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Dans «Génération quoi», vaste opération transmédia lancée par France Télévisions et diffusée à partir de ce 15 octobre, trois documentaires et une plate-forme interactive tentent de dresser l'autoportrait des 18-34 ans.

Le film s'ouvre sur des visages jeunes, les yeux clos, comme pour mieux plonger en eux-mêmes. Il y a Jean-Pierre, qui se souvient de ses camarades de 4e, qui «étaient bêtes» et qui ont pourtant fait «au moins un BTS» alors que lui enchaîne les missions d'intérim à l'usine où il répète des gestes automatiques. Il y a Massira, l'étudiante en droit d'origine guinéenne, si charismatique pendant son concours de plaidoirie en amphithéâtre et, en même temps, si fragile, qui se demande tout sourire si une «révolution» ne serait pas une bonne réponse pour une «génération sacrifiée». Ou Romain, l'étudiant de l'Essec qui ne s'est jamais fait de souci pour son futur emploi et entend pourtant le patron d'Accenture dire qu'il appartient à une «génération à risque».

Dans trois films documentaires, qui seront diffusés sur France 2 les 15 et 22 octobre, Laëtitia Moreau filme la jeunesse française à Cergy-Pontoise en s'arrêtant pendant un an sur «les moments clés de la vie» d'une quinzaine de jeunes. Originalité de cette programmation, qui est d'ailleurs susceptible d'être complétée, elle est associée à une vaste plateforme interactive produite par Upian destinée à dessiner l'autoportrait de la génération des 18-34 ans. Génération «quoi»? Surtout ne pas dire «y»! «Une formule du marketing et des ressources humaines qui en apprend plus sur ceux qui la prononce que sur une classe d'âge», estime Christophe Nick, le producteur des documentaires.

Absence de storytelling

Le dispositif Internet, fruit d'une association fructueuse entre le département des nouvelles écritures de France Télévisions et la société Upian, est tout le contraire de cette vision managériale qui révèle parfois une grande incompréhension. A travers 143 questions, élaborées avec les sociologues Cécile Van de Velde (EHESS) et Camille Peugny (université Paris VIII), l'idée est de donner la parole à cette jeunesse pour qu'elle puisse, enfin, dire ce qu'elle est, ce qui l'anime, la fait vibrer, la révolte, etc. Les thématiques affichées pour susciter l'entrée dans cette base de données sociologique sans précédent? «Chacun pour moi», «Classée X», «Pôle emploi», «Indignés», «Accrocs», «Mort aux vieux».

«C'est la première fois que je fais un programme où il n'y a pas de storytelling, souligne Alexandre Brachet, le fondateur d'Upian, ce sont les internautes qui ont le pouvoir.» Pour favoriser leur engagement sur la plateforme, l'internaute sait régulièrement comment il se situe statistiquement par rapport aux autres. Des vidéos montrent aussi les jeunes en train de se prêter au jeu des questions et de débattre ensemble.

Conscience de génération

Grâce au relais d'Animafac qui regroupe 6 000 associations étudiantes, près de 40 000 questionnaires ont été remplis. Selon Camille Peugny, «on voit émerger quelque chose comme une conscience de génération, avec une grande majorité qui s'accorde à dire que les générations précédentes sont responsables de leurs problèmes». La défiance envers les politiques ou les médias se confirme. Mais transparaissent aussi la façon de vivre sa dépendance financière vis-à-vis des parents ou la potentialité d'une révolte... Un blog ad hoc, L'Observatoire de la jeunesse, restituera les informations et les opérations suscitées par les partenaires, Le Monde et Europe 1.

«On va provoquer plein de choses», espère Boris Razon, directeur des nouvelles écritures de France Télévisions. «On ne peut pas avoir placé la jeunesse au centre du débat sans qu'il y ait retour à l'envoyeur», relève de son côté Hervé Brusini, directeur de France TV info. Une allusion à la promesse de François Hollande, en 2011, de «réenchanter le rêve français» en offrant une vie meilleure à la génération qui vient.

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