Alexandra Gaudin, 41 ans, est, depuis septembre 2013, DRH d'Australie, groupe de communication indépendant qui emploie 166 personnes réparties entre l'agence de publicité homonyme et ses filiales Unédite (communication écrite), Denis & Co (Event), Paris en Australie (Luxe)... Une PME familiale,surtout: présidée par Vincent Leclabart, codirigée par Jérôme Leclabart, et le dernier arrivé, David Leclabart (fils de Jérôme). La DRH d'Australie, qui a alterné auparavant entre postes de DRH (CWF, groupe de textile enfants) et de consultante en ressources humaines (Chorus, ADP), assume une pratique originale des ressources humaines.
Vous revendiquez le titre de «directrice des richesses humaines». N'est-ce pas présomptueux? Et d'abord, qu'est-ce que cela veut dire?
Alexandra Gaudin. J'ai voulu marquer ma différence avec la fonction habituelle de directrice des ressources humaines, en l'inscrivant dans le titre. C'est une façon de revendiquer cette démarche, cette nouvelle dimension des RH. Cela se traduit concrètement par la volonté d'être beaucoup plus présente auprès des collaborateurs: ainsi j'installe mon bureau chaque mois dans un étage différent. Dans cette même logique et pour réaffirmer ma neutralité vis-à-vis des salariés, je ne fais pas partie du comité de direction (même s'il m'arrive d'y intervenir).
Quel est votre rôle dans la transformation des métiers de l'agence?
A.G. Dès mon arrivée, j'ai commencé par multiplier les rencontres. J'ai vu quarante salariés en deux mois, ce qui m'a permis de bien comprendre les métiers de l'agence. Cela a abouti à la création de fiches métier pour chaque poste avec une dimension prospective: comment évoluera cette fonction dans les années à venir? Quelles nouvelles compétences seront nécessaires? J'ai aussi créé des entretiens annuels d'évaluation. J'ai enfin ouvert la possibilité pour les salariés de télétravailler un jour par semaine.
Vous avez aussi mis l'accent sur la formation...
A.G. Oui parce que la transformation des métiers induite par le numérique l'impose. Le budget formation a été multiplié par deux pour réajuster les compétences. Cent quarante-quatre salariés sont partis en stage en 2014, soit 85% des collaborateurs. C'est un gros effort. Il s'agit en majorité de formations techniques (digital) et cœur de métiers (commercial par exemple). Les vingt managers de l'agence ont également suivi une formation au management et bénéficié de coaching. Enfin, il y a depuis cette année une prime pour les managers, laquelle dépend de quatre critères dont la motivation de leurs équipes et le développement de leurs compétences.
Comment faites-vous pour renforcer l'esprit collectif?
A.G. Nous avons mis en place des comités de managers, chargés de réfléchir sur divers sujets, comme «quelles sont les valeurs de l'agence?», «comment mieux travailler ensemble?». J'ai aussi mis en place «le midi des métiers»: une fois par mois, une équipe présente ses missions, ses réalisations. Enfin, depuis deux ans, tous les salariés ont droit à une prime annuelle (qui équivaut à un demi mois de salaire) corrélée à plusieurs critères: implication, esprit d'entreprise, respect des valeurs de l'agence (respect, responsabilité et plaisir), apport de contacts...
Quels outils avez-vous mis en place pour évaluer les résultats de toutes ces mesures?
A.G. J'ai commandé une enquête interne, portant sur six thèmes (connaissance du projet d'entreprise, management, communication...) et comptant cent douze questions. Nous avons communiqué les résultats fin janvier: 88 % des salariés pensent qu'ils ont de bonnes conditions de travail et 87% jugent qu'il y a un bon équilibre entre vie privée et vie professionnelle.
Chez Australie, la DRH donne aussi des cours d'improvisation...
A.G. En effet. Comme je suis par ailleurs professeur de théâtre, je donne des cours d'improvisation tous les mercredis midi, et ils rencontrent un certain succès: vingt-quatre personnes y participent. C'est une victoire pour moi: quand on ose improviser devant sa DRH, cela veut dire que l'on a passé un cap dans la relation.