Certains parlent de révolution relationnelle, d’autres de manipulation marketing. Démarche véritablement moderne ou travail dissimulé: que penser de la co-création? Si elle fait complètement écho à une prise de pouvoir des consommateurs et à une libération de la parole, la co-création permet également aux marques de travailler la proximité avec leurs audiences et in fine de maximiser la préférence.
Suite à de profondes transformations des modes de consommation et des relations aux marques, les démarches collaboratives se sont développées. La digitalisation des expériences, des relations et au final du quotidien lui-même a fait naître un consommateur sans précédent. L’explosion des réseaux sociaux a fondamentalement changé la donne des comportements consommateurs actuels. En effet, la conversation, entre consommateurs ou avec les marques et les institutions, est devenue un point central de la relation client et de l’innovation.
Ainsi, le consommateur, pour que les marques répondent mieux à ses besoins, est prêt à lui apporter son aide dans une véritable relation symbiotique qui bénéficiera aux deux parties. Certaines marques fondent d’ailleurs leur business modèle sur cette co-création et n’envisagent pas leur existence sans une sollicitation perpétuelle de leurs clients, dans une dynamique d’amélioration continue.
Besoin de reconnaissance
Qu’ont vraiment à gagner les consommateurs qui participent à ce type de démarches ? À y regarder de plus près, il est possible d’identifier différents types de motivations : la motivation utilitaire (il me semble utile de participer à l’amélioration d’un produit, d’un service pour qu’il me corresponde mieux), expérientielle (cela m’intéresse de faire l’expérience d’une discussion avec une marque pour l’aider à s’améliorer), communautaire (j’ai plaisir à échanger avec des individus qui me ressemblent, sur des sujets qui nous concernent particulièrement).
Citons également le besoin de reconnaissance (il est satisfaisant que mes envies et besoins soient écoutés et entendus par une marque), l’envie de partager (je ressens le besoin de m’exprimer sur ce que je ressens, ce que je vis), le besoin d’accomplissement (je me réalise en tant que consommateur dans une dynamique ou je fais entendre ma parole et où elle est prise en compte).
S’inscrire dans un projet
Le fait de partager son avis avec une communauté est une réalité qui s’exprime pleinement au sein d’écosystèmes comme TripAdvisor ou les app stores, quand les individus contribuent volontiers sans attendre la moindre récompense sinon que celle d’apporter leur pierre à un édifice communautaire efficace. Mais on peut observer que les raisons de s’adonner à la co-création ont toutes un point commun dans leur diversité : une volonté de suivre une marque, de s’inscrire dans un projet, de proposer une idée, d’entrer en discussion et de s’intégrer au sein d’une communauté. C’est un véritable travail conscient dans lequel le fait d’être écouté et pris en compte est le véritable attrait, plutôt qu’une potentielle rétribution.
Cette dynamique collaborative est particulièrement intéressante pour les marques. Cet empowerment consommateur – qui donne au consommateur une place toute particulière dans les process de décision et de développement – les aide de façon double : en créant des offres qui répondent véritablement aux besoins des consommateurs et en maximisant la fidélité à la marque. Les marques qui prennent le temps d’écouter et d’inclure personnellement les consommateurs dans leur quotidien sont des marques dont la valeur est particulièrement reconnue (on parle ici de l’effet de dotation : on a tendance à attribuer plus de valeur à quelque chose que l’on possède ou dans lequel on s’est personnellement investi si l’on transpose à la dynamique co-création).
Emergence de leaders
Tous les consommateurs ne sont pas capables de co-créer. Selon Forrester Research, 90% des participants sont des «spectateurs», 9% des «enthousiastes» et 1% des «créatifs». Ceci ne diminue en rien la légitimité de la démarche mais oblige au contraire à prendre en considération les principaux contributeurs et leur influence.
Dans les conversations, des leaders finissent toujours par émerger et se distinguent par leur capacité de vision et d’entraînement, une dynamique fondamentalement liée aux réseaux sociaux. Cela induit qu’il faut prendre en compte deux dimensions dans la co-création : l’effet de volume (les nombreuses contributions d’une masse de participants) et l’effet de singularité (la pertinence de quelques participants qui tirent les conversations et l’innovation vers le haut). Cette combinaison permet de donner naissance aux meilleures idées, de les développer, les faire grandir et les valider.
Si tous les secteurs n’avancent pas à la même vitesse, force est de constater que la co-création s’invite de plus en plus au cœur des stratégies marketing et innovation dans tous les domaines. C’est une dynamique qui accélère la mise sur le marché et améliore par ailleurs la flexibilité et l’agilité de l’entreprise. Ce peut donc être un élément décisif d’aide à la transformation des entreprises.