[Cet article est issu du n°1953 de Stratégies, daté du 7 juin 2018]
À la croisée des ruelles du Marais se cache un petit atelier, le « Messieurs Dame ». Mais ce sont uniquement des garçons qui partagent ce lieu de travail, sept artistes qui revendiquent le même style. C’est dans cette tanière que se cache l’illustrateur Tom Haugomat. Sa dernière création ? Une série de toiles, de la taille d’un Polaroïd, représentant des paysages bretons, souvenir de ses dernières vacances. « Je ne dessine jamais sur place, je prends des photos puis je me pose dans un coin comme un autiste et recrée ces paysages au feutre », plaisante Tom Haugomat.
Après une prépa à l’atelier de Sèvres et un diplôme en Conception et Réalisation aux Gobelins, l’artiste ne se voyait pas directement aller au charbon. « J’étais un peu stressé par le monde professionnel. Du coup, avec mon ami réalisateur Bruno Mangyoku, nous avons co-écrit un film d’animation, “Jean François” qui a de suite été coproduit par Arte », raconte Tom Haugomat. Coup de poker ou tout simplement coup de génie, le film a été primé meilleur premier court-métrage au festival d’Annecy. Suivra un film d’animation plus long et surtout plus ambitieux en 2012. « Au niveau du style, “Nuisibles” est plus radical que notre premier film, nous avons choisi une tonalité minimaliste », explique l’artiste.
De l’animé au statique
Une fois la success story-atteinte, personne n’aurait parié qu’il l’abandonnerait pour se tourner vers le terrain aride de l’illustration. America, Revue XXI, New Yorker, Le Monde, de grands magazines se bousculent pour lui passer commande. À côté de cela, il effectue un travail de réalisation pour des films publicitaires. « Au départ, je travaillais sur des campagnes pour le côté rémunérateur, cela ne me passionnait pas forcément », confesse-t-il. Jusqu’à ce qu’il se lance en freelance en 2013 et s’accorde un droit de refus pour certains pitchs. Des agents commencent à le contacter, et depuis plusieurs campagnes internationales trônent sur son CV pour notamment California Avocados, American Express, le quartier de Covent Garden, Volkswagen ou Evian.
Ni son blog professionnel, ni son compte Instagram n'exposent ces campagnes publicitaires. « Peut-être que ça me fait perdre du boulot, mais ce tri vaut quand même le coup, cela me permet de travailler sur des projets qui sont en accord avec mon style actuel, plus chaud et moins vectoriel », assume l’illustrateur. Un parti pris qui semble payer puisqu'en septembre prochain sort son premier livre, À travers. Sous forme de diptyques, l’illustrateur retrace la vie d’un homme qui observe sa vie au travers de divers objets. « J’ai hâte de l’avoir entre les mains », s'extasie-t-il. En parallèle, une exposition à la Galerie Jeanne Robillard accompagnera la sortie de son livre.