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Les starlettes de télé-réalité sont très courtisées par les marques. Espérant capitaliser sur une gloire vraisemblablement éphémère, ces vedettes jetables commencent à lancer leurs propres produits. Quitte à flirter allègrement avec la publicité mensongère.

«Vous aussi vous voulez vous faire arnaquer et acheter un produit tout pourri que j’ai même pas testé parce que je dois renvoyer la boîte? Allez sur www.blablaevents.com et utilisez mon code promo exclusif BASTOSWITHLOVE pour avoir 20% sur ce beau collier qui ne vaut même pas 1% ». Coup de tonnerre dans le monde déjà orageux des influenceurs. En août dernier, Bastien Grimal, ex-candidat de Secret Story, depuis, influenceur spécialisé dans les équipements sportifs, publiait ce post sulfureux accompagné d’une photo de lui, une chaîne autour du cou. Par ce coup d'éclat, il souhaitait dénoncer les publicités mensongères, qui selon lui, fleurissent sur les Snapchat et autres Instagram.

Le business florissant du placement de produits

Foodspring, Women’s Best, Anaca 3, Hello Body, Cellule Blue… Autant de petites marques dont les stars de la télé-réalité, reconverties en influenceuses sur les réseaux sociaux, vantent les mérites. Comme une sorte de téléshopping, leurs fils d’actualité et leurs stories sont inondés de ces placements de produits. Promotions non-stop sur la dernière crème minceur ou le thé ultra-drainant, ces produits dits «miracles» séduisent leurs aficionados.

En octobre 2017, l’émission Complément d’enquête mettait en lumière ce business florissant dans le reportage de la journaliste Nathalie Sapena, « Fric Story ». «Bien sûr, le placement de produit a toujours existé, mais de façon artisanale, explique la journaliste sur le web. Entre-temps, il y a eu le boom des réseaux sociaux et de la publicité digitale. Aujourd'hui, le placement de produits s'est professionnalisé. Certains ont profité de ce phénomène récent en lançant leur agence afin de monétiser l’image des stars de la téléréalité sur les réseaux sociaux».

Deux cents ex ou actuels candidats de télé-réalité font ainsi appel à l’agence de communication d’e-influenceurs, Shauna Events, créée en 2016, par celle qui fait figure de grande prêtresse des placements de produits, Magali Berdah. «Je monétise leurs réseaux sociaux, je les conseille mais je ne suis pas leur agent», clarifie-t-elle. Magali Berdah, qui reçoit à l’hôtel Molitor, a été la première à s’emparer du marché pour en faire un empire. Depuis, les marques se sont multipliées, son carnet d’adresses a explosé. Son téléphone posé sur la table elle joue la carte de la transparence et montre des conversations entre elle et des clientes, qui ne veulent pas de certains partenariats. «J'ai plus de refus que d'accords!», assure Magali Berdah.  

Les vedettes de télé-réalité à la manette

Les starlettes joueraient les divas ? «Au départ, elles étaient peu sollicitées par les marques et n’hésitaient donc pas à sauter sur la première opportunité de partenariat. Depuis le métier d’influenceur s’est professionnalisé: lorsqu’on dispose d’une grosse communauté, on peut se permettre de choisir», explique Guillaume Doki-Thonon, fondateur de Reech. «Désormais c’est l’influenceur qui « booste » la notoriété de la marque, et pas l’inverse», lâche Stéphane Bouillet, fondateur d’Influence4You.

Car si elles ne sont pas forcément connues des plus de 20 ans, les vedettes de la télé-réalité disposent d’une force de frappe non négligeable. Jessica Thivenin, connue pour avoir participé à l’émission Les Marseillais, a été élue en 2017 la star de la téléréalité la plus suivie des réseaux sociaux avec 3,2 millions d’abonnés, dépassant Nabilla, son shampoing et ses 3 millions d’abonnés. Elle serait également la plus rémunérée en placement de produits. Le magazine people Public avance un salaire mensuel de 24 000 euros par mois. «2 000 euros pour un placement de produit sur Instagram, 1 000 euros sur Snapchat, et elle reçoit 10 à 15 demandes de placement de produits par des annonceurs chaque semaine, mais elle n'accepte qu'environ 25% des demandes», déclare le magazine. Une notoriété qui lui permet de choisir ses « batailles ». Du côté des hommes, Julien Tanti, pilier des Marseillais détient 2.6 millions d’abonnés quand son «fraté» Thibault Kuro Garcia, également ex-candidat des Marseillais est suivi par 2.4 millions de personnes. Bénéficiant d’une large audience et d’un réseau d’influenceurs, Thibault Garcia en a profité pour monter une entreprise de blanchiment dentaire BBryance avec son ex petite-amie « Marseillaise », Shanna Kress. Pourtant, cette quête du sourire hollywoodien fait grincer des dents.   

Adeptes du drop-shipping

Plus fines mouches que leurs looks hauts en couleurs et leurs connaissances géographiques approximatives pourraient le laisser croire, ces vedettes 2.0 ont recours à un procédé pour le moins discutable. C’est ce que l’on appelle le « drop-shipping » : les influenceurs passent par des sites de fournisseurs du type Aliexpress, Wish - le plus souvent basés en Chine - qui se chargent non seulement de produire mais aussi d’envoyer directement les produits aux clients. «Ces influenceurs vendent des produits et y apposent leurs noms alors qu’ils passent par des sites externes… In fine, cela peut détruire encore plus la confiance des consommateurs envers les publicités digitales», rapporte le président de l’ARPP, Stéphane Martin.

La méthode est certes imparable pour minimiser les frais commerciaux. Elle n’en reste pas moins plus que douteuse. «La relation de confiance est importante entre follower et influenceur. Si celui-ci pose avec un produit c’est qu’il l’utilise dans la vie de tous les jours…», avance Bastien Grimal. Le fondateur de Reech rappelle quant à lui qu’«un bon partenariat va au-delà du test produit. Il s’agit d’aller dans les usines, de co-créer des produits, rédiger des contenus créatifs…».

Ce qui n’est évidemment pas le cas, la plupart du temps. Et les fans des héros de télé-réalité – lesquels, fréquemment, ne sont plus domiciliés en France pour des raisons fiscales – peuvent payer très cher un produit de très basse qualité, à qui il arrive même parfois de ne pas arriver à bon port… À l’ARPP, on reçoit de nombreux courriers de clients mécontents. «La DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) est également noyée de plaintes», ajoute Stéphane Martin. D’autant que certains vont plus loin que la promotion de pseudos produits minceur, envoyant des followers dans des centres de chirurgie esthétique via des codes promos. Sarah Fraisou, «héroïne» de télé-réalité connue pour ses excès en tout genre, s’est ainsi reconvertie en accompagnatrice de personnes qui souhaitent se faire opérer à bas prix à l’étranger.

Ignorant toute responsabilité quant à la dangerosité des produits et services qu’ils vendent, ces influenceurs s’occupent encore moins du SAV de leur petit commerce. « Ces pratiques sont contraires aux CGV des plateformes », remarque Stéphane Martin. Tout comme elles violent les règles de la vente à distance.

On repense à ce temps lointain où la présentatrice Danièle Gilbert, petite fiancée des Français, vantait dans les pages de la presse télé sa « bague de Ré », un anneau censé procurer chance et bonheur à leurs heureux propriétaires… Les médias changent, les pratiques restent.

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