fabriquées à Paris, qui misent sur l’artisanat et l’économie circulaire.
L’un est diplômé d’école d’ingénieur, l’autre a un master de mode et design. Ils se sont rencontrés dans un incubateur et leur complémentarité était évidente. Martin Meunier, 28 ans, a fondé Valet de Pique en 2018. Formé au digital et à la logistique, il a croisé par hasard le chemin d’un atelier de maroquinerie à Paris, dans le quartier de Belleville, qui fabrique depuis trois générations de solides sacs à outils de plombiers. L’idée a germé de créer une marque contemporaine à partir de belles qualités de cuir et d’un savoir-faire manuel.
Valet de Pique tire son nom du valet, un outil utilisé en maroquinerie qui permet de tenir entre elles deux pièces de cuir pour les coudre. « J’avais envie d’un projet local, artisanal, à taille humaine. C’est un combat de fabriquer en France, surtout avec l’inflation. Je veux créer du haut de gamme abordable », explique le fondateur. Parmi les collections, le sac à main Colette est proposé à 350 euros, avec la garantie d’un produit authentique, qui n’a pas fait le tour de la planète, fabriqué dans des conditions de travail décentes. La marque vient de lancer une édition limitée en collaboration avec l’auteur Alexis Michalik.
Pour Louise Drouhet, 26 ans, la prise de conscience est née d’une expérience au sein d’une marque de mode, où elle a constaté l’effarant gâchis de matière. « Il y a cinq ans, on jetait encore les prototypes. C’était avant la loi Agec (anti-gaspillage pour une économie circulaire) », rappelle-t-elle. Fondé en 2020, Soubacq (le nom de famille de son arrière-grand-mère, qui était couturière) récupère les rouleaux de tissus des maisons de luxe, et fait fabriquer un modèle unique de bleu de travail dans un atelier de couture du quartier Arts et Métiers à Paris. Tous les lundis matins, la veste de la semaine est dévoilée, en une dizaine d’exemplaires, à partir de 245 euros.
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Les amateurs peuvent ainsi s’offrir une édition limitée dans une étoffe issue des ateliers d’Hermès, Chanel ou Valentino - aux acquéreurs de deviner la provenance avec les indices distillés par Louise. « L’upcycling est le modèle le plus viable pour une marque de mode qui se lance aujourd’hui, à moins de fabriquer au Portugal ou de tripler les prix », affirme-t-elle. Et d’ajouter : « Le vrai luxe, c'est la rareté. Les grandes maisons l’ont perdue. »
Même constat pour Martin Meunier, qui regrette que les marques de luxe ne fabriquent pas davantage en France, malgré leurs discours officiels. La créative et l’ingénieur se félicitent d’avoir créé des emplois et des produits intemporels, distribués sur internet, en grands magasins et en boutiques indépendantes. Les sacs Valet de Pique affichent leur date de fabrication gravée dans le cuir, comme une promesse de longévité. Les vestes Soubacq, unisexes et sans invendus, sont taillées dans des tissus qui se bonifient avec le temps.