Sachez tirer parti de tous vos salons

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Les entreprises françaises dépensent près de 8milliards de francs par an dans les foires et salons (lire aussi encadré). Leurs investissements dans ce mode de communication sont donc suffisamment importants pour qu'elles s'y intéressent de près et mettent tout en oeuvre pour réussir leur prestation. Pour certaines PME, le salon est l'unique média. Or, participer à une manifestation de ce genre ne s'improvise pas. Les entreprises doivent définir précisément leurs besoins, réfléchir à un stand, sélectionner un prestataire de services, puis animer l'espace. Enfin, rien ne sert de dépenser des fortunes si l'on n'assure pas ensuite le suivi de l'action engagée. Etape par étape, voici quelques conseils pour mieux optimiser votre présence sur un salon.Définir ses besoinsLorsque l'on veut optimiser sa présence sur un salon, il vaut mieux s'y préparer avec soin. Il faut tout d'abord déterminer ses besoins, son budget, puis choisir l'entreprise prestataire qui construira le stand. Le choix du prestataire est primordial: le stand est la vitrine de l'entreprise, pour ses clients et prospects, mais également par rapport à la concurrence.«Le salon obéit aux règles de la tragédie: unité de temps, de lieu et d'action. Il n'existe aucun autre moment dans la vie de l'entreprise où elle est confrontée à la fois à ses concurrents, ses clients et ses prospects»,résume Daniel Ernst, directeur associé de l'agence d'architecture intérieure E&A. Avant toute chose, il convient de préparer sa participation au salon en amont en définissant les besoins de communication de sa société.«Deux paramètres doivent être pris en compte. D'abord, la situation économique de l'entreprise, dont dépend évidemment l'importance du budget investi. Ensuite, il faut déterminer si on veut faire de la communication image ou de la communication produit»,estime Juana Moreno, responsable du Programme technologie chez CEP Exposium. En clair, il faut savoir si on veut vendre, prospecter, accumuler des contacts, le tout en fonction de la nature du salon visé.«Nous exposons au Congrès des notaires, des experts-comptables, des maires de France, ainsi que dans les salons agro-alimentaires comme le Salon de l'agriculture bien sûr, mais aussi au Sial et à Vinexpo»,énumère Henri Ambaud, responsable de la communication événementielle à la direction de la communication de la Caisse nationale du Crédit agricole. Il ajoute:«Chaque architecture est adaptée à l'emplacement, à la stratégie du salon et à la cible. Pour le Congrès des notaires, nous n'avons pas d'objectif commercial mais plutôt relationnel. Le stand sera donc équipé d'un coin salon avec canapé, presque comme un appartement. A l'opposé, pour les experts-comptables, ce sera un lieu de travail avec des bureaux.»Dès les objectifs définis, il convient de recueillir des informations sur l'organisateur du salon en question. Est-il reconnu par la profession? Quelle est son antériorité, son audience, sa communication? Le candidat exposant peut s'adresser au Centre français du commerce extérieur, à la chambre de commerce de sa ville ou aux syndicats professionnels (voir adresses utiles).«Souvent, les sociétés sautent ce cap de précommunication et c'est dommage»,constate Sophie Caillon, du Comité des expositions de Paris. Il faut dire que développer un véritable projet salon n'est pas toujours aisé.«Ce ne doit pas être un moment de rupture dans la vie de l'entreprise, mais faire partie intégrante de sa communication interne et externe»,affirme Frédéric Theux, directeur de la division industrie de Miller Freeman France.«Nous militons pour que le stand devienne une véritable communication volume et soit un moment fort de la stratégie de communication d'une marque ou d'une entreprise, et non plus une activité déconnectée»,renchérit Daniel Ernst. Dans la pratique, le niveau de responsabilité interne dévolu à l'organisation du salon dépend de la taille de l'entreprise. Dans les petites ou moyennes sociétés, c'est souvent le patron qui s'en occupe, avec les contraintes que cela sous-entend. Dans les grosses entreprises, l'organisation de la manifestation est confiée à la direction de la communication ou du marketing. Or, le salon n'est pas toujours bien considéré dans la panoplie des instruments de communication. Moins glamour que les relations presse ou la publicité, il est souvent négligé par ces directions.«Dans les très grandes sociétés, le responsable des manifestations n'a très souvent aucun pouvoir en interne, ce qui n'est pas de bon augure»,prévient Sophie Caillon. Ces premières démarches entreprises, il est temps de mettre en oeuvre les moyens pour attirer les visiteurs.«L'outil de base par excellence reste l'invitation»,dit Jean-Pascal Jegu, directeur général du Bureau international de relations publiques. Pourtant, les exposants ne l'utilisent pas ou peu. Et c'est à l'organisateur du salon d'insister auprès de ses clients pour qu'ils s'en servent efficacement. Ne pas oublier non plus le marketing direct avec des mailings personnalisés, ni la publicité dans le catalogue de l'exposition. Pensez aussi à l'Internet. On peut mettre sur son web son catalogue produits, les thèmes de rencontres proposés, les heures de présence des commerciaux, etc.Concevoir son standEvidemment, tous ces préparatifs devront être menés à l'avance.«Le temps est un facteur crucial: la préparation de l'avant-salon est de plus en plus importante»,rappelle Frédéric Theux. En effet, tout cela ne sert à rien si on n'a pas pris la peine de s'inscrire pour réserver son espace.«L'idéal est d'acquitter les droits d'admission dans les neuf mois précédents la manifestation»,estime Juana Moreno. Sur les grands salons comme Batimat, par exemple, 70% des inscriptions sont effectuées quatorze mois avant l'ouverture. Dans les salons moins importants, la moyenne est de quatre à six mois.«Après avoir fédéré les réponses des caisses régionales vis-à-vis de la cible visée, nous déterminons l'importance du stand. Vient ensuite un préchiffrage de la manifestation avec le brief le plus précis possible. Six mois avant le salon, nous réservons et choisissons l'emplacement. Deux mois avant, nous redéfinissons les objectifs et choisissons le standiste ou le décorateur»,explique Henri Ambaud. L'inscription est faite, les mètres carrés achetés, il faut maintenant les habiller. Encore une fois, tout dépend des moyens consacrés au salon et de l'objectif visé. Plusieurs solutions sont donc possibles. Pour une première manifestation ou pour ceux qui exposent sur une petite surface, le premier choix est d'adopter un stand dit modulaire. Il comprend des cloisons, de la moquette, une table et des chaises, une enseigne avec le numéro du stand et/ou le nom de la société, et quelques spots. C'est le kit de base. Certains salons très spécialisés sont composés à 90% de stands modulaires. Cette formule est proposée par la plupart des organisateurs de salons, qui prennent également en charge les branchements des fluides (eau, électricité, téléphone, etc.). Son prix tourne autour de 400 à 600francs le mètre carré.Choisir son prestataireDe plus en plus, une solution intermédiaire dite des «mètres carrés packagés» permet de bénéficier de quelques meubles, d'une décoration florale, d'une signalétique afin d'habiller un peu plus son stand sans engager de dépenses somptuaires. Le prix de cette solution: de 800 à 1000F le mètre carré. Troisième choix: le stand traditionnel. Il faut, dans ce cas, s'adresser à un professionnel, concepteur-installateur (appelé communément standiste) ou bureau d'études qui sous-traitera la réalisation. Hormis les très grandes entreprises internationales qui disposent de bureaux intégrés, la plupart des autres adoptent cette méthode pour concevoir, construire et installer leur stand. Un stand habillé vaut de 2000 à 5000F le mètre carré, voir beaucoup plus sur certains salons internationaux de prestige comme le Salon de l'auto ou Telecom Genève, sur lesquels fleurissent les structures à étages avec force équipements multimédias. Au Salon de l'auto, des stands de 1000m2 qui ont coûté deux millions de francs ne sont pas rares. A Telecom Genève, les tarifs peuvent atteindre 10 à 40millions de francs par stand pour dix jours d'exposition! Lors de la dernière édition, France Télécom disposait d'une structure de 17mètres de haut, avec quatre étages de 800m2 chacun. Même surenchère à quelques mètres de l'opérateur français avec Alcatel. Première étape: déterminer si on veut travailler avec une société intégrée, qui dispose à la fois d'un bureau d'études et d'un atelier de fabrication, ou si on préfère s'adresser à un architecte ou un cabinet d'études qui s'occupera ensuite de la sous-traitance des opérations lourdes. La société régionale qui connaît un bon artisan dans les corps de métiers les plus importants (menuiserie, électricité) peut aussi faire appel à lui. Puis, il faut contacter les différents prestataires du marché. Celui-ci a beaucoup souffert ces dernières années; certaines grandes entreprises ont déposé leur bilan, tandis que d'autres étaient rachetées par des groupes étrangers. Néanmoins, il reste suffisamment de standistes pour que le choix tourne encore au véritable casse-tête. On peut s'adresser à la Fédération française des métiers de l'exposition (voir adresses utiles) qui comporte environ une soixantaine de professionnels. Avantage: la Fédération a mis au point un cahier des charges type qui permet à l'exposant de recenser toutes les questions qu'il faut poser à son concepteur-réalisateur.«L'appartenance à la Fédération garantit l'observation d'une charte vis-à-vis du client. Ce qui signifie un respect des délais, du budget et même une aide confraternelle en cas de problème de dernière minute du concepteur-installateur»,explique Claude Agnelli, vice-président de la Fédération et président directeur général de AD5 America International. Le métier de standiste est très saisonnier, et il arrive qu'un client qui doit monter son stand à la rentrée se trouve lâché par son prestataire qui n'a pas supporté la baisse d'activité de quatre mois qui a lieu pendant l'été.«C'est un secteur en crise où la concurrence est effrénée. L'exposant a intérêt à se renseigner avant de faire son choix»,estime François Guarino, président de HG Création, qu'il présente comme«le premier bureau d'études indépendant français».Autre solution, s'adresser à une agence d'architecture intérieure comme E&A, qui réalise l'étude, puis s'occupe de sélectionner le prestataire ou les sous- traitants.«On crée des cahiers des charges par corps de métier et on lance les appels d'offres, puis on fait une proposition au client. Notre seule rémunération, ce sont nos honoraires»,précise Daniel Ernst. Après avoir déterminé une première liste de prestataires, l'exposant a intérêt à les rencontrer au préalable et à prendre certains renseignements (nombre de personnes, solvabilité, etc.). Il en sélectionne quatre, leur donne un cahier des charges précis qui récapitule les objectifs, le concept du stand et le budget envisagé. Exemple, Legrand, le fabricant de matériel électrique.«Nous faisons un appel d'offres avec trois sociétés en moyenne, le plus souvent des entreprises intégrées car nous avons eu des soucis avec les sous-traitants,raconte Pierre Aiglon, responsable de la communication externe.Comme nos stands sont importants, nous cherchons des sociétés qui ont la surface suffisante et qui ont une vraie notion de qualité. On essaie d'abord de les rencontrer, puis on sélectionne les compétiteurs, on leur donne un brief et notre cahier des charges, qui est très précis (fonctionnement du stand, messages à faire passer, etc.)»,ajoute-t-il. Même procédure pour la Caisse nationale du Crédit agricole:«La règle d'or chez nous, c'est l'appel d'offres. Nous travaillons avec quatre prestataires qui savent qu'ils sont à chaque fois en concurrence»,rappelle Henri Ambaud.«Si on est pressé, on met trois ou quatre sociétés en compétition. Quand on a plus de temps, entre quatre et six»,précise pour sa part Emmanuel Hebrard, adjoint au directeur de la stratégie et du développement de France Télécom Globecast. L'exposant doit demander des avant-projets sous forme de roughs ou de plans et un premier devis.«En réponse à notre cahier des charges, ils nous fournissent un rough ou un plan informatisé et un premier devis. On recadre les idées proposées et le devis, et on demande des maquettes en volume, toutes à la même échelle pour pouvoir comparer»,explique Pierre Aiglon.«Tout dépend de la nature de l'opération. Si elle est lourde, nous faisons deux tours. Au premier tour, nous demandons des roughs»,ajoute Emmanuel Hebrard. Après en avoir retenu deux, l'exposant pourra demander des maquettes et un devis final.Animer et assurer le suiviDès que le standiste est sélectionné, il met au point le projet avec son client et passe à la réalisation du stand. Arrive finalement le montage du stand qui est généralement livré une demi-journée avant l'ouverture du salon. Après le salon, l'exposant a le choix de conserver son stand, pour le réutiliser, ou de le détruire. De fait, ces bonnes pratiques sont rarement observées. Les professionnels se plaignent d'être mis en concurrence à dix et de se voir réclamer chacun une maquette qui coûte cher.«Un avant-projet global vaut environ 10000francs, une maquette de 30000 à 50000francs, et c'est nous qui en supportons la charge»,se plaint François Guarino.«Vu l'importance de nos stands, nous ne payons pas ces maquettes. Mais on ne consulte pas quinze fournisseurs, comme c'est souvent le cas. Cette attitude est une grosse perte de temps en interne et prouve seulement qu'on ne sait pas ce qu'on veut vraiment»,tempère le responsable de la communication externe de Legrand.«En général, on rémunère les grosses compétitions»,explique Emmanuel Hebrard. De même, si un délai raisonnable pour monter une opération est de quatre à cinq mois, dans les faits tout se décide un mois avant le début du salon. Certains clients respectent cette règle du jeu, mais ce n'est apparemment pas le cas de la majorité. En fonction de ses objectifs, l'exposant peut aussi animer son salon. Hôtesses, troupes de théâtre, animations diverses, équipement multimédia, les solutions sont nombreuses et variées. Des sociétés spécialisées, indiquées par les organisateurs des manifestations, pourront se charger de cet aspect festif.«Il faut éviter de faire trop de tapage. Suivant les produits, on organisera des défilés, des concours, des démonstrations ou des conférences de presse, en liaison avec l'organisateur»,détaille Sophie Caillon.«Pour les animations, nous sommes très prudents. Nous avons un projet de jeu en trois volets pour le prochain Salon de l'agriculture sur la cible des jeunes agriculteurs»,explique Henri Ambaud. Sur le salon de Las Vegas, France Télécom Globecast fait un tirage au sort après avoir demandé aux visiteurs du «VIP lounge» de déposer leurs cartes de visite au stand. Les gagnants ont droit à un objet de luxe français, comme un foulard Hermès ou l'équivalent. En ce qui concerne le suivi, il faut d'abord identifier les visiteurs. Premier outil, le badge magnétique, qui permet de recueillir les coordonnées des visiteurs. On peut également lui préférer un badge avec codes-barres. Une location de crayon optique coûte environ 2500francs pour une durée de trois jours. On le décharge tous les soirs dans un micro portable et on peut ensuite imprimer les informations. La traditionnelle fiche à remplir ne doit pas être négligée. Après le salon, on les comptabilise, on les informatise et on les utilise pour, par exemple, assurer un suivi commercial. Au Crédit agricole, l'évaluation se fait au moyen des fiches remplies par les visiteurs. Autres instruments sur lesquels capitaliser: les éventuelles récompenses, oscars, trophées, etc. Il ne faut toutefois pas attendre trop longtemps pour se servir de ces renseignements.«L'idéal est d'attendre dix jours au minimum avant de recontacter le prospect, un mois au maximum. Après, c'est trop tard»,prévient Juana Moreno. Mais quels que soient les moyens de suivi employés,«calculer le retour sur investissement d'un salon est très difficile»,conclut Henri Ambaud.