Presse
Nommée en novembre 2017, Michèle Benbunan, la PDG de Presstalis, tente d’éviter la liquidation judiciaire du groupe en lançant un plan de transformation, lequel nécessite un prêt de 140 millions de la part des actionnaires-éditeurs pour renouer à l’horizon 2019 avec des bénéfices. Elle nous détaille son analyse et son projet.

Presstalis peut-il être sauvé ?

Presstalis mérite d’être sauvé. La distribution de la presse dispose d’un gros potentiel. La filière représente près de 2 milliards d’euros. Mais Presstalis repose sur un système hybride entre une coopérative et un groupe privé, auquel on a ajouté une couche de régulation qui complexifie le système et empêche des ajustements. Il faut déréguler ce marché pour qu’il soit plus fluide.

Quels sont les inconvénients de ce système hybride ?

À la tête des coopératives, il y a des éditeurs qui sont à la fois des clients et des actionnaires. Lorsqu’il y a des arbitrages, décident-ils en clients en visant un moindre coût ou en actionnaires ? D’autre part, un même éditeur peut être administrateur des deux distributeurs que sont Presstalis et les MLP [Messageries lyonnaises de presse]. Enfin, les éditeurs peuvent dénoncer en permanence ces contrats par un système de préavis roulant, ce qui crée une tension permanente et une concurrence dont la brutalité m’a étonnée.

La couche de régulation, c’est la loi Bichet de 1947…

Elle a été créée pour garantir que toutes les opinions politiques publiées soient représentées. A-t-elle un sens dans le monde d’internet ? Cette loi laisse-t-elle suffisamment aux points de vente le choix de leur assortiment dans une filière où il y a 65 % de retours de marchandise ? Une expérience menée par Relay sur une sélection d’offres dans les hôpitaux a permis une augmentation de 9 % du chiffre d’affaires.

Vous avez gelé 25 % du chiffre d’affaires des éditeurs en décembre et janvier. Quand comptez-vous les rembourser ?

À mon arrivée, ma première décision a dû être celle-là car je ne pouvais plus payer les 1 200 salariés de l’entreprise. Je les rembourserai dès que je le pourrai, courant mars probablement.

Que préconisez-vous pour sortir Presstalis de la crise, avec un trou de 20 millions d’euros fin 2017 et un endettement de 170 millions d’euros ?

Presstalis a engagé à tort des dépenses coûteuses qui nous ont amené à cette situation critique. Je propose un plan de transformation très ambitieux mais réaliste. Il remettrait l’entreprise sur les rails d’ici fin 2019 avec 15 millions d’euros de bénéfices. Il éviterait la liquidation de Presstalis et, par ricochet, un probable effondrement de toute la filière qui compte 24 000 points de vente desservis à 75 % par Presstalis et 25 % par les MLP. 

J’ai besoin de 140 millions d’euros des actionnaires pour sauver Presstalis, sous forme d’une contribution exceptionnelle ou d’un prêt. La modernisation et la sortie de crise sont à ce prix. J’ai besoin de l’engagement de tous les éditeurs, petits et gros. Le Conseil supérieur des messageries de presse propose une contribution de 2,25 % du chiffre d’affaires.

Les lecteurs vont-ils faire les frais de cette taxe supplémentaire ?

Je suis distributeur, et c’est l’éditeur qui fixe le prix de ses publications.

En interne, par quoi va passer la restructuration ? Un plan de sauvegarde de l’emploi qui toucherait 250 personnes ?

C’est envisagé. Nous devons vivre selon nos moyens, donc plus modestement, en déménageant notamment. Et faire du développement commercial.

Les pouvoirs publics sont-ils enclins à soutenir votre plan d’action ?

Oui, si les éditeurs se montrent solidaires.

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